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Talleyrand, les beautés du diable

Talleyrand, les beautés du diable

Titel: Talleyrand, les beautés du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel de Decker
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donnée à son neveu Edmond pour que la dynastie des Périgord fût dignement assurée, voilà tout.
    Edmond le fruit sec !
    Qui avait le goût des danseuses, des gourgandines de garnison, des tables de tripot et de l’esbroufe. Il portait des uniformes si chamarrés que c’en était insupportable.
    — C’est vrai, raconte le maréchal Berthier, il lui arrivait souvent d’être pailleté, doré, brodé et endiamanté au point qu’on aurait pu le croire en carnaval.
    Elle était mal en ménage, la petite Dorothée, mal dans sa peau, tout simplement. Même quand celle-ci commença de se poteler délicatement après une première maternité.
    — Elle avait la tristesse hautaine, selon le comte de Narbonne.
    On voyait bien, aussi, qu’elle remplissait ses fonctions de dame d’honneur de l’Impératrice avec une certaine répugnance. Ce qui lui valut un jour une réflexion désobligeante de Napoléon. La rencontrant dans les appartements de sa femme, il lui avait en effet lancé sèchement :
    — Votre mari fait vraiment trop de sottises. Comment peut-il avoir acheté pour 10 000 francs de camées ?
    — Sire, Votre Majesté aura été mal renseignée, mon mari n’a point fait cette sottise.
    Pourtant, il l’avait commise.
    — Du reste, ces pauvres Périgord me sont, comme vous le savez, depuis longtemps indifférents, avait insisté l’Empereur voulant avoir le dernier mot.
    Alors Dorothée avait blêmi.
    — Sire, mon mari et mon oncle ont toujours servi Votre Majesté avec zèle, et il ne tient qu’à elle de continuer à les utiliser. En tout cas leurs services passés mériteraient au moins que Votre Majesté ne se moquât pas d’eux.
    Charles Maurice dédramatisa l’événement. Il lui expliqua que Napoléon était coutumier de ce genre d’attitudes vexatoires et qu’il était mieux placé que quiconque pour le savoir. La preuve, ne venait-il pas de recevoir un avis comminatoire lui interdisant de disposer des biens provenant des largesses impériales en faveur de la petite mademoiselle Charlotte, la fillette qui, comme on s’en souvient, avait fait irruption à Bourbon-l’Archambault. Il caressait en effet le rêve de la doter pour la bien marier le moment venu. Il envisageait aussi d’adopter le couple Edmond et Dorothée pour en faire un jour ses héritiers.
    Encore fallait-il que son neveu devînt moins dépensier.
    Comment occupe-t-il son temps maintenant que Napoléon lui a définitivement fait savoir qu’il n’a plus besoin de ses services ? À l’hiver de 1812, il achète une nouvelle résidence parisienne, une demeure du plus pur XVIII e située à l’angle de la place de la Concorde, entre la rue Mondovi et la rue Saint-Florentin. Cet hôtel construit à l’origine pour Louis Phélippeaux, comte de Saint-Forentin et duc de la Vrillière, d’après les plans du grand Gabriel avait connu des propriétaires successifs : le duc de Fitz-James, par exemple, un vieil ami de bamboche de Philippe Égalité ; la princesse de Salm-Salm, duchesse de l’infantado ; l’ambassade de Venise y avait eu ses bureaux au début de la Révolution, et puis il avait fini par être transformé en fabrique de salpêtre. Talleyrand devenu propriétaire, on allait maintenant comme y sentir une odeur de poudre... de succession.
    Car il y a plus que jamais du complot dans l’air.
    — Je peux l’affirmer, raconte la comtesse de Kielmannsegge. Un jour, au moment d’entrer dans la chambre de la duchesse de Courlande, je me suis arrêtée, interdite. Des éclats de voix traversaient la porte, je reconnaissais celle de la duchesse, de madame de Laval et celle du prince de Bénévent. Je les entendais se concerter pour le plus abominable des complots qui aient été ourdis contre l’Empereur. Chacun d’eux s’engageait de la façon la plus formelle et la plus solennelle à user de tous les moyens pour exciter contre lui la haine de l’empereur Alexandre de Russie. Et, pour en finir, monsieur de Talleyrand prononça ces paroles : « Et voilà la façon dont nous le perdrons ! »
    Ce qui n’avait pas empêché Charles Maurice d’aller s’incliner, tout plein d’onctuosité et de componction, devant le berceau du petit roi de Rome et de lui donner du Sire et du Votre Majesté à tour de bras.
    En chuchotant cependant sous le manteau :
    — Tout cela finira par un Bourbon !
    Que fait-il quand il n’aménage pas son hôtel particulier – devenu aujourd’hui la légation des

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