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Un collier pour le diable

Un collier pour le diable

Titel: Un collier pour le diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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n’avait pas l’air de se cacher. Le pas était rapide mais décidé. C’était celui de quelqu’un qui allait quelque part et qui y allait vite. Mais Gilles n’eut pas le temps de s’avancer et, au contraire, se rejeta en arrière car, au détour d’un if illuminé, apparut l’énorme bulle blanche d’une robe surmontée d’une autre bulle neigeuse : celle de la gigantesque coiffure de la dame qui courait presque au long de l’allée, relevant à deux mains son immense jupe et découvrant le gracieux ballet de deux pieds charmants chaussés de soie claire.
    Pensant que cette jeune femme allait peut-être à un rendez-vous galant dans la partie non éclairée du parc, et ne voulant pas paraître indiscret, Gilles s’efforça au contraire de se dissimuler le plus possible derrière son arbre. Et la dame passa si près de lui qu’une bouffée de parfum frais vint jusqu’à ses narines avec le froissement léger de la soie.
    Mais, à ce moment précis, la promeneuse attardée passa dans la faible lumière déversée par l’un des fameux lampions couverts et Gilles, soudain cramponné à son arbre, dut faire appel à tout son sang-froid pour ne pas crier à la fois de surprise et de joie car, sous la haute coiffure poudrée ornée d’un fil de perles et d’une conquérante petite plume d’autruche blanche, il venait d’entrevoir le visage de Judith.
    Si maître de lui-même qu’il fût habituellement, le jeune homme crut que ses pieds quittaient la terre et qu’il allait prendre son vol vers les profondeurs bleues du ciel étoilé. Judith ici ! Judith à Trianon ! L’introuvable Judith que n’avaient pu dénicher ni les recherches du Prévôt de Paris ni les sbires du Lieutenant de Police, hantait tout simplement les ombrages royaux de Trianon avec autant de simplicité que, jadis, le Frêne familial, comme si c’eût été la chose du monde la plus naturelle et comme d’ailleurs lui en donnaient droit son nom et ses antiques quartiers de noblesse. Il n’y avait aucune raison pour que Mademoiselle de Saint-Mélaine ne fût pas admise aux honneurs de la Cour.
    Mais la gracieuse forme blanche n’avait pas attendu la fin des étonnements de Gilles et, toujours aussi rapide, s’enfonçait à présent dans les profondeurs d’une allée obscure, filant vers la lisière du parc et l’instant de bonheur de Gilles s’éteignit comme une chandelle sous l’éteignoir. Où donc allait-elle si vite ?
    L’idée première d’un rendez-vous d’amour lui revint, s’implanta, amenant avec elle l’inévitable crispation de jalousie. Oubliant superbement, avec la belle inconscience masculine, les femmes qui l’avaient aidé, en agitant son sang, à supporter l’absence, Gilles se retrouva uniquement et plus que jamais amoureux de Judith. Sa réaction fut instantanée : ôtant vivement ses souliers pour ne pas faire le moindre bruit et sacrifiant ainsi délibérément ses bas de soie, il s’élança sur les traces de la fugitive non sans accorder un regret à ses vieux mocassins de jadis.
    Ils coururent ainsi l’un derrière l’autre durant quelques instants, le jeune homme ne pouvant s’empêcher d’admirer avec une espèce de rage la solidité parfaite de l’absurde coiffure de la jeune fille qui supportait vaillamment la course sans abandonner autre chose qu’un léger nuage de poudre parfumée à l’iris.
    Arrivée en vue de l’une des grilles du parc, la belle coureuse obliqua brusquement puis s’enfonça dans un bosquet à une allure beaucoup plus réduite. Gilles suivit avec précaution jusqu’à ce qu’un bruit de voix proche l’arrêtât net. Apparemment on était arrivés.
    — Il me semble que vous avez beaucoup tardé, ma chère, disait une voix d’homme plutôt maussade. J’étais sur le point de m’en aller car il fait diantrement humide dans ces bois.
    — Mais aussi pourquoi Votre Altesse a-t-elle tenu à venir ici ? J’aurais aussi bien pu aller chez elle demain matin…
    — Vous savez parfaitement que vous ne devez plus y paraître en aucun cas. Mon épouse est stupide mais pas à ce point et je vous rappelle que je ne suis pas censé vous connaître. Quant à l’affaire de ce soir, je tenais à m’assurer moi-même de sa bonne marche. Aussi bien, je n’avais rien d’autre à faire puisque le Roi qui, à ce qu’il paraît, est mécontent de nous, n’a pas voulu que les princes soient de la fête de ce soir.
    — Le Roi… ou la Reine ?
    — Je

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