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Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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qu’il en est à mon sujet. Toutes
jeunes, elles sont mises en garde à mon égard par leurs parents. Nulle femme ne
risquerait de tomber enceinte de mes œuvres et de porter à son tour un enfant
affecté de ce mal. Même les garçons et les hommes m’évitent, car ils ont peur
que je les infecte. Il me faudrait partir très loin d’ici pour séduire une
femme qui ne serait pas au courant, et je ne puis abandonner ici ma mère
souffrante.
    — Allons, Gudinand, ne me la fais pas ! Il y a des
lupanars, par ici comme ailleurs. Cela ne te coûterait tout de même pas les
yeux de la…
    —  Ne. Même les prostituées m’ont refusé. Soit de
peur d’attraper le mal, soit de crainte qu’une crise se produise au milieu de
l’acte, et que je les blesse. Mon seul espoir est de rencontrer une fille
nouvelle dans la cité, et de la rendre amoureuse… enfin, consentante… avant que
des ragots ne viennent l’en dissuader. Mais les femmes qui voyagent sont rares.
Et je me vois mal en accoster une. Je suis depuis si longtemps habitué à la
solitude que j’ai du mal à trouver les mots. Je pense même que le fait d’avoir
fait ta connaissance n’était que le fruit d’un hasard heureux, suite à notre
bien fortuite rencontre.
    Je réfléchis un instant, et tandis que mes paupières
s’alourdissaient, une idée d’une audace inouïe me vint à l’esprit. Ce fut à mon
tour de rougir. Mais je me souvins m’être fait une promesse solennelle. Jamais
je ne me laisserais intimider par ce que le monde appelait la moralité. Et même
si cette idée m’avait été soufflée par mes désirs exacerbés, le plus rigoureux
donneur de leçons ne pourrait jamais nier qu’il s’agissait là d’une bonne
action, si cela pouvait libérer Gudinand de son affreuse affliction.
    Je me jetai donc froidement à l’eau.
    — Il se trouve justement, Gudinand, qu’il y a depuis
peu une nouvelle venue à Constantia, et que je peux t’arranger une rencontre
avec elle.
    Plein d’espoir, il balbutia :
    — Vraiment ? Tu… tu peux faire ça ?
    Mais sa face se rembrunit aussitôt.
    — Non, elle saura déjà tout avant que je puisse même…
    — Je lui dirai sans détour ce qu’il en est. Et tu
n’auras pas besoin de faire durer indéfiniment une cour assidue auprès d’elle.
Elle ne saurait de toute façon tomber amoureuse de toi. Elle a juré de ne plus
jamais s’attacher à quiconque. Mais elle sera ravie de coucher avec toi, autant
qu’il le faudra et jusqu’à ce que ta guérison soit complète.
    — Quoi ?! s’exclama Gudinand, éberlué. Mais
pourquoi, au nom du ciel, agirait-elle ainsi ?
    — Pour la raison très simple qu’elle ne craint pas de
tomber enceinte. Son medicus le lui a dit depuis longtemps : elle
est à jamais stérile. Et puis, elle le fera également pour me faire plaisir.
    — Pardon ? s’exclama de nouveau Gudinand,
maintenant littéralement sidéré. Mais pourquoi ?
    — Parce que je suis ton ami, et qu’elle est ma sœur. Ma
sœur jumelle.
    —  Liufs Guth ! cria Gudinand. Tu
prostituerais ta propre sœur ?
    —  Ne. Je n’en ai vraiment pas besoin. Je n’ai pas
cessé de faire ton éloge auprès d’elle cet été, et elle connaît par cœur toutes
tes qualités. Comme elle t’a aperçu quand tu me raccompagnais parfois à la
porte de notre logis, elle sait à quel point tu es bien fait de ta personne. Et
plus important peut-être, c’est une jeune fille au grand cœur, d’une vraie
gentillesse, qui accepterait sans hésiter de tout tenter pour soulager tes
souffrances.
    — Comment pourrait-elle m’avoir vu sans que je l’aie
vue moi-même ? Je ne savais même pas que tu avais une sœur. Comment
s’appelle-t-elle ?
    — Ah… euh… Juhiza, fis-je, attrapant le premier nom
féminin qui me passa par la tête, issu de ma conversation avec le caupo Dylas, à Basilea. Comme moi-même, Juhiza a été confiée à la garde de notre
tuteur Wyrd, le vieillard que tu as rencontré. Il est très strict avec elle.
Elle n’a pas eu le droit de sortir de notre logement jusqu’à ce que nous soyons
tous les trois prêts à repartir d’ici. C’est depuis sa fenêtre du deversorium qu’elle t’a aperçu. Cela dit, tant que Wyrd n’est pas en ville, je vais
désobéir à ses ordres et t’arranger une rencontre. Juhiza n’avouera pas cette
incartade à notre gardien, pas plus que moi, et je pense que tu n’auras aucun
intérêt à le faire, de ton côté.
    — Bien

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