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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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whisky. Avec un peu de chance, il leur restait encore quelques mois à vivre sous le même toit. Sa maîtresse brisa ses toutes dernières illusions.
    — La situation doit prendre fin bientôt, je n’en peux plus.
    — Le jour où tu me donneras ton accord, je vais trouver un petit appartement en ville. Je peux me le permettre, tu sais.
    L’offre réitérée lui valut un sourire de reconnaissance.
    — Je ne veux pas me faire entretenir. Je gagne mon pain depuis que j’ai douze ans.
    — Cela pourrait être temporaire, le temps de te trouver un emploi...
    dans
    un
    autre
    domaine
    que
    le
    travail
    domestique.
    — As-tu honte de ma situation ?
    Fernand se plaisait à penser que cette jeune personne, par le biais de leur relation, avait appris à lire, à parler, à se comporter comme une femme de bonne condition.
    Evidemment, ramasser les saletés des autres ne paraissait pas une occupation convenable pour celle qu’il respectait.
    — Ce n’est pas cela. Que vas-tu penser? Mais si tu vas travailler chez Elisabeth, tu vivras sous les combles de la maison de chambres. Je ne pourrai plus te visiter. Si tu avais un chez-toi...
    La nature de leur relation méritait un minimum d’intimité et de discrétion.
    — Tu le sais bien, je ne connais rien d’autre que le travail domestique. Cela signifie vivre chez son employeur.
    « Elle ne paraît pas vraiment désireuse de créer un nid d’amour», sentit-il. Depuis la migration vers Saint-Michel-de-Bellechasse en juin dernier, aucun rapprochement physique n’avait eu lieu. La surcharge de travail, la tension inhérente à sa relation avec Eugénie lui paraissaient des motifs suffisants de se dérober. Peut-être cette explication était-elle trop simpliste. Il souhaita s’en assurer :
    — Les deux ne sont pas nécessairement incompatibles.
    Tu pourrais travailler chez Elisabeth toute la journée, et habiter un petit appartement à peu de distance. Le journal contient de nombreuses petites annonces offrant des logements en location.
    — ... Tu es gentil, mais ce n’est pas possible. Tu le sais bien en voyant mon travail ici, ce n’est jamais fini, depuis le feu à allumer dans la cuisinière le matin jusqu’au rangement en soirée. A toutes ces heures, il me faudrait ajouter le trajet deux fois par jour jusqu’à ce logement, la préparation de mes repas...
    « En plus de la corvée de me recevoir pour me faire des gentillesses », songea le notaire.
    — Bref, en habitant chez ma patronne, je m’épargnerai quelques heures d’effort.
    — Tu as sans doute raison. Au fond, mes motifs de te louer un logis demeurent absolument égoïstes.
    Elle ne saisit pas l’occasion de le contredire. Ce soir-là, décida Fernand, il ne lui offrirait pas de passer par son lit avant de regagner sa chambre. De toute façon, les refus sans cesse répétés commençaient à lui peser.

    *****
    Le 13 septembre, imbu d’une toute nouvelle importance, Raymond Lavallée se dirigea vers le presbytère Saint-Roch pour sa seconde rencontre avec son directeur spirituel. Si la nouvelle avait fait sourciller au Petit Séminaire, car l’homme n’avait aucune expérience auprès des jeunes, personne ne s’était opposé à cette initiative.
    La religieuse l’accueillit comme un habitué, et l’escorta au bureau de son curé.
    — Vous prendrez quelque chose, monseigneur? demanda-telle avant de regagner sa cuisine.
    L’homme hésita avant de répondre par la négative.
    Déjà, son nouveau rôle lui pesait un peu. Le sujet placé à l’ordre du jour de cette rencontre ne l’autorisait pas à réclamer une nouvelle part de l’excellent gâteau servi au souper.
    — Comment s’est déroulée la semaine au Petit Séminaire ?
    demanda-t-il dès que la domestique se fut esquivée.
    — Très bien. Au début de l’année, les choses sont toujours un peu lentes à se mettre en place. Puis nous avons une retraite fermée la semaine prochaine. Nous nous mettrons définitivement à l’ouvrage ensuite.
    — Tu es en Belles-Lettres. Je suppose que la retraite portera en particulier sur la vocation sacerdotale.
    L’écolier acquiesça d’un mouvement de la tête. Ceux qui commençaient la cinquième année du cours classique deviendraient vraisemblablement des «professionnels». Il convenait de leur permettre de réfléchir à leur avenir dans une atmosphère recueillie, tout en soulignant à gros traits la plus noble des professions.
    — Tu écouteras tes maîtres avec la plus

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