Templa Mentis

enjambées. Il l’entrouvrit et cria aux gens d’arme qui patientaient :
    — Au repos. Mon… visiteur me quitte en gente entente.
    Le chevalier templier murmura dans son dos.
    — Mais… et la pierre rouge ?
    — À Dieu, Hugues.
    1 - 1270-1329. Certes femme de poigne, la réalité la concernant est loin de la fiction. Remarquable gestionnaire, protectrice des pauvres et des arts, elle refusa de se laisser spolier par son neveu Robert d’Artois. Mahaut ne céda jamais puisqu’elle héritait, en droite ligne, de son père. Rappelons que la coutume d’Artois à cette époque n’excluait pas les filles des successions. La Cour des pairs de France lui donna raison à l’issue de trois procès intentés par Robert. Il fut finalement banni du royaume pour avoir fourni des faux lors du dernier et trouva refuge en Angleterre où il fut fait comte de Richmond. Au fil des siècles, on accusa Mahaut à maintes reprises d’avoir été une empoisonneuse afin de parvenir à ses fins politiques, accusations sans fondement historique.

    2 - 1292-1358. Fille de Philippe le Bel, elle devint reine d’Angleterre par son mariage avec Edouard II en 1307. Elle-même de mœurs sans doute légères et mal conseillée, elle fit vraisemblablement exécuter en 1327 son mari le roi, placé sous la coupe de ses favoris.

    3 - Dans le sens de « très exercé à une discipline ».

    4 - Le « querelleur ». Le futur Louis X qui montera sur le trône en 1314 pour décéder dix-huit mois plus tard.

    5 - Les plumes d’oie ou de corbeau étaient réservées à l’écriture à traits fins.

    6 - De fait, on a deux interprétations de la personnalité de Philippe le Bel, radicalement différentes. Il s’agissait pour certains d’un roi inflexible et autoritaire. D’autres, de son temps, ont affirmé qu’on pouvait aisément le « chambrer et le flatter », peut-être parce qu’il écoutait volontiers les conseils de son épouse et des proches de celle-ci.

    7 - Longue plume.

    8 - De fait, l’hôtel de Tiron abrita une bonne part du procès.

XLVI
    La Loupe et forêt de Trahant, novembre 1306
    N Nues dans la cave prison, enlacées telles deux lianes sur la paillasse qui leur servait de lit, paupières closes, Laig et Paderma semblaient plongées dans une immobilité minérale. Le souffle de la fillette se fit plus profond, si lent, paisible, qu’on eût cru celui d’une dormeuse. Pourtant, son corps mince se tendit et des tremblements commencèrent à l’agiter.

    Nues, enlacées telles deux lianes, accroupies sur la grande table de pierre noire du dolmen, Igraine et Avéla semblaient plongées dans une immobilité minérale. Avéla ouvrit soudain les yeux. Igraine coula dans le noir d’encre de ses prunelles, la serrant encore davantage contre elle lorsque les frissonnements la prirent. La jeune fille claquait des dents. Son gémissement s’éleva, une sueur profuse dévala de son front, de sa nuque.
    La voix enfantine d’Igraine murmura contre l’oreille de la jeune fille :
    — Dis-lui que la fille que cherche la démone se trouve non loin. Dis-lui qu’elle seule peut comprendre la pierre d’éternité. Dis-le-lui. Vois-le, pour elle.
    Les tremblements prirent en ampleur. Le corps d’Avéla fut secoué de convulsions. Sa plainte devint rauque.
    — Dis-le-lui. Vois-le pour elle.

    Des larmes trempèrent les joues de Paderma, du sang coula de ses narines, si rouge sur sa peau blême. D’une voix qui ressemblait tant à celle d’Igraine, elle déclara :
    — La fille que cherche la démone se trouve non loin. Elle seule peut comprendre la pierre d’éternité. Nous devons accompagner la démone. Igraine nous attend.
    Soudain, Laig sentit le petit corps s’affaisser entre ses bras. Paderma venait de perdre connaissance.

XLVII
    Saint-Agnan-sur-Erre, novembre 1306
    C Contrairement à ce qu’il avait redouté, Druon avait dormi aussi profondément qu’un loir. Sans doute le généreux souper offert par le couple Leguet, arrosé de trois verres d’un vin capiteux, n’y était-il pas étranger. Druon avait craint que Blandine Leguet ne l’interroge sur sa visite au seigneur Luc d’Errefond. Mais la jeune femme avait fait preuve d’une extrême courtoisie et la conversation avait roulé sur de bénins et plaisants sujets.
    Et pourtant. Lorsqu’ils avaient rejoint leur chambre, le jeune mire voyait se profiler une nuit d’insomnie. Un tel chaos régnait dans son esprit ! Une sorte de vide très