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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Decker
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États-Unis, ce pays dont Governor Morris lui avait dit tant de bien.
    — L’Amérique est un asile aussi bon que tout autre, convient-il alors. C’est un pays à voir pour n’y faire qu’un voyage...
    Mais on imagine la déchirure ! Adieu ses vieilles habitudes londoniennes, ses amours coquines des bords de la Tamise, ses soirées chez Adélaïde ou Germaine quand ce n’était pas chez la pétillante Perette de la Châtre qui, dès que Charles Maurice aura le dos tourné, s’empressera d’épouser le duc de Jaucourt, un homme à la peau si blanche qu’il en avait même mérité le surnom de Clair de Lune.
    Pâle de carnation, Jaucourt, le mari de Perette, ne sera cependant pas un duc terne. Ainsi, quand il donnera à Talleyrand des nouvelles de son épouse, il n’omettra jamais de préciser : « Je ne manque pas de vous rappeler que ma femme vous aime peut-être plus qu’elle ne m’aime. » ou bien : « Sachant que je vous écris, ma femme me prie de vous dire pour elle mille tendresses. »
    Quel savoir-vivre !
     
    C’est encore loin l’Amérique ?
    Avant le débarquement à Philadelphie, la traversée dura trente-huit jours.
    Cinq semaines passées à bord du William Penn avec, à la clef, une catastrophe évitée de justesse. Si l’on en croit le comte de Wattersdorf, qui deviendra un jour ambassadeur du Danemark à Paris, un matin, en effet, le voilier à bord duquel l’ex-évêque se prélassait en attendant de voir la terre fut violemment arraisonné par un bâtiment britannique.
    — Inspection du navire ! Avez-vous quelques émigrés français à votre bord ?
    Et Talleyrand n’aurait dû son salut qu’en se précipitant vers les cuisines où il se serait déguisé en maître queux, avec un grand bonnet sur la tête et un ample tablier bleu sur le ventre.
    Il est vrai que le bonhomme s’y connaissait en matière de cuisine... électorale.
    Les rues de New York étant encore peuplées de vaches et de cochons – dixit Talleyrand –, Philadelphie était alors la véritable capitale des USA. Quant à l’Américain de base, à l’en croire, c’était l’Iroquois qui brillait par sa malpropreté.
    — Oui, dira-t-il, les États d’Amérique sont un pays où il y a trente-deux religions pour un seul plat. Et il est mauvais...
    S’agissait-il déjà d’un quelconque fast-food favorisant l’obésité ?
    Il se réjouit du café, en revanche. Car il l’estime de meilleure qualité que celui que l’on buvait en France depuis Louis XV, à l’initiative du Normand Gabriel de Clieu qui en avait planté quelques grains en Martinique.
    — Ici, dit Talleyrand, il est noir comme le diable, chaud comme l’enfer, pur comme un ange et doux comme l’amour...
    Les amours de Talleyrand outre-Atlantique ? Elles étaient précisément comme le café, raconte Moreau de Saint-Méry, un ancien député de la Constituante réfugié à Philadelphie.
    — Il ne se privait pas d’afficher sa liaison avec une dame de couleur d’ailleurs fort jolie, explique-t-il.
    Il avait également adopté un chien, un animal qui possédait un étonnant sens de l’observation.
    — Avant d’entrer chez monseigneur, la bestiole avait soin de sonner et quand on ne lui ouvrait pas, au lieu d’attendre, par un raisonnement d’homme, elle se rendait chez la maîtresse et se couchait sur le lit jusqu’au retour des deux amants.
    Le lit des deux amants ! Avec Germaine de Staël, Talleyrand pensait bien avoir connu ce que l’on pouvait faire de pire, mais ce pire n’était rien à côté de ce qui l’attendait dans le lit de Doudou.
    Doudou, c’était ainsi qu’il surnommait sa belle négresse à la sensualité exacerbée, cette femme à la senteur musquée, au bras potelé de laquelle il se plaisait à descendre la grand-rue de Philadelphie avec l’idée de faire blêmir à jamais les amish, de scandaliser les mormons figés et les quakers amers.
    Doudou, au fort goût d’épices et de fruits exotiques, était une véritable mante religieuse.
    Aussi, et peut-être parce qu’il y allait de sa survie, Charles Maurice ne s’attarda pas dans la capitale provisoire des nouveaux États-Unis. Il décida de voyager et de se lancer dans les affaires. New York, Boston, le Maine, les Grands Lacs, les chutes du Niagara, etc. Il se transforma en touriste insatiable et en agent immobilier au nez creux. Empruntant d’importantes sommes d’argent, il achetait des terres à vil prix et les revendait ensuite en

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