Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
Florida Blanca ? Allons, lieutenant, un bon mouvement. Personne ne vous reprochera d’avoir ouvert votre frontière à la duchesse d’Albe. Je ne suis pas recherchée par l’Inquisition, moi… ni aucun des miens d’ailleurs. Je suis prête à en jurer.
    L’officier était visiblement au supplice. Il eût sans doute mille fois préféré subir l’estrapade plutôt que le feu indigné des yeux de cette femme dont il connaissait la puissance et qui pourrait, s’il lui en prenait fantaisie, briser sa carrière d’un claquement de doigts.
    — Excellence ! Excellence, je vous supplie de me pardonner. Je sais qu’auprès de Votre Seigneurie je ne suis rien. Je n’ai que mon honneur de soldat mais fussiez-vous la princesse royale elle-même que, sans le laissez-passer en question, je ne pourrais livrer passage…
    — Vous avez de ces comparaisons ! marmotta Cayetana furieuse. Mais ce n’est pas vous, j’imagine, qui commandez tout votre régiment. Vous avez bien quelque part un colonel, un général, que sais-je ? Allez me le chercher !
    — Je le voudrais mais c’est impossible : Don Garcia Morales, notre colonel, est parti ce matin pour Burgos, appelé par le Gouverneur… mais… il y a là-bas, à Fontarabie, en face du vieux château, une auberge acceptable, où j’ai déjà envoyé tout à l’heure la voiture de deux dames qui se trouvent dans la même situation. Votre Excellence pourrait s’y établir quelques jours, le temps d’envoyer l’un de ses courriers à Madrid pour ramener l’autorisation… ou à Burgos pour en ramener Don Garcia !
    Cachée par les plis des robes, la main de Gilles chercha celle de Cayetana, la serra vivement pour attirer son attention.
    — Ne vous entêtez pas, chuchota-t-il. Il faut céder. Allons à cette auberge et voyons ce qu’il est possible de faire.
    La duchesse poussa un soupir plein de lassitude.
    — Eh bien ! Je vois que je n’ai pas le choix ! Je vais suivre votre conseil, lieutenant. Et rassurez-vous, ajouta-t-elle en voyant le regard inquiet dont il l’enveloppait, je ne vous en veux en aucune façon. Vous faites votre devoir et vous le faites bien : c’est tout à votre honneur. À bientôt ! Pedro ! À Fontarabie ! fit-elle à l’adresse de son cocher.
    La lourde voiture fit demi-tour dans un nuage de poussière au moment précis où un autre véhicule débouchait à toute allure du dernier tournant. C’était, attelée d’une paire de chevaux fumants, une élégante « calesa », un cabriolet à deux roues dont le devant était fermé par un rideau de cuir et que menait un petit cocher aussi noir et remuant que l’enfer. Une « calesa » que les occupants de la berline ducale reconnurent avec désespoir.
    Raide d’indignation, Cayetana vit, après un bref échange de paroles et la production d’un papier, la ligne des soldats s’ouvrir devant le chevalier d’Ocariz qui franchit tranquillement la Bidassoa avant de s’élancer sans la moindre entrave sur la route de Paris.
    — Apparemment il possède, lui, le fameux laissez-passer ! Maria-Luisa me paiera cela avec le reste !
    Malgré une déception qui n’avait duré que le temps de prendre une nouvelle décision, Gilles se mit à rire.
    — Allons, ma chère, ne faites pas cette mine d’apocalypse !
    « Rien n’est perdu ! Votre Ocariz aura un peu d’avance sur moi mais je ne désespère pas de le rattraper… et même de le dépasser !
    — Vraiment ? Pensez-vous le rattraper en nous morfondant durant des jours derrière les vieilles murailles de Fontarabie qui donnèrent jadis tant de fil à retordre à mon aïeul le duc de Berwick 2  ?
    — Je verrai bien !…
    Un moment plus tard, la berline et son escorte de mules et de cavaliers franchissaient les antiques remparts du XV e siècle par la porte Santa-Maria, écussonnée d’anges vénérant l’image de Notre-Dame de Guadalupe, et n’eurent aucune peine à trouver la Fonda de los Reyes Católicos. Deux voitures, bien différentes, stationnaient devant : la lourde et confortable berline de voyage d’un seigneur dont les portières ensevelies sous une épaisse couche de poussière ne permettaient pas de lire les armoiries et une sorte de vaste diligence dételée, brancards en l’air, dont les rideaux de cuir relevés montraient l’intérieur misérable et désert. Mais, établi sur le siège, un « mayoral 3  » aussi crasseux que superbe sous ses culottes de mouton, sa courte veste

Weitere Kostenlose Bücher