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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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sa
famille sont partis sans nous avertir du danger que nous courrions. Pourquoi
d’ailleurs l’auraient-ils fait ? À leurs yeux, nous valons moins que leurs
chevaux et leurs moutons.
    — Si tu as demandé à me voir,
ce n’est assurément pas pour me parler de tes malheurs !
    — Je viens t’offrir mes services.
    — En ai-je besoin ?
    — Plus que tu ne le penses,
noble seigneur.
    — Explique-toi, grinça Mughit.
    — Tu assièges cette cité depuis
des semaines sans grand résultat.
    — Ses défenseurs sont des
guerriers valeureux et je n’ai pas assez d’hommes pour venir à bout de leur
résistance.
    — Tu surestimes tes
adversaires. En fait, la garnison de Cordoba est peu nombreuse car la plupart
des soldats sont partis renforcer celle de Toletum.
    — Pourtant, sur les remparts,
on voit quantité de soldats.
    — En fait, les habitants de la
ville, de l’artisan au marchand, ont tous été réquisitionnés. Les prêtres leur
ont raconté qu’ils seraient tous égorgés si vous preniez la ville.
    Ils sont donc décidés à vendre
chèrement leur peau et placent leurs espoirs dans l’arrivée improbable de
renforts.
    — Comment peux-tu être sûr que
ceux-ci ne viendront pas ?
    — Les nobles wisigoths ont
abandonné Roderic, leur propre roi, sur le champ de bataille pour courir
protéger leurs domaines. Pourquoi viendraient-ils au secours de malheureux
citadins qui n’appartiennent pas à leur peuple ?
    — Je ne vois toujours pas en
quoi tu peux m’être utile, dit Mughit.
    — J’ai la clef qui t’ouvrira
les portes de la ville.
    — Par quel miracle ?
    — Tu dois me croire.
    — Admettons. Qu’exiges-tu en
échange ?
    — Tout d’abord d’être admis
parmi vous. Les Chrétiens m’ont traité si durement que je les considère comme
mes pires ennemis. Le fait que votre chef ait vaincu Roderic est le signe à mes
yeux que votre Dieu est plus puissant que le leur. C’est Lui que je veux adorer.
    — Si tu désires devenir
musulman, rien de plus simple. Il te suffit de réciter la chahada [16] et de te faire circoncire.
    — Je le ferai.
    — Que veux-tu de plus ?
    — Que tu me donnes la propriété
où j’ai servi comme esclave.
    — Cela peut s’envisager, mais
tu dois la mériter.
    — Ai-je ta parole ?
    — Oui, à condition que tes
renseignements me permettent de prendre Cordoba.
    — Rien de plus facile. Au pied
de la première tour à droite du pont qui enjambe le fleuve, il y a un figuier.
    — Je n’y ai pas fait attention.
    — Dis plutôt que tes hommes
n’ont pu en approcher à cause du tir des archers. Sinon, ils auraient remarqué
que cet arbre dissimule une brèche dans la muraille que les Wisigoths n’ont pas
voulu réparer de peur que tu t’aperçoives de cette faiblesse dans leurs défenses.
    — Ne m’en dis pas plus, je sais
ce qu’il me reste à faire. Tu recevras la récompense que tu as demandée,
Abdallah.
    — Pourquoi m’appelles-tu
ainsi ?
    — Ce nom veut dire
« serviteur de Dieu » et c’est celui que tu porteras une fois devenu
musulman. Est-ce toujours ton souhait ?
    — Plus que jamais !
    Cette nuit-là, Mughit al-Roumi
demeura longtemps éveillé sous sa tente. Au petit matin, il intima l’ordre à
son principal lieutenant, Ali, de partir vers le Sud avec une partie de l’armée
afin de se procurer du bétail et du fourrage. L’officier ne parut pas autrement
surpris. Visiblement, dans la perspective d’un long siège, son chef prenait ses
précautions à l’approche de la période hivernale. Dès le départ de son second,
le général ordonna à ses troupes de cesser leurs opérations contre les
avant-postes wisigoths et de feindre un complet relâchement de la discipline.
Les espions qui grouillaient dans le camp – des paysans venus vendre leurs
produits ou des prostituées – ne manqueraient pas d’en informer les assiégés.
Ceux-ci en concluraient – du moins c’est ce qu’il espérait – que le
moral des Ismaélites était au plus bas et qu’ils attendaient le moment propice
pour battre piteusement en retraite. À partir de ce moment, les farouches
Berbères se tinrent cois, passant leurs journées à plaisanter et à bavarder
autour des feux qu’ils avaient allumés pour se réchauffer. Certains, sur
l’ordre de leur chef, firent exprès de tomber dans des embuscades et,
interrogés par le gouverneur de Cordoba, tracèrent un tableau fort sombre de
leur situation.
    Cette

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