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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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Mais
peu de temps auparavant, ayant eu connaissance des domaines considérables que
s’étaient taillés, au sud, les Wisigoths en Aquitaine, les Suèves en Lusitanie
et leurs propres cousins les Vandales en Libye, ils avaient été pris du démon
de l’ambition et de la compétition.
    — Ils se sont donc mis en marche, compléta le capitaine
de la barge, pour voir ce qu’ils pourront à leur tour conquérir vers le sud.
    Je savais, moi, que leurs desseins n’étaient pas aussi
vagues. Ils étaient partis aider Strabo à s’emparer de la Mésie, celui-ci en
ayant vraisemblablement promis un morceau à Feva. D’après ce que me décrivit
l’équipage concernant les munitions et les vivres déposés le long des berges,
j’en déduisis que l’armée ruge devait être assez conséquente, de l’ordre de
huit mille hommes, en comptant les fantassins et les cavaliers. Et quand le capitaine
m’eut précisé que Giso, la femme de Feva, était une Ostrogothe de la lignée des
Amales, j’en vins à échafauder une nouvelle hypothèse.
    J’avais toujours trouvé étrange que Strabo, à la recherche
d’alliés pour faire la guerre, n’ait pas sollicité de peuples plus proches,
plus directement à sa portée. Il me semblait à présent en comprendre la raison.
La reine Giso devait appartenir à la même branche des Amales que lui. Ses
émissaires, arguant de cette parenté, avaient dû lui demander d’influencer son
royal époux afin qu’il se joigne au soulèvement projeté par Strabo. Je me
doutais que dans le même temps, ce dernier avait sciemment menti par omission à
sa parente. Elle et son mari, de par leur éloignement de la Mésie, ignoraient
probablement que Théodoric l’Amale était désormais le maître en titre,
universellement reconnu, de cette province. Ils ne devaient même pas soupçonner
que l’importun venu les solliciter, Strabo, n’était plus qu’un proscrit, un
désespéré prétendant au trône, impotent de surcroît. Pour parvenir à gagner la
confiance et rallier la sympathie de la reine Giso à sa cause, et réussir à
mettre l’armée de Feva tout entière à son service, Strabo avait dû
grossièrement travestir la vérité dans sa présentation de l’affaire.
    Il allait m’appartenir de rectifier un peu tout cela.
     
    *
     
    Comme le Danuvius, la Viswa se divise en un delta composé de
bras multiples à l’approche de son embouchure. L’endroit, avec ses dunes et ses
plages, aurait été agréable s’il n’avait pas frissonné sous le souffle continu
et glacé du vent du nord. Le capitaine mena sa barge sur le bras principal et
nous arrivâmes bientôt dans la capitale des Ruges, nommée Pomore [51] ,
située à l’endroit même où la rivière débouche dans le golfe Wende, dans
l’Océan Sarmate. Pomore veut d’ailleurs dire, en dialecte local, « au bord
de la mer ».
    Plutôt étirée le long du fleuve que sur le littoral, la
ville était bordée de quais surplombant ces deux étendues d’eau clapoteuses,
grises et froides. Tous les bâtiments édifiés en bordure de l’eau étaient
solidement construits en pierre, afin de résister aux assauts perpétuels des
embruns et du sable projetés par le vent. Si tout cela contribuait à donner à
la ville un certain cachet d’élégance, elle ressemblait néanmoins à une sévère
forteresse. Notre barge accosta sur l’un des docks de la berge du fleuve, ceux
du front de mer étant, aux dires du capitaine, réservés aux bateaux des
pêcheurs et aux cargos de haute mer.
    Avant de débarquer Velox, je fis une pause pour lui
demander :
    — Quand redescendez-vous dans le sud ? Il se
pourrait qu’une fois mes affaires terminées ici, j’aie besoin de repartir dans
cette direction.
    — Pas avant la fin de l’hiver, de toute façon. La Viswa
ne va pas tarder à geler, et elle demeurera prise dans les glaces durant trois
mois au moins. Aucun bateau ne la remontera avant le printemps.
    Mon épais manteau de fourrure ne m’empêcha pas de frissonner
rien qu’à l’idée d’être contraint d’hiverner sur une côte aussi peu attrayante.
    —  Guth wiljis, grognai-je, je serai déjà loin
quand viendra le printemps. Ah, ça, mais quelles sont donc ces deux mouches du
coche qui semblent en avoir après moi ?
    Personne sur le quai n’avait semblé se soucier de l’arrivée de
notre barge, excepté ces deux hommes en armes – trop vieux et
ventripotents pour être des soldats –, qui montèrent

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