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Un jour, je serai Roi

Un jour, je serai Roi

Titel: Un jour, je serai Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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Berthe, la cuisinière, ou de sa sœur Aurore.
    — Excellent. Vous avez impressionné Le Vau.
    — Il faut croire qu’il en réclame peu car je n’ai prononcé que quelques mots, reconnaît-il, faisant preuve de lucidité. D’ailleurs, lui aussi… Et rien sur la sculpture antique.
    — Laissez-moi agir. Je m’engage à faire progresser votre cause.
    — Merci Toussaint. Mais il faut que je vous dise…
    Il s’arrête, hésite et se décide.
    — Vous n’avez pas bonne réputation chez mon père…
    — Eh bien ! Quelle nouvelle, s’exclame à merveille Delaforge. Et auriez-vous pris le risque de… dévoiler aux vôtres que vous me fréquentiez ?
    — Non, non ! Ce ne serait bon ni pour vous ni pour moi. Mais j’avoue que je ne comprends pas cet acharnement, car je vous vois ce soir et l’autre soir encore, et vous agissez toujours avec franchise et honnêteté. Aussi, ai-je décidé d’en parler afin de corriger l’opinion de…
    — N’en faites rien, l’interrompt le bonimenteur. Je sais pourquoi on me juge mal. Hélas, j’en ai eu la confirmation au couvent des Annonciades célestes, quand je m’y suis montré, ne cherchant que l’apaisement. Votre père semblait fort agacé… Ce climat regrettable remonte à mes seize ans. En sortant de Montcler, j’étais sauvage. Et je l’ai montré chez vous…
    — C’est en effet le souvenir que j’en garde.
    — Indompté, ombrageux, et je regrette les paroles que nous échangeâmes votre frère et moi.
    — Voilà qui est élégant, car il vous a blessé.
    — Tout était ma faute.
    — Votre esprit… chevaleresque me surprend. Vous semblez si différent de ce que j’ai entendu à votre sujet.
    — Oubliez tout cela. Parlons plutôt de cette conversation avec le premier architecte du roi.
    — Vous ne voulez pas savoir ce qu’on pense de vous ?
    — À quoi cela servirait-il puisque je ne suis plus celui dont vous dresseriez le portrait ? L’essentiel est ce qu’on fait aujourd’hui. Alors, j’insiste, revenons à votre entretien avec Le Vau.
    — Selon moi, ce fut court.
    — L’homme est ainsi. Pressé. Mais comptez sur moi pour qu’il ne vous oublie pas.
    — Comment vous remercier ?
    — Ne montrez plus cet air perdu. Il faut croire en vous !
    — Mon père et mon frère pensent que je suis dans l’erreur…
    — Parce que vous aimez la sculpture ? Nous leur prouverons le contraire ! Maintenant, allons nous amuser !
    Les voici devant Saint-Val, cherchant toujours un quatrième pour sa partie de bassette.
    — Antoine, seriez-vous tenté ? s’enquiert son cicérone.
    — Eh bien, il faut vous avouer que je ne connais rien au jeu…
    — Je vous aiderai ici aussi, murmure Delaforge. Soyez-en certain.
    1 - Selon l’abbé de Choisy (Mémoires) .

    2 - Plaisirs de l’Île enchantée . Fêtes phénoménales de 1664 dont il sera question.

    3 - La Méduse, l’une des Gorgones, était si laide que ceux qui la regardaient étaient aussitôt transformés en statue de pierre.

Chapitre 36
    R UE DE B EAUCE , dans le quartier du Marais, Sapho reçoit. Sapho est le surnom que s’est choisi Mademoiselle de Scudéry, animatrice hors pair du salon qu’elle tient le samedi, en son hôtel. Les précieuses se pressent à ce rendez-vous couru qui, en quelque sorte, a pris la suite du salon de Catherine de Vivonne, devenue marquise de Rambouillet, faiseuse de talents et de réputations en son temps. Chez Sapho , les dames dissertent sur les tourments du cœur, imaginent des sujets de roman, fredonnent des airs, aiment les tournois poétiques, et tout cela est vraiment charmant.
    Aujourd’hui, on y croise Madame de Sévigné, et Madame de La Fayette, de passage à Paris. Le débat du jour devrait être l’amour, vu sous l’angle suivant : ce noble sentiment est-il compatible avec le mariage ? La conversation sera enflammée et fournira une belle occasion de faire feu de tout bois, de briller et, sait-on jamais, d’être applaudi. Les camps se forment, resserrent les rangs. Les pour, d’un côté – ils défendent les liens sacrés du mariage – ; les contre, à l’opposé – s’unir revient à délaisser la passion. Ce sera plus amusant que l’autre soir où l’abbé d’Aubignac a contesté à Mademoiselle de Scudéry la création de la Carte du Tendre , cette vision géographique des méandres amoureux qui jalonnent toute vie 1 . Aubignac soutenait que cette œuvre était sienne. L’odieux sermon, l’ennuyeux débat. Est-on réunis pour

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