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Un espion à la chancellerie

Un espion à la chancellerie

Titel: Un espion à la chancellerie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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cette femme étrange et ravissante ; elle était d’humeur si changeante qu’elle le taquinait d’un air mutin et, la minute suivante, lui assenait un sermon sur la gloire passée du pays de Galles et les ravages causés par « son » roi d’Angleterre.
    Elle ne se faisait pas d’illusions quant à sa visite à Neath.
    — Mon oncle, Lord Morgan, confia-t-elle un jour, est un scélérat et un coquin, mais c’est aussi quelqu’un de dur et de juste qui hait le roi Édouard et se soulèverait volontiers si l’occasion s’en présentait. Mais, poursuivit-elle d’un ton sinistre, il paierait trop cher un échec. Il s’est rebellé déjà une fois et a obtenu le pardon du roi. La prochaine fois, il pourrait subir le même sort que notre grand prince David, le frère de Llewelyn.
    Corbett ne releva pas. Il craignait trop que Maeve ne provoquât une querelle en l’accusant ouvertement d’espionnage. Il se défiait également de Morgan qui pouvait fort bien s’offenser de voir un Anglais conter fleurette à sa nièce, mais, à sa grande surprise, le vieux gredin se contentait de lui donner de grandes claques dans le dos en riant. On aurait dit, en vint à penser Corbett, que Maeve était la seule personne redoutée par Lord Morgan.
    Quant à Owen, le capitaine de la garnison, c’était autre chose. Il souriait plus souvent, mais des envies de meurtre se lisaient dans ses yeux sombres chaque fois qu’ils se croisaient, et même Ranulf, plongé à présent dans la routine du château, suppliait son maître d’être plus prudent. Corbett tenait compte de ses conseils. Un jour, Maeve l’emmena dans la cour assister à l’entraînement des hommes d’Owen. Corbett avait l’habitude du spectacle haut en couleur des escouades de la cavalerie anglaise : arborant leurs blasons aux teintes vives par-dessus cottes de mailles ou hauberts, les chevaliers attaquaient et contre-attaquaient à l’épée, la masse et la lance émoussée, selon les règles des tournois et des joutes. Ici, c’était différent ; lorsque Owen l’aperçut en compagnie de Maeve sur l’escalier du donjon, il choisit l’un de ses hommes et organisa un simulacre de combat, autant pour impressionner Maeve que pour l’avertir, lui.
    Corbett ressentit des pincements de jalousie en voyant Maeve applaudir et pousser des cris d’admiration devant les prouesses d’Owen, mais même lui ne put s’empêcher d’acclamer le Gallois et de se jurer in petto de l’abattre du premier coup s’ils devaient se retrouver un jour face à face, car l’homme était un combattant-né. Owen et son adversaire s’affrontèrent à cheval, sur de petits chevaux gallois résistants et au pied sûr qui pivotaient et faisaient volte-face à la moindre pression des genoux ou des cuisses. Les deux hommes portaient des armures légères, de simples haubergeons de mailles, des jambières et des bottes de cuir bouilli, et des casques coniques à jugulaire et nasal. Ils avaient de petits boucliers ronds et, puisque ce n’était qu’un entraînement, des épées émoussées qui pouvaient pourtant infliger de graves blessures. Les deux combattants chargèrent en décrivant des cercles. L’habileté d’Owen à parer et à manoeuvrer coupait le souffle aux spectateurs, car cheval et cavalier semblaient ne faire qu’un. À maintes reprises, il passa sous la garde de son adversaire et, du plat de l’épée, frappa le ventre et la poitrine du malheureux.
    Owen finit par se lasser du jeu, rompit le combat et s’éloigna au petit trot ; l’autre alors chargea, épée en avant, les sabots de sa monture martelant le sol. Owen fit alors pivoter son cheval, mais n’eut pas le temps de le lancer au galop. Corbett pensa à ce moment, avec un brin de malice, qu’Owen avait péché par excès de confiance et qu’il se ferait facilement désarçonner. Les cavaliers furent face à face. Corbett vit Owen plonger sous l’épée brandie par son adversaire qui chargeait et arrêter sa monture jusqu’à lui faire presque toucher le sol de la croupe tandis que lui-même faisait tournoyer son épée pour en frapper le soldat sur la nuque et l’envoyer rouler dans la poussière, inanimé. Les spectateurs l’acclamèrent. Il ôta son casque et, l’épée levée, salua Maeve qui, les joues en feu, était à présent hors d’haleine. Quant à Corbett, il se contenta de lui jeter un coup d’oeil venimeux.
    Cela n’inquiéta pas outre mesure l’envoyé anglais. Ce qui le

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