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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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adressait-il une prière à la Vierge
Marie, sa sainte préférée. Elle s’étonna qu’il puisse toujours caresser un
fantôme d’espoir. Le père Gaspard céda sa place au seigneur Ralph.
    Tous les villageois étaient venus à l’église, naturellement,
y compris Joby et Ethna. Gwenda ne fréquentait plus ses parents. Il lui
arrivait de parler avec sa mère, mais uniquement en l’absence de son père. Joby
gardait une plaque rouge sur la joue, à l’endroit où elle lui avait assené un
coup avec la bûche enflammée. Il ne cherchait jamais à croiser son regard. Et
si Gwenda continuait à avoir peur de lui, elle sentait que désormais lui aussi
la craignait.
    Ralph s’assit sur la haute cathèdre en bois et promena sur
ses serfs un regard d’acheteur au marché aux bestiaux. Les attendus de la cour
seigneuriale consistaient ce jour-là en une série d’annonces que Nathan
proclama. Elles concernaient la façon dont la moisson du seigneur devrait
s’effectuer, les jours de la semaine prochaine au cours desquels les serfs
serait tenus d’accomplir leur devoir sur ses terres. Comme il n’était pas
proposé à la population d’en débattre, tout le monde comprit que Ralph n’était
pas homme à rechercher l’accord de ses paysans.
    D’autres détails réglés par Nathan concernaient des tâches
hebdomadaires : par exemple, la glane à Cent Acres qui devait s’achever le
lundi soir pour que le bétail puisse brouter le chaume dès le mardi matin.
Quant aux labours d’automne à Longchamp, ils débuteraient un mercredi. En temps
ordinaire, ces projets auraient suscité des discussions ; les villageois
les plus chicaneurs auraient trouvé toutes sortes de raisons pour proposer des
arrangements différents. Aujourd’hui, tout le monde se tenait coi, cherchant à
prendre la mesure du nouveau seigneur.
    La décision concernant Wulfric fut énoncée sans aucun effet
déclamatoire, comme s’il s’agissait d’une corvée parmi d’autres. Nathan
déclara : « Compte tenu de son jeune âge, Wulfric ne sera pas
autorisé à hériter les terres de son père. »
    Gwenda observa Ralph. Le seigneur s’efforçait de masquer un
sourire de triomphe. Il porta la main à son visage. Ses doigts touchèrent son
nez cassé. Geste involontaire, se dit-elle.
    Nathan poursuivait : « Le seigneur Ralph jugera ce
qu’il convient de faire avec ces terres et il rendra son verdict plus
tard. »
    Le gémissement qui s’échappa des lèvres de Wulfric fut
entendu de tous. Si le jeune homme s’était attendu à cette décision, il lui
était amer de l’entendre confirmée tout haut. Gwenda le regarda. Il avait
tourné le dos à la foule et cachait son visage au creux d’un pilier, s’y
appuyant comme si ses jambes ne le portaient plus.
    « C’est tout pour aujourd’hui », dit Nathan.
    Ralph se leva. Il parcourut le bas-côté lentement, tournant
sans cesse les yeux vers Wulfric éperdu. Quel seigneur serait-il dans l’avenir,
si son premier acte était d’user de son pouvoir pour se venger ? se
demanda Gwenda. Nathan, qui lui avait emboîté le pas, marchait les yeux rivés
au sol, conscient qu’une injustice venait d’être commise. Sitôt que la
population commença à quitter l’église, les commentaires allèrent bon train.
Gwenda ne s’engagea dans aucune de ces conversations, elle continua de regarder
Wulfric.
    Il s’était écarté du mur et parcourait la foule des yeux à
la recherche d’Annet. Son visage était l’image même de la misère. Sa fiancée,
manifestement dépitée et décidée à l’ignorer, évitait son regard. Étonnée,
Gwenda se demanda quels pouvaient être ses sentiments.
    Annet se dirigea vers la porte, la tête haute. Son père et
le reste de la famille la suivirent. Allait-elle sortir sans un mot à
Wulfric ?
    La même pensée dut traverser le jeune homme parce qu’il lui
cria : « Annet ! Attends ! »
    Tout le monde se figea.
    La jeune fille se retourna. Wulfric se tenait devant elle.
« Nous nous marions toujours, n’est-ce pas ? » Son ton suppliant
fit grimacer Gwenda. Annet le dévisageait fixement, cherchant une réponse.
Comme le silence s’éternisait, Wulfric reprit : « Les seigneurs ont
besoin de bons serfs pour cultiver leurs terres. Peut-être que le seigneur
Ralph m’en donnera de plus petites à exploiter.
    — Tu lui as cassé le nez, n’attends rien de
lui ! » répondit-elle méchamment. Sa dureté rappela à Gwenda combien
elle

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