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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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grevé nos finances pour
équiper cette armée placée à votre service. Aussi Maréchal, si cette audience a
pour objet de demander encore plus de soldats, d’armement ou d’argent, vous
pouvez d’ores et déjà la considérer comme close, et repartir d’où vous êtes
venu.
    Je n’avais pas encore articulé le moindre mot, ce qui ne
l’empêcha pas de se lever, déployant sa taille sous le dais de son trône, et de
m’écraser d’un rude regard de dédain, en serrant contre elle son garçon d’un
air protecteur, comme pour m’empêcher de le lui arracher au cas où je voudrais
l’emmener à la guerre. Aussi décidai-je de ne rien lui dire de la vérité. Il
était patent qu’un exposé de la situation et un appel au bon sens ne
suffiraient jamais à convaincre la reine Giso de revenir sur cette mésalliance.
Une telle femme était bien incapable de reconnaître qu’elle avait commis une
erreur, et encore moins d’envisager de la corriger, dussent sa vanité et son
entêtement coûter la vie à son royal mari et à tous les soldats sous ses
ordres. Je me contentai donc de déclarer, onctueux :
    — Votre Royale Majesté, je ne prétendais à aucune
requête de nature matérielle. Mon unique dessein était de venir vous présenter
les chaleureux remerciements de Théodoric pour l’appui que vous avez bien voulu
nous prêter. Théodoric est convaincu que grâce à l’appui des Ruges, il
parviendra à se faire reconnaître comme souverain incontesté des Ostrogoths et
de tous leurs domaines. Vous serez alors, n’en doutez pas, amplement
récompensés de votre soutien, et tout l’honneur en rejaillira sur votre
famille, désormais reconnue comme la seule lignée amale habilitée à régner sans
partage.
    Ces paroles eurent le don – et c’était bien leur
but – de la réchauffer quelque peu et elles amenèrent sur ses lèvres
l’esquisse d’un sourire largement meublé de dents. Je poursuivis donc :
    — Dans l’attente de l’heureuse issue de cette guerre,
Théodoric souhaite que le monde soit gratifié de l’histoire de votre auguste
lignée amale, des temps les plus reculés jusqu’à l’époque actuelle. Il tient à
faire en sorte que sa famille et la vôtre soient admirées comme elles le
méritent, que ses origines soient honorées, et ses vertus universellement
louées. Dans cet espoir, il m’a délégué auprès de vous pour compiler cette histoire.
    — Une mission des plus dignes, approuva-t-elle. (Son
sourire s’élargit cette fois aux gencives supportant les dents.) Elle a toute
notre approbation.
    — En ce cas, Votre Majesté, ma seconde requête sera de
bien vouloir me faciliter l’accès à cette côte et à son histoire, car on
raconte que c’est là que les Goths ont accosté quand pour la première fois ils
sont arrivés du Nord par la mer et qu’ils ont abordé ce continent qu’est
l’Europe.
    —  Ja, c’est ce qu’on dit, en effet. Et je vous
accorde ma permission, bien sûr, Saio Thorn. Puis-je vous aider en
quelque manière ? En vous fournissant par exemple un guide réputé pour son
savoir ?
    — Ce serait infiniment aimable, Majesté. Et je pensais
que justement… pour être certain que la branche amale soit dignement, amplement
et très éminemment représentée dans cette histoire, votre jeune fils le prince
Frido pourrait me servir de guide et d’informateur.
    L’expression peinte sur les traits du jeune garçon, de
sinistre, passa à un bonheur teinté d’espoir, qui s’évanouit lorsque sa mère
répliqua, dans un petit soupir de mépris :
    —  Vái ! Ce gosse en sait plus sur les
antécédents ruges de son père que sur ses propres origines gothes.
    — J’en déduis donc, Votre Auguste Majesté, que cet
enfant parle le ruge germanique, un dialecte de la Vieille Langue que je
maîtrise assez mal.
    —  Ja waíla, fit-elle en riant toutes dents
dehors tel un cheval hennissant. Il parle même le slovène de ces brutes de
Kachoubes, mieux qu’eux si ça se trouve !
    — Eh bien voilà… Il me serait en cette contrée d’une
immense utilité, en tant qu’interprète.
    Le jeune prince semblait gêné qu’on ne parlât de lui qu’à la
troisième personne. Je m’adressai donc directement à lui :
    — Me feriez-vous l’honneur de me rendre ce service,
prince Frido ?
    Non sans avoir préalablement quêté du regard l’approbation
accordée à contrecœur par sa mère, il répondit, timidement mais en manifestant
son

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