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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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tire bien ?
    — Je ne sais pas encore. Comment tu t’appelles ?
    — Caris, de la famille des Lainier. Et toi ?
    — Merthin. J’ai pour père sieur Gérald. » Sur ces
mots, il rabattit sa capuche et en extirpa une corde enroulée.
    « Pourquoi la gardes-tu à l’intérieur de ta
capuche ?
    — Pour qu’elle ne se mouille pas s’il pleut. C’est
l’habitude, chez les archers. » Il courba légèrement l’arc pour insérer la
corde dans les entailles aménagées aux deux extrémités de la portée. La tension
la maintiendrait en place.
    « Tu vas aller tirer sur les cibles ?
    — Oui.
    — On ne te laissera pas ! » intervint un
garçon.
    Merthin le dévisagea. Grand et mince, doté de grandes mains
et de grands pieds, il devait avoir une douzaine d’années. Merthin l’avait
aperçu la veille, à l’hospice du prieuré, tournicotant autour des moines en
leur posant mille questions. Il les avait d’ailleurs aidés à servir le dîner.
Il s’appelait Philémon. « Bien sûr que si ! répliqua-t-il. Pourquoi
m’en empêcherait-on ?
    — Parce que tu n’as pas l’âge.
    — C’est idiot », riposta Merthin, bien qu’il sache
pertinemment qu’avec les grandes personnes, on n’était jamais sûr de rien –
certaines étaient tellement bêtes !
    Irrité par la réplique et, surtout, par le ton docte et
supérieur qu’avait pris Philémon pour se faire valoir devant Caris, il les
planta là et s’avança vers un groupe d’hommes qui attendaient leur tour. Marc
le Tisserand, un colosse à la puissante carrure qu’il connaissait un peu, lui
demanda gentiment où il avait déniché son arc.
    « Je l’ai fabriqué moi-même, expliqua Merthin
fièrement.
    — Regardez, maître Elfric, le joli travail qu’il a
fait ! » lança Marc à son voisin.
    Ledit Elfric, tout en muscles, se contenta d’y jeter un bref
coup d’œil. Merthin lui trouva un regard sournois. « L’est trop petit,
laissa-t-il tomber avec mépris. La flèche qu’il tirera ne pénétrera jamais
l’armure d’un chevalier français.
    — C’est vrai, admit Marc, mais ce gamin a encore un ou
deux ans de bon avant d’aller se mesurer aux Français. »
    John, le sergent de ville, déclara : « On est
prêts ? Commençons ! À toi l’honneur, Tisserand ! » Le
géant se dirigea vers la ligne. S’étant emparé d’un arc solide, il le courba
sans effort plusieurs fois pour éprouver la résistance du bois.
    C’est alors que John remarqua la présence de Merthin.
« Pas d’enfant ici ! dit-il.
    — Pourquoi ? protesta Merthin.
    — T’occupe pas du pourquoi, contente-toi de quitter la
file. »
    Entendant des gamins rire sous cape, Merthin s’indigna.
« Il n’y a pas de raison !
    — Je n’ai pas de raison à donner aux enfants, répliqua John.
    Marc, choisis ta cible. »
    Merthin s’éloigna, mortifié que les faits donnent raison à
ce Philémon mielleux.
    « Qu’est-ce que je t’avais dit ? jubilait
celui-ci.
    — Oh, ferme-la et tire-toi !
    — Essaie un peu de me forcer à partir ! riposta
Philémon, qui mesurait bien six pouces de plus que lui.
    — Oh, ça ne sera pas bien difficile ! »
intervint Ralph.
    Merthin soupira. Son frère était d’une fidélité à toute
épreuve mais, en prenant sa défense, il le faisait passer pour un freluquet
doublé d’un imbécile.
    Philémon battit en retraite. « De toute manière, je
partais ! Je dois aller aider frère Godwyn. »
    Le spectacle étant achevé avant même d’avoir commencé, les
autres enfants commencèrent à se disperser. Caris dit à Merthin :
« Tu pourrais aller ailleurs l’essayer. » À l’évidence, elle était
curieuse de voir si son arc tirait bien. Merthin s’en réjouit.
    « Où ? » demanda-t-il en regardant autour de
lui. Si jamais on l’attrapait en train de tirer hors de toute surveillance, il
se ferait confisquer son arc.
    « On n’a qu’à aller dans la forêt. »
    La proposition de Caris l’étonna. Les enfants n’avaient pas
le droit de s’aventurer dans ces bois peuplés de proscrits qui vivaient de
rapines. Ils risquaient de s’y faire dépouiller de leurs vêtements, d’être
enlevés et employés comme esclaves, pour ne rien dire des autres sévices qu’ils
encouraient, des choses pires encore dont les parents ne parlaient que par
allusions. Et, s’ils s’en revenaient indemnes, ils seraient punis pour avoir
désobéi. Qui avait envie de recevoir le

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