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Terra incognita

Terra incognita

Titel: Terra incognita Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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claquement sec, traversant d’un bleu pur sa roche ambrée.
    Khalil recula. Son rôle était achevé et une voix impérieuse lui commandait de quitter la pièce.
    Un halo grandissait déjà autour d’Elora.
    Il tourna les talons et sortit dans le grondement de la pierre qui s’était mise à rouler.
    Un sourire heureux flotta sur ses lèvres.
    Il avait fait ce qu’il devait.
    *
    Ce fut une envie pressante qui, de longues heures plus tard, décida Nycola à réveiller Mounia.
    Secouée délicatement par l’épaule, elle s’arracha avec difficulté d’un rêve doucereux dans lequel Enguerrand la berçait de promesses. Elle ouvrit les yeux avant de les refermer sur un grognement, agacée par le falot trop proche.
    — Je dois sortir quelques minutes, s’excusa-t-il en l’écartant.
    Résignée, elle s’assit, frotta son nez retroussé puis, pendant qu’il récupérait Bouba sur son épaule, s’étira pour dénouer son dos moulu par la dureté du sol.
    — Personne encore ?
    — Ni homme, ni bête. J’emporte une lanterne et mon coutelas, annonça le Bohémien.
    — Va plutôt sur la terrasse. Un des murets de clôture te protégera tout en te laissant une vue d’ensemble.
    — L’aube est proche. Anubis ne se réincarnera pas, rendors-toi, la rassura-t-il.
    Elle s’allongea, les yeux gonflés encore de sommeil.
    — Jusqu’au lever, les félins sont dangereux. En cas de danger, envoie-moi Bouba.
    Il acquiesça, contourna les dromadaires et escalada l’empierrement qui barrait le passage.
    Sitôt qu’il fut de l’autre côté, il inspira à grandes goulées l’air vif qui tombait de la terrasse par l’escalier à ciel ouvert. Nycola n’avait jamais été d’une nature trop délicate mais il devait reconnaître que l’air déjà restreint de la petite pièce s’était vicié en quelques heures. À se dandiner dessus, il n’avait pas vraiment mesuré à quel point leurs montures puaient d’haleine et de poil.
    Il en était empesté et migraineux. Il se demanda comment Mounia pouvait s’en accommoder avec autant d’indifférence.
    Décidément, songea-t-il, ses ressources naturelles ne cessaient de le surprendre.
    Il remonta l’escalier quatre à quatre, heureux de délier ses jambes musculeuses. Dans quelques jours il entrerait dans sa quarantième année et se sentait encore des vigueurs de jeune homme. Se rangeant au conseil de Mounia, il s’adossa à un pilier, vérifia les alentours, puis, à l’exemple de Bouba qui se soulageait à ses côtés, se débraguetta sans crainte.
    Malgré sa froidure, la nuit était splendide.
    Son affaire faite, Nycola décida de s’attarder. Mounia s’était certainement rendormie et aucune bête ne viendrait, il en était persuadé. Avisant deux pans de mur éboulés sur l’angle desquels un pan de toiture était resté accroché, il se tapit dans cet abri, récupéra Bouba sur ses genoux, puis fixa les crêtes de la barrière montagneuse sur lesquelles une myriade d’étoiles semblait s’accrocher. Comme le petit singe, il observa peu à peu les vapeurs du lever éteindre le halo céleste.
    C’est au moment où la montagne commença à apparaître dans une brume légère et ambrée des premières lueurs du jour que la mémoire lui revint.
    Il avait déjà assisté à ce lever. Par le récit que son grand-père en avait fait.
    Noué par ce souvenir ramené en surface, il se revit, tout jeune enfant, au chevet du vieil homme qui depuis plusieurs jours déjà toussait à s’en arracher les poumons. La fièvre menaçait de l’emporter et, selon les coutumes de leur communauté, tous avaient été appelés à le veiller, nuit et jour. Les adultes, comme les enfants. Nycola se retrouva à éponger le front blême de ses petites mains inquiètes, soucieux de lui apporter un peu de réconfort dans son délire.
    « Tu ne peux imaginer comme est belle la lumière qui s’étire sur la montagne Cîme, comme est douce la chaleur du petit jour sur le village à son pied, ânonnait le vieil homme, les yeux clos.
    « Je me souviens de la première fois où mon père m’a emmené devant le Géant, dans le sanctuaire, il m’a caressé le front, puis m’a fait prêter serment. J’ai été si fier de le servir ensuite, si fier d’aider à son grand œuvre. Grâce à ses bontés nous ne manquions de rien, ma famille et moi. L’ennui nous était inconnu tant nous tenait la quête de Merlin. Lorsqu’elle s’acheva, ma fierté était telle d’y avoir

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