Toute l’histoire du monde
paroisses de France – qui en profitèrent pour envoyer au roi, procédure traditionnelle, des « cahiers de doléances ». Ils nous sont précieux pour connaître l’état de l’opinion en 1789. Elle était réformiste, mais restait monarchiste.
Les États généraux se réunirent le 17 juin 1789, en présence du roi, qui leur demandait seulement de voter de nouveaux impôts. Presque immédiatement, les choses tournèrent mal.
Le 9 juillet, les trois assemblées décidèrent de n’en plus former qu’une : l’« Assemblée constituante ». Louis XVI voulut renvoyer les représentants, mais ceux-ci n’obéirent pas. On connaît le mot de Mirabeau : « Nous sommes ici par la volonté du peuple et nous n’en sortirons que par la force des baïonnettes. » Le roi n’osa pas la force.
Louis XVI avait deux solutions. La première était la répression. La monarchie, forte de dizaines de régiments mercenaires (allemands, suisses), en était parfaitement capable. Un expert le souligna : « Le roi se fut montré à cheval, la Révolution n’aurait pas eu lieu », a dit Bonaparte.
L’autre solution était d’enfourcher le cheval révolutionnaire et d’en prendre les rênes pour transformer la monarchie absolue en monarchie constitutionnelle – ce qu’avaient fait les souverains anglais. Mais Louis XVI croyait trop sincèrement aux principes de l’Ancien Régime pour adopter ce comportement.
Donc il ne sut pas choisir. C’était un homme dépassé.
Le 14 juillet, une émeute parisienne s’emparait de la forteresse de la Bastille, presque vide de prisonniers et gardée par des suisses à la retraite. Événement militaire insignifiant, mais fortement symbolique. Louis XVI, ce jour-là, écrira sur son carnet personnel : « Rien à signaler. » Il est vrai qu’il parlait du gibier qu’il n’avait pas tué, car il était à la chasse pendant que l’émeute grondait dans le faubourg Saint-Antoine.
Pourtant, les députés de la Constituante voulaient seulement deux choses : des réformes raisonnables et la transformation, avec le consentement du roi, de la monarchie absolue en monarchie constitutionnelle, à l’image de la monarchie anglaise (avant d’être anti anglaise, la Révolution fut anglomane).
L’Assemblée constituante a été une grande assemblée, qui travailla beaucoup. Elle établit le système métrique (qui a fini par triompher partout dans le monde, même en Angleterre), cassa les vieilles provinces et divisa la France en départements. Elle proclama enfin la fameuse « Déclaration des droits de l’homme et du citoyen » le 26 août 1789 : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. »
« Droits de l’homme » qu’un féminisme mal compris nous fait appeler aujourd’hui « droits humains » comme si les Constituants, en parlant d’hommes, ne parlaient pas de l’humanité entière !
Chateaubriand nous a laissé des séances de la Constituante une description digne du meilleur journalisme :
« Les séances de l’Assemblée offraient un intérêt puissant. On se levait de bonne heure pour trouver place dans les tribunes encombrées. Les députés arrivaient en mangeant. Causant, gesticulant, ils se groupaient dans les diverses parties de la salle selon leurs opinions.
« Bientôt ce fracas était étouffé par un autre : des pétitionnaires, armés de piques, paraissaient à la barre : "Le peuple meurt de faim, disaient-ils. Il est temps de prendre des mesures contre les aristocrates et de s’élever à la hauteur des circonstances. " Le président assurait ces citoyens de son respect. Les séances du soir l’emportaient en scandale sur celles du matin : on parle mieux et plus hardiment à la lumière des lustres. La salle du Manège était alors une véritable salle de spectacle, où se jouait un des plus grands drames du monde.
« Les premiers personnages appartenaient encore à l’ancien ordre des choses ; leurs terribles remplaçants, cachés derrière eux, parlaient peu ou point. À la fin d’une discussion, je vis monter à la tribune un député d’un air commun, d’une figure grise et inanimée, régulièrement coiffé, proprement habillé comme le régisseur d’une bonne maison, ou comme un notaire soigneux de sa personne. Il fit un rapport long et ennuyeux ; on ne l’écouta pas ; je demandai son nom : c’était Robespierre.
« Les gens à souliers étaient prêts à sortir des salons, et déjà
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