Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
Vom Netzwerk:
du
charretier et poussait de toutes ses forces pour la faire pénétrer entre les
côtes. La lame traversa son corps massif et ressortit dans son dos. Ben tomba
en arrière. Ralph retira son épée. Une fontaine de sang jaillit de la blessure.
Ralph en éprouva une satisfaction triomphante. C’en était fini de l’insolence
de Ben le Rouleur !
    Il alla s’agenouiller près de Joseph. Ses yeux fixes ne
voyaient plus. On se sentait plus battre son cœur. Il était mort.
    En un sens, cela valait mieux. Les explications en seraient
simplifiées : Ben le Rouleur avait assassiné un homme du comte et il
l’avait payé de sa vie. Personne n’y verrait la moindre injustice. Le comte
Roland était sans pitié pour qui osait défier son autorité.
    Merthin n’avait pas la même vision de la situation. Il était
défait, il semblait être en proie à une atroce douleur. « Qu’as-tu
fait ? cria-t-il à son frère, atterré. Tu laisses un bébé de deux ans
orphelin ! Bennie, il s’appelle.
    — La veuve n’a qu’à lui trouver un autre père !
jeta Ralph. Et qu’elle choisisse cette fois un homme qui connaisse son
rang ! »

 
27.
    La moisson fut mauvaise. Le soleil s’était si rarement
montré au mois d’août qu’en septembre le grain était à peine mûr. À Wigleigh,
les paysans étaient d’humeur morose et les récoltes ne s’accompagnèrent pas des
danses, boissons et amours soudaines qui d’habitude transforment cette saison
en une période festive. Le grain, humide, pourrirait certainement sur pied et
nombre de villageois connaîtraient la famine cet hiver.
    Wulfric moissonna son orge sous une pluie diluvienne,
fauchant les épis détrempés que Gwenda liait ensuite en bottes. Le premier jour
de soleil du mois de septembre, ils attaquèrent les parcelles de blé, espérant
que le beau temps durerait assez longtemps pour qu’il sèche.
    À un certain moment, Gwenda se rendit compte que Wulfric
était la proie d’un accès de fureur. La perte subite de sa famille tout entière
nourrissait d’autant plus sa rage qu’il ne pouvait incriminer personne. Que le
pont se soit effondré ce jour-là était le fait du hasard, un désastre orchestré
par le Malin ou une punition de Dieu. Wulfric n’avait d’autre échappatoire que
de se jeter dans le travail. Pour Gwenda, l’échappatoire était son amour pour
lui, et c’était une force tout aussi puissante.
    Ils étaient aux champs avant le point du jour et n’en
revenaient qu’une fois la nuit tombée. Gwenda se couchait alors, percluse de courbatures,
et ne se réveillait qu’en entendant claquer la porte de la cuisine, ouverte par
Wulfric bien avant l’aube. Et malgré cela, ils n’arrivaient pas à rattraper
leur retard sur les autres paysans.
    Peu à peu, Gwenda avait perçu chez les villageois un changement
d’attitude à son égard ainsi qu’envers Wulfric. Fille d’un homme déshonorable,
on l’avait toujours traitée de haut. Quand il était apparu évident qu’elle
faisait tout son possible pour arracher Wulfric à Annet, les femmes s’étaient
mises à la regarder de travers. Wulfric, lui, n’était en rien détesté, même si
d’aucuns estimaient qu’il faisait preuve d’une avidité dépourvue de sens
pratique en voulant à tout prix obtenir des terres aussi vastes. Cependant,
leurs efforts pour rentrer la moisson ne laissèrent pas d’impressionner les
gens. Ce gars-là, avec la seule aide d’une fille, abattait le travail de trois
hommes et s’en tirait mieux qu’on ne l’avait imaginé. Les hommes commencèrent
alors à admirer Wulfric et les femmes à trouver des qualités à Gwenda, tant et
si bien qu’ils finirent par leur prêter mainforte. Quant au prêtre du village,
le père Gaspard, il ferma les yeux sur le fait qu’ils enfreignaient le repos
dominical.
    Quand les Perkin eurent rentré leurs récoltes, le père
d’Annet et son frère Rob rejoignirent Gwenda sur les terres de Wulfric. Même
Ethna, la mère de Gwenda, vint donner un coup de main. Le jour où la dernière
charrette de blé quitta le champ pour la grange de Wulfric, suivie de tous les
paysans entonnant des chansons, on sentit presque renaître le vieil esprit des
moissons.
    Annet, par sa présence, faisait mentir le dicton selon
lequel il faut avoir marché derrière la charrue pour danser la gigue des
moissons. En tant que fiancée, elle paradait au côté de Wulfric. Gwenda, qui
marchait à leur suite, la regardait aigrement se

Weitere Kostenlose Bücher