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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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t’écouteront si nous les privons de
leur constructeur. Ralph, peux-tu persuader ton frère de renoncer à ce
projet ?
    — Je peux essayer.
    — Propose-lui un meilleur projet. Tiens, dis-lui que je
veux qu’il me construise un nouveau palais, ici, à Château-le-Comte.
    — Bien », répondit Ralph, ravi de se voir confier
par le comte une mission spéciale. Mais par-devers lui, il doutait fortement de
parvenir à la remplir. Dans ses discussions avec Merthin, il n’arrivait jamais
à faire valoir son point de vue.
    « Pourront-ils construire leur pont sans lui ?
    — Si la commande lui a été confiée, c’est que personne
d’autre à Kingsbridge ne sait comment construire un ouvrage sous l’eau.
    — Il n’est pourtant pas le seul homme de toute
l’Angleterre à pouvoir construire un pont, j’imagine !
    — Quoi qu’il en soit, intervint William, privés de leur
constructeur, ils ne pourront certainement pas lancer leurs travaux avant un
an.
    — Toujours ça de gagné ! » grommela Roland,
et il conclut haineusement : « Cet arrogant prieur mérite d’être
remis à sa place ! »
    *
    À l’église, Ralph put constater que la situation de ses
parents s’était grandement améliorée. Sa mère arborait une robe verte toute
neuve et son père des souliers en cuir. De retour à la maison, il découvrit,
mise à rôtir au-dessus du feu, une oie fourrée aux pommes dont l’odeur vous
faisait monter l’eau à la bouche et, sur la table, une miche de pain à la
farine de blé, la plus onéreuse.
    L’argent venait de Merthin, ses parents devaient-ils lui
apprendre bien vite. « Il a été payé quatre pennies par jour par le curé
de l’église Saint-Marc, dit Maud fièrement, et il construit une nouvelle maison
pour Dick le Brasseur. Et ensuite, il a cette commande pour le pont. »
    Pendant que son père découpait l’oie, son frère lui expliqua
qu’il serait moins payé pour la construction du pont parce qu’il avait reçu en
acompte l’île des lépreux. Le dernier malade, vieillard grabataire, avait été
transféré de l’autre côté de la rivière, dans une petite maison tout au fond
d’un verger appartenant au monastère.
    Le bonheur évident de sa mère laissait à Ralph un goût
amer : depuis son enfance, il était convaincu que le destin de sa famille
reposait entre ses mains. Envoyé auprès du comte de Shiring à l’âge de quatorze
ans, il en avait aussitôt déduit que l’honneur d’effacer l’humiliation de son
père lui reviendrait d’office puisqu’il serait chevalier, voire baron ou même
comte, alors que Merthin, placé chez un charpentier, végéterait tout en bas de
l’échelle sociale. Les bâtisseurs n’étaient jamais adoubés chevaliers.
    Le fait que son père ne semblait guère impressionné par les
succès de Merthin lui fut un petit réconfort et il nota avec plaisir son
impatience quand Maud évoqua les projets de construction. « Mon aîné
semble avoir hérité du sang de Jack le Bâtisseur, le seul de mes ancêtres qui
soit de basse extraction, fit-il remarquer sur un ton qui trahissait plus
d’étonnement que de fierté. Mais toi, Ralph, dis-nous où tu en es à la cour du
comte Roland. »
    Jusqu’alors, pour une raison qui lui demeurait aussi
mystérieuse qu’elle le dépitait, Ralph ne s’était pas élevé au sein de la
noblesse. Que son frère soit en mesure d’offrir à leurs parents un peu de
confort, de nouveaux vêtements et une bonne nourriture dans la situation
modeste qui continuait d’être la leur, aurait dû le réjouir, mais il ne pouvait
s’empêcher d’en éprouver du ressentiment.
    Et maintenant voilà qu’il devait persuader Merthin de
renoncer à bâtir le pont. La difficulté avec son frère, c’était qu’il ne voyait
jamais rien simplement. Il n’était pas comme les chevaliers et les écuyers avec
lesquels Ralph frayait depuis sept ans des hommes qui combattaient, et pour qui
les questions de loyauté étaient claires, pour qui le courage était la vertu
suprême et l’issue la vie ou la mort. Bref, des hommes avec qui il n’avait pas
besoin de réfléchir beaucoup. Avec Merthin, c’était une autre affaire : il
portait sur toute chose un regard global. Il ne pouvait pas jouer aux dames
sans proposer immédiatement de modifier une règle.
    Pour l’heure, il expliquait à leurs parents pourquoi il
avait tenu à recevoir ces quatre acres de roche stérile en à-valoir sur son
salaire : « Les

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