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Titus

Titus

Titel: Titus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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tant d’innocents. Les rues et les ravins de Jérusalem, la terre de Galilée et de Judée avaient été gorgés de sang. L’immortalité de l’âme et la résurrection permettaient seules de croire que les hommes n’étaient pas pires que les hyènes, qu’ils n’étaient pas voués pour l’éternité à planter des clous dans les paumes des suppliciés, ou à souffrir sur la croix, ou, pis encore, à dévorer leurs enfants afin de ne pas mourir de faim.
    Mais mes phrases se perdaient dans le silence que m’opposait Léda. Et ma voix, que l’émotion avait fait trembler, se laissait emporter par la colère.
     
    Je voulais que Léda me répondît. Je la secouais, la poussais sur le lit. J’appuyais mon avant-bras sur sa gorge pour qu’elle étouffât et j’espérais ainsi la contraindre à ouvrir la bouche, à crier, à me supplier de l’épargner.
    J’aurais ainsi entendu au moins le son de sa voix.
    Mais je savais qu’elle ne céderait pas.
    Alors je la traitais à nouveau comme une esclave, une captive. J’empoignais son corps inerte. Je voulais briser son mutisme. J’abusais d’elle, puis j’appelais Télos, un esclave que j’avais chargé de la servir et de la surveiller. Il me répondait d’elle sur sa vie.
    J’étais redevenu un chevalier romain.
    Je quittais la demeure où j’avais connu, auprès de Sénèque, les jours intenses de l’amitié et les douceurs de la sagesse. Je retrouvais Rome et ses Romains.
     
    Je rencontrais Flavius Josèphe que l’ambition changeait.
    Il se rendait chaque jour au Palatin. Il vantait les mérites de Vespasien. L’empereur avait décidé d’élever un temple à la paix à l’extrémité des forums impériaux. Des milliers d’esclaves, dont un bon nombre étaient juifs, travaillaient déjà à sa construction.
    — Ce sera le plus beau, le plus noble de tous les monuments humains, commentait Josèphe.
    L’empereur comptait y rassembler tous les chefs-d’œuvre de la peinture et de la sculpture universelles afin que les hommes qui voulaient les admirer n’eussent plus à parcourir les provinces de l’Empire, la Grèce, l’Asie, l’Égypte. Ce temple de Rome serait l’arche de toutes les créations du genre humain. On y suspendrait les vases d’or du Temple de Jérusalem.
    J’écoutais et observais Flavius Josèphe.
    Qu’était devenu l’homme qui, citant les prophètes de sa religion, m’avait persuadé qu’un jour le peuple juif rebâtirait le Temple ?
    Josèphe semblait avoir oublié sa terre. Il était heureux que Vespasien eût choisi de faire déposer dans son palais les voiles pourpres du Sanctuaire juif et les rouleaux de la Torah.
    — Ici est le cœur du genre humain, me répétait-il. Dieu l’a voulu, Dieu l’a choisi.
    J’accompagnais Josèphe jusqu’au palais qu’habitait, près du champ de Mars, la reine Bérénice.
    Elle y rendait la justice. Elle y accueillait son frère, le roi Agrippa, auquel Vespasien avait attribué la charge de préteur. Tibère Alexandre y venait lui aussi souvent : Vespasien l’avait nommé tribun et avait fait dresser la statue de l’ancien préfet d’Égypte sur le Forum.
    Ces Juifs étaient les invités quasi quotidiens de Vespasien et de Titus.
    Je songeais à Léda Ben Zacchari, ma captive, à Simon Bar Gioras, décapité.
    J’écoutais avec effroi le récit des combats que les légions du légat Lucilius Bassus continuaient de livrer en Judée contre des zélotes et des sicaires qui résistaient encore dans les villes d’Hébron, d’Hérodion, de Macheronte, et qui occupaient la forteresse de Massada.
    Jamais je n’ai entendu la reine Bérénice, son frère le roi Agrippa, Tibère Alexandre ou Flavius Alexandre évoquer les souffrances de ces derniers combattants juifs.
     
    Je ne quittais pas Bérénice des yeux tant sa beauté sereine était fascinante.
    Elle jouait avec ses nombreuses bagues, ses bracelets. Ses longs bras nus surgissaient de voiles bleus comme deux longs serpents dont les mouvements lents suggéraient la danse de corps lascifs.
    Parfois, au courrier qui arrivait de Judée et annonçait la chute d’Hérodion, puis celle de Macheronte, elle donnait l’un de ses bijoux, ou bien l’un de ses voiles, et le soldat encore couvert de poussière, qui avait chevauché depuis les ports d’Ostie ou de Puteoli, s’inclinait devant la reine juive comme l’eût fait un esclave.
    Il savait qu’à Rome Bérénice était admirée, que les femmes des magistrats, des

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