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Théodoric le Grand

Théodoric le Grand

Titel: Théodoric le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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au
sein de la dynastie, avait persuadé son mari de supprimer son premier fils, le
prince héritier Segeric. Nul ne saura jamais si ce Sigismond, en se rendant
coupable d’un crime aussi horrible que l’infanticide, avait franchi les ultimes
limites de l’infatuation de lui-même, s’était montré le roi le plus faible de
l’histoire se laissant à ce point mener par le bout du nez, ou était devenu
purement et simplement fou à lier. Toujours est-il que si, informé des trous de
mémoire de Théodoric, il avait misé dessus pour espérer s’absoudre de cet acte
atroce, et s’il avait escompté que les Goths laisseraient pareille insulte
impunie, il s’était lourdement trompé.
    Théodoric réunit tous ses conseillers autour de lui et dans
cette rage fulminante qui l’animait alors, nous perçûmes à nouveau l’homme que
nous avions connu. Ses yeux étincelants tels des feux de Saint-Elme avaient
perdu leur terne teint d’ardoise et leur bleu était illuminé d’une sainte
colère. Sa barbe, loin de pendre mollement, s’était hérissée telle une
menaçante touffe d’orties. Lorsque Boèce lui conseilla de différer toute action
de vengeance « le temps que Sa Majesté se remette de son émotion
première », Théodoric rugit : « C’est la réaction d’un vil
commerçant, si ce n’est celle d’un traître ! » et Boèce s’esquiva
prudemment hors de sa vue. Quand l’ exceptor Cassiodore recommanda à son tour
de morigéner les Burgondes d’une rude missive, le roi hurla d’une voix de
tonnerre :
    — Quoi ? De simples mots ? Que ces mots
soient damnés dans l’infernale Géhenne ! Faites venir le général
Thulwin !
    Il aurait, je pense, volontiers conduit l’assaut lui-même,
mais il savait qu’il n’aurait plus la force de galoper au rythme voulu, or il
souhaitait de la part de son armée une intervention immédiate. Sous la conduite
de Thulwin, c’est une troupe formidable et animée d’un instinct guerrier
implacable, bien qu’assemblée à la hâte, qui se rua vers l’ouest en quête de
vengeance.
    Mais la Fortune, à son étrange habitude, avait déjà puni cet
infanticide. Avant que Thulwin ne parvienne à Lugdunum, les Burgondes étaient
entrés en guerre contre les Francs et, lors d’une des premières batailles,
Sigismond avait été tué. Ayant lui-même supprimé sa propre descendance, il
avait sans le vouloir transmis la couronne à l’un de ses cousins, nommé
Gondemar. Ce dernier, appelé à faire face brusquement à la charge royale et aux
affres d’une guerre contre les Francs, ne tenait évidemment pas en sus à
croiser le fer avec une armée gothe, bousculant ses murailles de Lugdunum. Dans
un geste de soumission abject, il offrit donc à Théodoric de compenser la perte
de son petit-fils par la cession sans conditions de la partie méridionale des
terres burgondes, ce que le général Thulwin s’empressa d’accepter. C’est ainsi
que sans qu’aucun Goth ne l’ait payé de sa vie – hormis le pauvre prince
Segeric sans défense – le royaume des Goths fit un gain territorial
immense, ses frontières atteignant désormais, sur le flanc alpin, la rivière
Isara [147] .
    La gloire et la puissance de Théodoric s’étaient accrues, et
son domaine agrandi de façon inattendue, mais cela n’apaisa en rien sa douleur
d’avoir perdu successivement deux générations de sa propre famille. Le
paroxysme de sa rage une fois passé, il sombra dans un profond découragement,
qu’aggravèrent encore les événements qui suivirent. Car d’autres mauvaises nouvelles
arrivèrent de Carthage. Celles-ci infligèrent non seulement un nouveau
camouflet à la famille de Théodoric, mais allèrent jusqu’à menacer la stabilité
de son règne.
    Ce qui était arrivé était grave. Thrasamund, roi des
Vandales et époux d’Amalafrida, la sœur de Théodoric, venait de mourir. Celui
qui avait pris sa suite était un cousin du nom d’Hildéric. Comme j’ai déjà eu
l’occasion de le dire, les Vandales ont toujours été majoritairement des
ariens, et leurs monarques ne se sont jamais distingués par une exceptionnelle
tolérance envers le catholicisme, se posant plutôt en adversaires déterminés de
l’Église de Rome. Mais Hildéric faisait exception à cette règle et constituait
une singulière anomalie parmi les Vandales ; c’était en effet un catholique
dévot, presque fanatique. Sur son lit de mort pourtant, Thrasamund lui avait
arraché la

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