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Thalie et les âmes d'élite

Thalie et les âmes d'élite

Titel: Thalie et les âmes d'élite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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s’acquiert. »
    Au
    fond,
    parmi
    tous
    les
    traits
    de
    personnalité
    évoqués, seule la pureté le laissait tenaillé d’inquiétude...
    Heureusement, aucun de ces dignes ecclésiastiques n’évoqua la diète sévère comme une exigence absolue. Dans le cas contraire, cela lui aurait fait deux bons motifs d’invoquer le secours de la Vierge Marie.
    A la fin de l’exercice, le garçon entendait joindre sans tarder la congrégation de la Sainte Vierge. La décision appartiendrait bien sûr aux professeurs de l’établissement, mais il ne doutait pas une seconde d’y être reçu à grands renforts de cantiques. Par la suite, il compterait sur sa «mère des cieux» pour le guider sur le chemin de la vertu.
    De retour à la maison, penché sur son journal, la dernière de ses
    inscriptions
    suscita
    une
    longue
    réflexion
    :
    «Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi, dit Jésus-Christ, n’est pas digne de moi. »
    Raymond voulait à tout prix être digne de Jésus. Il contempla longtemps le corps nu en bronze accroché à la croix pendue au mur. Il chercha un passage précis dans les premières pages de son cahier, écrites à la mort du cardinal Bégin : « Dans mon cœur, la première place doit être à ma mère, qui m’a comblé de tant de soins jusqu’à aujourd’hui.
    C’est à elle que je dois tout ce que je possède de piété, de vertu. C’est grâce à elle que je me suis conservé en état de grâce. C’est grâce à ses prières, à ses sacrifices que le péché s’est écarté de moi et que Dieu m’a rempli de ses grâces... »
    Cette femme devait l’offrir à son Créateur, lui permettre de se faire père blanc et de consacrer sa vie à sauver les Nègres du paganisme... Mais le chemin de la sainteté se révélait long et difficile. Au moment où Raymond allait se coucher, Chariot montra ses cornes.
    Si le prix de la scolarité demeurait somme toute modeste dans les séminaires et les collèges, cela tenait au fait que de nombreux étudiants en théologie payaient leur formation en donnant des cours aux écoliers. Pour eux, ces années représentaient une première forme du travail pastoral. Pour les élèves, cet usage participait aussi à leur édification. Ces jeunes gens voyaient leurs professeurs marcher vers le sacerdoce.
    — Je n’ai pas le choix, expliquait Raymond en ajustant sa cravate. Tous les élèves de la classe de Belles-Lettres doivent assister à la cérémonie en groupe.
    — Bien sûr, mon grand. Dépêche-toi, si tu veux arriver à temps.
    Onézime le regardait à la dérobée. Depuis le début des rencontres hebdomadaires avec monseigneur Buteau, le pauvre homme n’osait plus le reprendre sur aucun sujet. Ce garçon appartenait à l’Eglise, il devait en convenir maintenant, même si l’Eglise n’investissait pas un sou dans sa formation.
    Le garçon s’esquiva sans un mot de plus. Au coin de la rue de la Couronne, il sauta dans un tramway. Il arriva à la basilique Notre-Dame largement avant dix heures, assez tôt pour atteindre discrètement la place réservée à sa classe, dans le jubé. De ce perchoir, les jeunes gens auraient une vue imprenable sur toute la cérémonie.
    Planté à côté de l’orgue, Raymond regarda ses camarades déjà assemblés, reconnut de dos la haute silhouette et la chevelure blonde de Jacques Létourneau. En se glissant près de lui, il formula une curieuse salutation.
    — Quand serai-je enfin digne de compter parmi les privilégiés du Seigneur ?
    — Comment se fait-il que j’aie tout de suite deviné que c’était toi ? grommela l’autre.
    La voix trahissait une certaine lassitude. Raymond profitait de chacune des occasions pour s’asseoir près de lui, amorcer une conversation. Si, au début, Jacques pouvait expliquer cette attitude par la similarité de leur expérience, deux élèves externes venus de la Basse-Ville, à la longue, des motifs moins nets s’imposaient à lui. Cela tenait en partie aux remarques amusées de ses camarades sur son «ami».
    — Es-tu arrivé depuis longtemps ? demanda Lavallée.
    — Quelques minutes avant toi.
    — Je suis heureux pour l’abbé Renaud. Ce doit être le plus beau jour de sa vie.
    L’affirmation ne méritait pas d’autre commentaire.
    — Les personnes à l’avant, dans l’allée centrale, continua-t-il, doivent être ses parents.
    Un homme et une femme habillés pour aller à la noce se tenaient dans le banc juste derrière celui des

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