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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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temps, j’ai confiance…
    — Et puis c’est pas trop mal payé, non, pour ce que je te fais…
    Elle s’assit sur le bord du lit avec la rapidité d’une anguille, un sourcil levé et une moue aux lèvres.
    — Pour ça, oui, mais pas pour la réputation qu’t’en r’tires…
    Mathieu se mit à rire.
    — C’est vrai…
    Au moins cette fois avait-il essayé. Il marcha vers la porte. Elle bondit pour le rattraper avant seulement qu’il en tourne la clef.
    — Attends… Tu pourrais au moins m’embrasser… C’est mieux un peu de rouge, là…
    Il la laissa se pendre à son cou, écraser sa bouche sur ses lèvres, en sonder le mystère. Elle finit par s’écarter en retirant la main qu’elle avait glissée entre ses cuisses. Pour vérifier une nouvelle fois.
    Elle bouda.
    — C’est à désespérer ! T’es sûr qu’t’es pas un inverti ? Pa’ce que d’habitude, avec moi…
    Mathieu lui caressa la joue d’un doigt tendre. Elle était jolie. La plus jolie sans doute des filles de ce bouge dans lequel depuis une dizaine de jours Le Teigneux les maintenait.
    — Je ne suis sûr de rien, sinon que mon capitaine m’a fait un joli cadeau en te choisissant pour moi. C’est son pécule que je dépense, le sais-tu ?
    Elle secoua la tête.
    — Qu’est-ce que ça change puisque t’en jouis pas ?
    Mathieu soupira. Jolie mais sans cervelle.
    — Disons que c’est un prêt qu’il me consent sur mes gages futurs. Et que tu es la caution.
    Elle lissa les pans de sa robe, à peine froissée pour donner l’air de leurs étreintes.
    — C’est trop compliqué pour ma p’tite tête, mon beau. Tout c’que j’sais, moi, c’est qu’c’est dommage.
    — Tu n’aimes pas ma compagnie ?
    Elle revint se coller à lui, souleva le bandeau de son œil pour biser la cicatrice, dessous.
    — Si, justement, et j’préférerais qu’tu m’trousses pour d’vrai.
    Il l’enlaça brusquement, la troublant du contact de sa main sur ses fesses.
    — Je ne dis pas que ça ne viendra jamais…, lui susurra-t-il sur son souffle accéléré.
    Elle se liquéfia.
    Il la lâcha tout aussi subitement.
    — Mais jusque-là, tiens ta langue, ou je te l’arracherai. Avec ça, ajouta-t-il en lui brandissant son crochet sous le nez.
    Elle blêmit mais trouva encore l’ardeur de gémir.
    — Y a pas, mon beau… Tu m’plais…
    Dans une totale incompréhension de la nature féminine, il la repoussa, puis, se détournant d’elle, déverrouilla la porte sans regret.
     
    Aussitôt, les voix atténuées par le bois retrouvèrent leur intensité. Celle de son capitaine surtout. Visiblement il avait encore perdu aux dés. Mathieu pouvait déjà deviner la suite. Il se dresserait d’un bond, renverserait la table sur les genoux de son adversaire, puis se jetterait sur lui.
    Il enfila le couloir, au moment où fut gueulé :
    — Tricheur, j’m’en vais t’saigner !
    Le début des hostilités.
    La table vola. Il s’accouda à la rambarde qui surplombait la salle. Pas envie cette fois de s’en mêler. Le Teigneux était capable de régler seul son affaire. Mathieu le vit enjamber le meuble brisé avec ses longues jambes de Normand tandis qu’autour de lui la place se vidait par la porte grande ouverte. Même le tavernier, d’ordinaire enclin à apaiser la querelle, n’osait s’interposer.
    De là où il se trouvait, Mathieu ne put apercevoir de l’imprudent qu’une chevelure brune et bouclée. Un nouveau sans aucun doute, les habitués de l’auberge ayant renoncé à défier Le Teigneux depuis qu’il en avait occis deux. Pour les mêmes raisons. Il était saoul et il détestait perdre. Le malheureux aurait mieux fait de s’abstenir. Mathieu dut lui reconnaître pourtant un certain courage. Ou de l’inconscience. Anticipant la fureur de son adversaire, il avait bondi de côté mais ne s’était pas enfui comme le bon sens le lui aurait recommandé. Il demeurait debout, à une toise du Teigneux qui avançait, les épaules voûtées, les poings serrés.
    Un sanglier prêt à charger, voilà à quoi son capitaine le fit penser. L’autre ne faisait pas la moitié de son poids.
    Le sot, songea Mathieu en l’entendant pourtant plaider d’une voix ferme :
    — C’est la règle et elle vaut pour tous. Tu as perdu. Ton navire est à moi.
    Mathieu retint un sifflement admiratif. La caravelle ! Rien de moins ! Cet inconnu ne manquait pas de panache. Dommage qu’il ne vive plus assez longtemps pour en

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