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Thorn le prédateur

Thorn le prédateur

Titel: Thorn le prédateur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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inattendue, et
eus un nouveau sursaut de recul lorsqu’elle se pencha pour me susurrer à
l’oreille cette invite on ne peut plus explicite :
    — Nous n’avons même pas besoin de sortir de l’eau… Il suffit
d’aller là-bas, dans ce coin discret et un peu sombre…
    J’aurais été Thorn, j’avoue que j’aurais immédiatement
accepté. Mais étant Juhiza, je me contentai d’arborer un doux sourire rassasié
et lui dis :
    — Merci, chère Robeya, mais j’ai passé toute la soirée
dans une volupté sans limites, sous les caresses d’un amant à la virilité sans
pareille…
    Elle me laissa aussitôt comme si elle venait de se brûler,
jeta avec dépit un mot que je ne compris pas, sans doute un juron helvétique,
et battit des bras d’un air excédé en retraversant la piscine en entier. Je
continuai simplement à sourire, je souriais encore lorsque je me rhabillai et
quittai les thermes, je souriais toujours le long de mon trajet du retour vers
le deversorium, et je suis sûre que je dus sourire toute la nuit durant,
bercée du sommeil de la femme satisfaite.
     
    *
     
    Le matin suivant, j’avais retrouvé toute ma vitalité. Mes
membres ne tremblaient plus, débarrassés du sentimental souvenir des heures
d’émotion partagées avec Gudinand. Je suppose qu’apaisée par cet assouvissement
total de ses désirs de femme, ma partie féminine s’était pour un temps assoupie
dans une pacifique démission, laissant ma part masculine reprendre le contrôle.
Quand je revins au bosquet près du lac retrouver Gudinand après son labeur du
jour dans le bassin du fourrier, j’étais de nouveau capable de m’habiller en
Thorn, d’agir comme Thorn, de penser comme Thorn et d’être Thorn. Lorsque je le
saluai et le regardai, je me sentis tout à fait à l’aise, et nulle envie ou
pulsion féminine ne se manifesta. Il ne subsistait simplement entre nous,
désormais, que la franche camaraderie que j’avais ressentie dès que nous étions
devenus amis et compagnons de jeu.
    J’étais même tellement redevenu Thorn que je m’agaçai au
plus haut point d’entendre Gudinand s’extasier sans arrêt sur la fille
merveilleuse et les moments fabuleux qu’il avait connus la nuit précédente. Je
ne mentionne ces faits que pour donner une idée du nombre et de la disparité
des pensées avec lesquelles le jeune mannamavi que j’étais devait
apprendre à composer. J’aurais pourtant dû me sentir flatté par les compliments
et applaudissements de Gudinand à l’égard de mon autre moi-même, Juhiza. Mais
je suppose que tout garçon ordinaire – ce que j’étais à cet instant –,
qui entend un de ses camarades pousser des cris de triomphe et parader comme un
coq suite à une aventure amoureuse, sans pouvoir de son côté répliquer par une
histoire aussi fanfaronne, ressent une pointe de jalousie par rapport à la
supériorité de l’autre à cet égard. Et de fait, Gudinand n’arrêtait pas de
déclamer :
    —  Liufs Guth, ami Thorn, ta sœur est
extraordinaire ! Par sa beauté, sa gentillesse, son courage, ses talents,
ses… euh…
    Oui, bon, il restait évidemment un peu évasif dès qu’il
s’agissait de rentrer dans les détails, mais je les connaissais évidemment
tous. Aussi, parmi les nombreux sentiments contradictoires il en était un qui,
pour être normal, n’en restait pas moins assez irrationnel. J’en voulais
effectivement à mon ami Gudinand d’avoir pris tant de plaisir avec moi… mais
sans moi, si tout cela peut avoir un sens pour vous. Je me dis alors :
« Arrête ! Tu vas finir par devenir fou ! » et tentai de
mettre un terme aux effusions de Gudinand :
    — Je sais que Juhiza est une jeune fille fort aimable,
et je suis sûr que sa compagnie t’a été agréable. Mais il y a plus important,
dans cette affaire. Penses-tu que ses… euh, attentions, ont pu soulager le mal
dont tu souffres ?
    Il haussa les épaules d’un air perplexe.
    — Comment pourrais-je le savoir ? Il faut juste
attendre de voir si une autre crise se présente. C’est la seule manière d’en
être sûr ! (Il me sourit à demi.) Entre nous, je pourrais être éperdu de
reconnaissance d’avoir été la proie d’un tel mal, sachant le mémorable remède
qu’il m’a valu… Si tu savais, mon vieux… Guth soit loué, je sais que je
ne devrais même pas penser une chose pareille… mais j’en viens presque à
souhaiter que cette première séance de soins n’ait pas été

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