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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Decker
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nous arrachait nos propres membres... Mais quand il faudra excommunier le malheureux nous ne succomberons pas à la douleur...
    Mépris complet de l’ex-évêque d’Autun.
    — Vous savez la nouvelle ? confie-t-il alors à son ami Levain, je suis excommunié ! Allez, venez donc souper avec moi pour me consoler. Comme tout le monde va me refuser le feu et l’eau, nous ne nous nourrirons ce soir que de viandes gelées et nous ne boirons que du vin frappé...
    Les représailles de Sa Sainteté le laissaient de marbre.
    Sans doute se souvenait-il, d’ailleurs, de son ancêtre lointaine, Brunissende de Talleyrand-Périgord qui autrefois, au tout début du XIV e  siècle, avait elle aussi fait tourner en bourrique un grand patron de la chrétienté, en la personne du pape des Templiers !
    Amoureux fou de Brunissende, le pape Clément V avait dépensé une fortune pour cette belle maîtresse dont on a dit qu’elle lui avait en effet coûté beaucoup plus cher que la Terre sainte !
    Apprenant l’excommunication de son évêque, madame la marquise de Marboeuf, une Autunoise fort âgée pour qui Charles Maurice avait probablement eu beaucoup de tendresse durant son bref séjour sur les bords de l’Arroux, lui écrivit une longue lettre dans laquelle elle expliquait qu’elle formait d’ardentes prières pour que le pécheur retrouvât le plus vite possible la voie du ciel.
    Madame de Marboeuf était une très vieille religieuse du Sacré-Coeur.
    Dans le courrier expédié à l’apostat qu’elle portait malgré tout en son coeur, la marquise aux cheveux blancs avait joint une médaille de la Sainte Vierge.
    On la retrouvera sur lui, après sa mort.
     
    Ce n’est pas sur les rives de l’Arroux qu’on le rencontre à la date du 24 janvier de 1792, c’est sur les bords de la Tamise. Parce que le gouvernement a décidé qu’une bonne petite guerre ferait du bien à tout le monde. Une « guéguerre » qui, croyait-on, se limiterait à une démonstration militaire dans l’électorat de Trèves où les émigrés coulaient des jours trop heureux au gré des révolutionnaires.
    — La guerre serait actuellement un bienfait national, avait lancé le girondin Brissot du haut de la tribune de l’Assemblée.
    Les exaltés s’imaginaient en effet qu’une belle victoire patriotique et populaire permettrait d’abolir la royauté, pendant que, de son côté, le roi Louis XVI formait des voeux pour une défaite qui serait susceptible de lui redonner le pouvoir.
    Résultat de cette entreprise, malgré Talleyrand expédié en mission à Londres pour tenter d’obtenir la neutralité de George III et de son Premier ministre William Pitt, la « guéguerre » allait tout simplement durer pendant près de vingt-trois ans, jusqu’au 18 juin 1815 précisément, c’est-à-dire jusqu’au jour où, dans la « morne plaine » de Waterloo si chère à Victor Hugo, tout un monde s’effondrera.
    Mais pas Charles Maurice !
    — Talleyrand est donc parti pour Londres où il n’aura pas la tâche facile, observe alors Governor Morris. Car le blâme l’accompagne, pas tant pour ses relations adultères, car cela est assez commun dans les rangs du haut clergé, mais pour la variété et la publicité de ses amours et pour sa passion du jeu.
    Il ne se trompait pas. Car le moins que l’on puisse en dire, c’est que l’accueil que lui réserva Sa Gracieuse Majesté le roi George III ne fut pas des plus chaleureux. Un entretien hâtif, le ton cassant, pendant que la reine feignait d’ignorer totalement le visiteur.
    Méprisé par le roi, snobé par la noblesse de Londres qui refusait de l’accueillir dans ses parties de whist, Charles Maurice vivait un double échec, diplomatique et mondain. C’était insupportable. Dans ces conditions, direction Paris !
    La désertion après l’échec ? Non, ce serait le mal connaître, un repli stratégique simplement. Avec la conviction qu’il ne tarderait pas à revenir et que, cette fois, il obtiendrait la neutralité de la grande île. Alors, il serait considéré à sa juste valeur, accueilli dans les salons, flamberait ses frais de missions sous les lampes bouillottes des tables de jeu et ferait un brin de cour à telle ou telle Anglaise pourvu qu’elle n’ait pas la denture trop chevaline.
    Fin avril, il est de retour et dès le 25 mai il l’emporte. Ce jour-là, il parvient à convaincre le roi George de ne pas se mêler d’un conflit dans lequel sa voisine la

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