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Un jour, je serai Roi

Un jour, je serai Roi

Titel: Un jour, je serai Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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bassin pendant les fêtes, ordonne-t-il à Le Vau.
    L’architecte s’incline et calcule. Le réservoir du bassin de la Sirène n’est pas assez grand pour produire l’effet d’un feu d’artifice aquatique au-delà du temps qu’y consacre Louis XIV. Il passe, on lance la machinerie. Il tourne le dos et tout s’arrête…
    — Oui, Sire, répond-il pourtant.
    À peine un mois pour agrandir le réservoir ! Il faudra creuser, maçonner, enfouir, relier l’ouvrage à une canalisation, enfin refermer. Il jette un œil vers le groupe d’hommes où travaille Le Faillon. Au moins, les bras ne manquent pas. À Paris, il convoquera Bergeron et lui demandera de réaliser un autre miracle. En échange de beaucoup d’argent, tout sera parfait. Il ne pourra en être autrement. Le Vau, Le Brun, Le Nôtre ne sont pas les seuls à se soucier. Molière a-t-il fini d’écrire sa pièce ? Le monarque ne veut pas, ne cherche pas à savoir, comme il ignore Le Faillon et les autres qui s’inclinent à son passage et ôtent leurs chapeaux, ces mêmes qui ne tourneront pas le dos tant que le souverain n’aura pas disparu. Puis ils replaceront leurs cheveux longs sous les galures, et reprendront la cadence jusqu’au soir.
    — Au boulot !
    Le contremaître jette l’ordre. Il est de très mauvaise humeur. Chaque visite provoque un supplément de travail. Il faudra s’y mettre jour et nuit, répartir les équipes, dispenser de la messe les volontaires du dimanche. L’Église ne protestera pas, c’est pour le roi. Le Faillon le cherche encore avant de donner le premier coup de rein. Mais le seigneur a déjà rejoint son château. Il est trop loin pour l’observer.
    Delaforge s’en charge. Depuis la terrasse, Son Altesse détaille ses jardins, sa création. Le Nôtre vient à ses côtés. Il est moins obséquieux, plus proche, et peut-être plus sincère que l’aréopage qui les entoure. Les deux savent ce qu’ils se doivent, la gloire de l’un ne va pas sans le génie de l’autre. Mais le maître reste le maître et Le Nôtre, malgré toute la science qui l’habite et lui souffle ce qu’il obtiendra, un jour, de ces jardins, écoute ce demi-dieu qui a l’audace de son rang et la passion de Versailles. Je veux , dit-il encore, et malgré l’immense talent du jardinier, c’est encore le roi qui domine.

    Depuis son échec du matin, Petit-Jean tend l’oreille. Il va et vient dans la maison et sa ténacité est récompensée. Ce roulement de tambour, c’est le carrosse tiré par ses quatre chevaux blancs. Il bondit dehors, juste à temps pour voir passer son héros.
    — Reviens ! hurle sa mère.
    Pour un peu, il se jetterait sous les roues.
    Son bonheur est déjà loin.
    Un jour, se dit-il, lui aussi, il bâtira pour Louis le Grand.

    — N’est-ce pas ce que je vous annonçais, il y a quelques mois, quand vous reveniez de Versailles ?
    Le Vau est très excité. Depuis le départ du roi, il se détend.
    — Qui dînait chez moi ? Aidez-moi, Toussaint…
    — Beaumont.
    Ils sont devant le château. Le Vau fait avancer son carrosse et s’engouffre dedans, tirant Delaforge par la manche.
    — Regrettez-vous de m’avoir accompagné ?
    Toussaint aurait mauvaise grâce à nier. Mais Le Vau n’écoute pas sa réponse. Sitôt assis, il saisit la plume et gribouille des notes.
    — Ne rien oublier, chuchote-t-il. Allons, prenons par le début.
    Il lève la tête, cherche, se tourne vers son passager :
    — Où étions-nous avant la Ménagerie ?
    — Nulle part…
    — Que voulez-vous dire ?
    — Dans le carrosse, si vous préférez.
    — C’est cela…
    — Puis nous avons vaqué dans les jardins. Le roi a trempé ses souliers… Mais avant nous avions regardé les chiens se battre.
    — En effet, marmonne l’architecte en grattant toujours.
    — Ensuite, vous vous êtes isolés, le roi et vous.
    — Tout à fait… Sur la terrasse qui domine le parc.
    — Un conclave à deux, le taquine Delaforge. Quelle mine vous preniez ! J’ai cru que le roi vous annonçait qu’il rédigeait contre vous une lettre de cachet. Je vous imaginais à la Bastille…
    — Ne plaisantez pas ! L’affaire est sérieuse…
    — Lui auriez-vous déplu ?
    Le Vau lève la plume et sourit :
    — Pas le moins du monde, mon ami.
    Sa mine redevient grave.
    — Du moins, pas encore. Mais sa demande est si formidable…
    — Rien de plus à dire ? insiste Delaforge, tanné par la curiosité.
    Le Vau se penche vers lui et baisse la voix :
    — Le

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