Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
mes peaux
de putois.
    Pendant un bon moment, nous contournâmes le lac Brigantinus
à une distance trop éloignée pour que je puisse l’apercevoir. Ce lac est
encerclé par une large voie romaine bien pavée, au trafic intense, hérissée de
forts, de garnisons, de petites bourgades et de villes florissantes. On y trouve
même une véritable cité, Constantia, gros carrefour de commerce situé au
confluent de plusieurs routes dont certaines vont jusqu’à Rome, par les passes
élevées des Alpis Graia et Poenina [63] . En raison
du trafic et de l’agitation régnant à proximité du Brigantinus, Wyrd et moi
devions en demeurer assez éloignés pour trouver nos proies, aussi
arpentions-nous la partie haute des cours d’eau coulant vers l’ouest du lac. À
deux reprises – une fois d’une flèche, l’autre avec sa hache de combat
lancée depuis son cheval au galop – Wyrd tua un sanglier venu se vautrer
dans la boue des berges. La peau de cet animal, aux poils drus et de longueur
inégale, n’a pas de valeur en tant que fourrure, mais sa chair est savoureuse.
    La seule partie consommable du castor étant sa queue,
j’avoue que je me sentais parfois quelque peu coupable de participer au
massacre d’actifs et courageux animaux juste pour leur fourrure et leur
castoréum. Mais le plat qu’on en tirait était succulent, et un soir, alors que
nous en mangions, je me fis à voix haute la remarque suivante :
    — Je me demande pourquoi je suis plus bouleversé par la
mort d’un animal sauvage que par celle d’un être humain.
    — Peut-être parce que ces créatures ne lancent point
d’appels serviles et n’implorent pas en se tordant les mains lorsqu’elles se
trouvent menacées par un chasseur, une maladie ou un dieu. Elles savent mourir
avec noblesse, sans crier d’effroi ni se plaindre.
    Après s’être sucé un moment les dents d’un air pensif, il
ajouta :
    — Les gens étaient comme ça, dans le temps. Les païens
et les Juifs le sont toujours. Ils ne cherchent pas particulièrement à
affronter la mort, mais la considèrent comme un moment naturel et inévitable.
Puis est venu le christianisme. Et pour obliger les gens à obéir aux
recommandations sans nombre du style : « tu ne feras ni ceci, ni cela
dans cette vie », la chrétienté a inventé quelque chose de plus terrible
que la mort. L’enfer.
    Il existe effectivement une créature pour laquelle j’ai
versé des larmes, et je ne me souvenais pas avoir pleuré de toute ma vie avant
cela. Depuis de longues semaines, mon juika-bloth, continuellement repu
des restes de notre fructueuse récolte de peaux, avait cessé d’aller chasser
les reptiles dans le seul but de se donner de l’exercice ou de conserver ses
réflexes. Lorsque, au bout d’un moment, l’oiseau sembla ne plus du tout partir
chasser, et ne plus voler qu’en de rares occasions, préférant demeurer perché
en état de semi-léthargie sur mon épaule, le troussequin de ma selle ou la
branche d’un arbre proche, je pensai d’abord qu’il était en train de sombrer
dans une confortable fainéantise. Mais il fit un jour une chose douteuse, qu’il
n’avait jamais faite auparavant. Alors que je chevauchais, il laissa choir une déjection
sur mon épaule, et je remarquai que celle-ci, au lieu d’être normalement
blanche mouchetée de noir, était d’un jaune verdâtre.
    Soudain soucieux, j’allais en parler à Wyrd. Il demanda à
examiner l’oiseau qui se laissa faire avec indolence et, après l’avoir inspecté
de près, secoua la tête d’un air résigné.
    — Ses yeux sont ternes, et la membrane des paupières
peine à s’ouvrir. La peau, autour de son bec, est sèche et pâle. Je crains
qu’il n’ait contracté l’une de ces mauvaises pestes porcines.
    — Une peste porcine ?! Mais c’est un aigle.
    — Un aigle, oui, mais qui a mangé les entrailles crues
d’un sanglier. Certains de ces animaux sont infestés de parasites qui peuvent
se transmettre aisément à d’autres prédateurs.
    — Une sorte de pou, alors ? Je peux peigner les
plumes de l’oiseau, et…
    —  Ne, gamin, répliqua tristement Wyrd. Ce
parasite est une sorte de ver qui te dévore de l’intérieur. Il est capable de
tuer un homme. Il tuera donc presque aussi sûrement cet oiseau. Je ne crois pas
que l’on puisse faire grand-chose, si ce n’est tenter de le nourrir d’un peu de
castoréum, comme stimulant.
    Il essaya donc cette solution, et le juika-bloth

Weitere Kostenlose Bücher