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Tragédies Impériales

Tragédies Impériales

Titel: Tragédies Impériales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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petite princesse Elisa, fille du prince Antony-Henryk Radziwill, gouverneur de Posen. Or, le roi de Prusse, s’il adorait les commandements lancés à plein gosier, avait positivement horreur des chuchotements…
    Afin d’éclairer plus sûrement sa lanterne sur cette affaire, le roi, après mûres réflexions, décida de la confier à un homme qu’il avait en haute estime et tenait pour le plus fin psychologue de son royaume : le comte von Schilden, grand maître des cérémonies.
    — On parle un peu trop du prince Guillaume, ces temps-ci, lui dit-il. Je n’aime pas cela et je souhaiterais que vous vous livriez, mon cher comte, à une enquête discrète mais approfondie sur les sentiments que l’on prête à mon fils touchant la petite Radziwill. L’aime-t-il et, dans l'affirmative, jusqu’où les choses ont-elles été poussées ? Pas trop loin, j’espère, car il convient que le prince apprenne qu’un homme de son rang, même s’il n’est pas destiné au trône, ne se marie pas pour son plaisir, mais bien pour le bonheur de son pays. Alors ? Que savez-vous ?
    — L’opinion de la cour veut… que le prince soit réellement épris, Sire. Mais l’opinion de la cour n’est que…
    — L’opinion de la cour ! J’entends bien. Mais que pense-t-on ? De quel œil voit-on cette idylle, si idylle il y a ?
    Von Schilden fit toute une histoire de sortir son mouchoir et s’en éponger le nez, car cela lui donnait quelques secondes pour réfléchir. Encore, quand il se décida à répondre, fut-ce sur le mode prudent :
    — D’un œil que je qualifierais… d’assez attendri, Majesté ! La jeune princesse Élisa est tout à fait charmante. Elle est, en outre, de très grande famille, et Votre Majesté sait combien les gens d’ici sont sensibles aux histoires d’amour. La jeunesse du prince, sa tournure pleine d’élégance, son charme font que…
    — Il suffit, comte ! Je ne désire pas que vous me régaliez de je ne sais quel mauvais roman bâti par les commères du palais. Ce que je veux, c’est être fixé sur la chaleur exacte des sentiments de mon fils et surtout, surtout, savoir s’il a déjà parlé mariage à cette péronnelle. Allez et venez ensuite me faire un rapport détaillé !
    Le pauvre von Schilden sortit du cabinet royal assez encombré de sa mission. Comme tout le monde à Berlin, il avait remarqué le penchant visible que témoignait le second fils du roi à l’exquise Élisa et, comme tout le monde également, il avait trouvé que les choses semblaient aller pour le mieux dans le meilleur des mondes. La jeune fille était de vieille noblesse polonaise, de sang princier et sa famille était même alliée à la famille royale prussienne. Et comme le rang de second fils qu’occupait Guillaume ne l’obligeait pas impérativement à épouser une princesse royale, von Schilden estimait que ce mariage-là était souhaitable à tous points de vue. Mais sa conversation avec le roi remettait tout en question. Il y avait surtout ce mot désobligeant, cette épithète de « péronnelle » qui, appliquée par Frédéric-Guillaume III à la petite Radziwill, semblait indiquer qu’il ne la portait pas dans son cœur.
    En réalité, la psychologie tant vantée du grand maître des cérémonies se bornait à une connaissance approfondie de la cour, de ses composants, de ses us et coutumes et de sa minutieuse étiquette. Ne sachant comment se tirer de sa commission, il pensa que le plus direct serait le mieux et, sans plus tarder, s’en alla tout bonnement trouver l’intéressé pour lequel d’ailleurs il éprouvait, comme à peu près tout Berlin, une espèce de tendresse.
    À vingt-trois ans, Guillaume de Prusse était en vérité un fort beau garçon, très grand, bâti en athlète et pourvu d’épaules qui savaient à merveille porter l’uniforme. Ses cheveux blond clair couronnaient un front plus haut et plus intelligent que la moyenne. Ses yeux, d’un bleu candide, corrigeaient ce que son nez droit et ses lèvres serrées pouvaient avoir d’un peu sévère. Le teint était rose et frais, la main nerveuse, le pied élégant et, sous cet aspect général, le jeune Guillaume jouissait auprès des femmes d’une grande popularité.
    En le rejoignant dans le beau parc tracé jadis par Lenôtre, le fameux jardinier du roi français Louis XIV, von Schilden pensa, en soupirant intérieurement, qu’il était vraiment dommage de troubler le bonheur d’un garçon aussi

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