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Un espion à la chancellerie

Un espion à la chancellerie

Titel: Un espion à la chancellerie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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montra poli, mais circonspect, son long visage étroit ne trahissant que fatigue et anxiété. Tout en conversant, Corbett remarqua l’habit fort coûteux de son interlocuteur, les bottes de cuir souple, la cape de pure laine, les chausses, et le pourpoint au col rehaussé d’une vaporeuse dentelle de batiste. Waterton portait, en outre, une chaînette d’argent au cou et une bague d’améthyste au petit doigt de la main gauche. « Un vrai coureur de jupons », songea Corbett.
    — Vous vous intéressez à moi, Messire ? lui demanda soudain Waterton.
    — Vous êtes excellent clerc, lui répliqua Corbett, mais vous êtes si mystérieux : je sais très peu de choses sur vous !
    — Pourquoi en serait-il autrement ?
    Corbett haussa les épaules.
    — Nous sommes tous ensemble retenus ici et nous affrontons le même danger, mais cela, apparemment, ne vous empêche pas de vous promener dans Paris, même après le couvre-feu. Ce n’est pas prudent !
    Waterton prit un fin couteau, redoutablement aiguisé, et se mit à couper du vélin en suivant soigneusement la ligne tracée, avant de le frotter avec la pierre ponce jusqu’à ce que la surface brille comme de la soie pure. Il s’arrêta et fixa Corbett :
    — Qu’insinuez-vous ?
    — Rien. Je n’insinue rien, je m’étonnais seulement.
    Waterton pinça les lèvres d’agacement et reposa brusquement la pierre ponce.
    — Écoutez, Corbett, dit-il d’un ton cassant, ce sont mes affaires ! Vous m’observez comme une commère de village. Mon père était un marchand prospère, d’où ma relative aisance. Quant à ma mère, elle était française ; je parle donc parfaitement cette langue et n’ai pas peur de m’aventurer dans une ville française. Satisfait ?
    Corbett fit signe que oui.
    — Je suis désolé, répliqua-t-il sans éprouver le moindre remords. Je voulais simplement savoir !
    Waterton fronça les sourcils et se remit à frotter le parchemin. Ce que voyant, Corbett s’en alla, regrettant amèrement que leur conversation n’eût abouti à rien qu’à mettre Waterton sur ses gardes.
    Corbett ne fit pas part de ses soupçons à Lancastre qui l’évitait soigneusement depuis leur dernière rencontre et était, par ailleurs, fort occupé à préparer leur retour, dont il avait déjà fixé la date. Le comte n’avait pas oublié l’attaque sur la route de Beauvais et avait demandé des sauf-conduits et une escorte militaire renforcée pour gagner la côte. Philippe le Bel souleva quelques difficultés, déclarant que Lancastre ne semblait pas avoir confiance en lui, et ce dernier se vit entraîné dans d’autres négociations complexes. Ce ne furent pas les sous-entendus malveillants ni les persiflages de la cour de France qui améliorèrent son humeur !
    Corbett prenait son mal en patience. Les envoyés et les représentants français venaient régulièrement leur rendre visite, et, un jour, Corbett vit distinctement l’un d’eux tendre un parchemin à Waterton. Il fut tenté de mettre le clerc au défi de lui montrer ce que c’était, mais réalisa qu’il se serait couvert de ridicule si cela avait été anodin. Pourtant, le même soir, enveloppé dans une épaisse cape de soldat, épée et poignard à la ceinture, Corbett sortit sur les talons de Waterton. Il le suivit dans un véritable dédale de ruelles, de carrefours et de passages que bordait la masse des maisons plongées dans l’ombre. Corbett se déplaçait précautionneusement, se contentant de ne pas perdre sa proie de vue, au cas où il y aurait eu d’autres passants, protecteurs silencieux de ce clerc anglais amateur de promenades nocturnes.
    Enfin Waterton poussa la porte d’une taverne.
    Corbett resta à l’extérieur et observa l’entrée éclairée et les vantaux carrés. Il n’y avait personne dans les rues, à part quelques mendiants ivres et le guet qui faisait sa ronde avec force cliquetis d’armes et martèlement de bottes. Caché dans l’ombre, Corbett le regarda passer à la lumière de la torche grésillante portée par le sergent. Puis le silence retomba, oppressant, interrompu seulement par les chansons et les bruits étouffés en provenance de l’estaminet. Une bruine glacée se mit à tomber. Corbett sursauta : un gros chat avait silencieusement attrapé un rat surgi d’un tas d’immondices et s’enfuyait en emportant sa proie qui se débattait en couinant, piégée dans un étau mortel.
    Les maisons de l’autre côté de la

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