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Tragédies Impériales

Tragédies Impériales

Titel: Tragédies Impériales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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enfin réunis ?
    Les jours qui suivirent furent merveilleusement doux et beaux pour les deux jeunes gens. Bientôt on célébrerait à la fois l’adoption d’Élisa et les fiançailles. Pourtant, Guillaume s’impatientait. Les scribes chargés d’établir le fameux acte n’en finissaient pas.
    — Ces gens-là n’ont donc jamais aimé ! s’écriait-il, tandis qu’Élisa cherchait à le raisonner.
    — Qu’importe un peu de retard à présent, puisque plus rien ne peut nous séparer ?
    Rien ?… Si ! La politique ! Elle revêtit alors les traits sans grâce et le cœur ambitieux du grand-duc régnant de Saxe-Weimar, qui partit en campagne contre l’adoption, qu’il jugeait ridicule. Cela ne le regardait en rien, mais il était le père d’une fille, la princesse Augusta, qui désirait ardemment épouser  Guillaume, fl se hâta alors de faire à Frédéric-Guillaume III des offres si alléchantes qu’un triste soir, le malheureux prince reçut de son père une lettre aux termes de laquelle le roi refusait définitivement son consentement et ordonnait à son fils d’avoir « à considérer cette affaire comme classée… » En même temps, un ordre d’exil frappait Élisa, qui devait regagner Posen dans les plus brefs délais. C’était la fin…
    L’impitoyable rigueur du roi n’accorda même pas aux deux amoureux le douloureux bonheur d’une dernière entrevue. Élisa, le cœur déchiré, partit sans avoir revu celui auquel elle avait juré une éternelle fidélité…
    Guillaume, d’abord muré dans son désespoir, refusant de voir quiconque, vécut enfermé chez lui pendant des semaines, jusqu’à ce qu’un ordre formel l’envoyât rejoindre son régiment en Silésie. Ce fut le début d’une longue, d’une épuisante lutte contre son père, car lorsque Frédéric-Guillaume III lui proposa d’épouser la princesse de Saxe-Weimar, le jeune homme repoussa ce projet avec horreur. Mais contre la volonté d’un roi, il ne pouvait rien. Trois ans plus tard, Guillaume, « noyé de larmes et effondré de douleur », épousait la princesse Augusta et la nouvelle de ce mariage alla frapper un peu plus cruellement en Pologne Élisa, dont la santé n’était pas des meilleures.
    Trois années encore, celle qui était demeurée l’une des plus jolies femmes d’Europe s’éteignait comme une lampe qui n’a plus d’huile, heureuse d’en finir avec une vie qui avait perdu pour elle tout attrait, et fidèle pour l’éternité à l’amour de ses quinze ans…

Cent jours
pour l’empereur Frédéric III
    Cette nuit de mars 1888, glaciale et sinistre, semblait devoir durer jusqu’à la fin des temps. Elle pesait sur Berlin de tout le poids de ses ténèbres épaisses, de son froid noir, de sa neige boueuse et de l’angoisse des lendemains incertains.
    Aux portes du palais où le vieil empereur agonisait, les sentinelles semblaient figées dans leurs guérites. La ville était inerte, l’immense demeure aussi, car bien rares étaient les lumières qui y veillaient : quelques-unes, tout au plus, dans les corps de garde, le salon des aides de camp, celui des dames d’honneur. Tout le reste était obscur, et aucune lueur ne filtrait sous les épais rideaux qui enfermaient la chambre où se mourait le premier empereur d’Allemagne, le vieux Guillaume I er , qui, à quatre-vingt-onze ans, ne se résignait pas à quitter la terre.
    Étrange agonie en vérité, bavarde et shakespearienne ! Couché dans son lit, le vieil empereur n’arrêtait pas de parler, et cet incessant débit avait quelque chose d’hallucinant. Du fond des brumes où il s’enfonçait lentement, celui que l’on avait jadis surnommé « le prince Mitraille », au temps où régnait son frère aîné Frédéric-Guillaume, passait en revue toute sa vie, se la racontait à lui-même… à moins que ce ne fût à quelqu’un d’autre que seuls ses yeux pouvaient apercevoir, une jeune femme blonde, morte depuis longtemps, qui avait été son unique amour, qu’il n’avait jamais eu le droit d’épouser, et dont le portrait n’avait jamais quitté son chevet depuis des années : Élisa Radziwill, qui l’attendait peut-être au-delà du miroir.
    Ce qu’il racontait, c’était sa longue lutte, alors qu’il n’était que le roi de Prusse, contre la France, le pays qu’il avait toujours détesté. Cela avait commencé voici longtemps déjà, quand régnait Napoléon le Grand. Guillaume, alors prince de

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