Toute l’histoire du monde
verrons : dès le IX e siècle, la civilisation renaîtra en Europe occidentale. Car il subsistait l’empire byzantin, qui conservait à Constantinople le trésor de la culture gréco-romaine. Il subsistait aussi, en Occident même, l’Église catholique.
Posons seulement une question : si le monde implosait aujourd’hui, qui le reconstruirait ? Où est notre empire byzantin ? où sont nos églises ? Qui conserverait, dans un possible écroulement, le savoir ? qui pourrait transmettre le flambeau à de nouveaux mondes ?
La civilisation est un miracle ; sa reconstruction, un plus grand miracle encore !
Les temps barbares, ces siècles d’anarchie et de massacres, sans écoles ni commerce, presque sans villes (Rome elle-même subsistait, mais ne comptait plus guère que 10 000 habitants, au lieu d’un million, et le Colisée y servait de carrière), ont été une époque épouvantable. Cela ne signifie pas que les hommes y aient toujours été malheureux : le bonheur individuel, celui de petits groupes (comme les Vikings), peut s’accommoder du malheur collectif. Mais ce dernier était grand.
Ce malheur aurait très bien pu ne jamais prendre fin. Encore une fois, soulignons que le progrès n’est pas quelque chose d’automatique.
Il y a une leçon à tirer de l’implosion de l’empire romain : quand une civilisation perd ses raisons d’exister, de combattre, d’avoir des enfants, de les éduquer, de leur transmettre, à eux ou aux immigrants, ses convictions et sa culture, elle peut s’écrouler comme un arbre mort, qui a encore belle apparence mais qu’une simple pichenette suffit à abattre.
Il y eut, au Moyen Âge, une ultime vague d’invasions venues des steppes : celles de Gengis Khan (ou Temudjin) et des Mongols. Gengis, païen nomade, réussit à unir les rapides et redoutables cavaliers de Sibérie, pour la durée de son règne (1115-1227) à partir de Karakorum en Mongolie. Son petit-fils s’installa sur le trône de Chine (où le voyageur vénitien Marco Polo le rencontrera). Mais les Mongols échouèrent devant l’Europe, alors sortie depuis longtemps de l’anarchie.
Ils étaient porteurs du dernier rêve des Barbares (avant l’invention de la poudre à canon). Gengis, à l’inverse de ses prédécesseurs – les chefs nomades germains ou slaves -, n’était pas fasciné par Rome. Il voulait transformer le monde en un immense terrain de chasse. Ce ne fut qu’un songe fulgurant. Son petit-fils Kubilay, devenu grand khan sur le trône de Pékin, se muera en empereur chinois. Quant au rêve de l’« empire des steppes », il se dissipa tout à fait lorsque les canons du tsar de Russie dispersèrent les cavaliers de la « Horde d’or » : avec l’artillerie, les sédentaires avaient définitivement vaincu les nomades !
Le temps de l’islam
Au nord de l’empire romain vivaient les Germains, les Slaves, les Huns et les Mongols ; sur la rive sud du monde méditerranéen se trouvaient seulement des tribus de Bédouins, en particulier les Arabes de la péninsule Arabique.
Du sud comme du nord, tous ces nomades étaient influencés par l’Empire. Ceux du nord contrôlaient la route des caravanes vers la Chine ; ceux du sud, la route commerciale maritime des Indes au Yémen, puis également caravanière de l’Hadramaout au limes.
Mais leurs invasions furent absolument différentes. Pourquoi ?
Les Barbares du nord ne pratiquaient que des religions « faibles ». S’ils contribuèrent au suicide de l’Empire, leur seule idée était de devenir romains (ou chinois à l’Est).
Les Arabes, eux, avaient une religion « forte ». (Les termes « faible » ou « fort » n’impliquant pas de jugement de valeur : par exemple, en physique nucléaire, on parle aussi d’attractions « faibles » ou « fortes ».) Ils ne voulurent pas devenir romains, mais créer un monde nouveau. Leur action fut donc beaucoup plus durable.
En 571 était né à La Mecque, ville caravanière, un homme qui devint entrepreneur de caravanes pour le compte d’une riche veuve, Khadidja.
Vers la quarantaine, cet homme, Mahomet, eut une crise mystique. Il ne supportait plus les idolâtries des gens de La Mecque. Dans ses voyages il avait connu des juifs et des chrétiens, et la religion de ses ancêtres ne lui convenait plus du tout. Il était devenu monothéiste. Il essaya en vain de convertir les habitants de l’oasis. Mal reçu, il prit la fuite avec une dizaine de
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