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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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lui soumettrai cette proposition.
    — Puisqu’elle n’est pas encore là...
    — Oui ?
    — J’aimerais vous entretenir d’un problème qui concerne
le village de Long Ham. »
    Godwyn indiqua d’un signe de tête qu’il situait parfaitement
ce village parmi les douzaines qui rendaient hommage au prieuré sous forme de
taxes féodales.
    Philémon poursuivit : « Plus précisément, il
concerne les terres d’une veuve dénommée Mary-Lynn. À la mort de son mari, elle
a permis à un voisin du nom de John Nott de les exploiter. Maintenant, elle
s’est remariée et souhaiterait les récupérer pour que son mari les exploite
lui-même. »
    Cette querelle typiquement paysanne ne nécessitait nullement
l’attention du prieur. Philémon avait une bonne raison d’en faire état, comprit
Godwyn, et il s’enquit : « Qu’en pense le bailli ?
    — Que la terre devrait revenir à la veuve puisqu’il
s’est agi dès le départ d’une convention temporaire.
    — Eh bien, qu’il en soit ainsi !
    — Un détail vient compliquer la situation. Sœur
Élisabeth a des parents dans ce village, un demi-frère et deux demi-sœurs.
    — Ah ! » s’exclama Godwyn. Sœur Élisabeth,
jadis Élisabeth Leclerc, était une religieuse jeune et intelligente qui
s’élèverait certainement dans la hiérarchie. S’en faire une alliée pouvait se
révéler d’autant plus intéressant qu’elle occupait actuellement au couvent les
fonctions de maître d’ouvrage. Toute question relative aux bâtiments relevait
donc de sa compétence.
    « Ces paysans sont ses seuls parents, en dehors de sa
mère qui travaille à l’auberge de La Cloche, poursuivait Philémon, elle les
aime beaucoup. Quant à eux, ils la révèrent comme la sainte de la famille. À
chacune de leurs visites à Kingsbridge, ils apportent au couvent toutes sortes
d’offrandes, des fruits, du miel, des œufs.
    — Et alors ?
    — Ce John Nott se trouve être le demi-frère de sœur
Élisabeth.
    — T’a-t-elle prié d’intercéder auprès de moi ?
    — Oui, et en me précisant bien de ne pas en parler à
mère Cécilia. »
    Situation ô combien appréciée de son sous-prieur, pensa
Godwyn, qui n’était pas sans avoir remarqué son attirance pour les actions
menées en sous-main. Qu’on le considère comme un homme de pouvoir, comme
quelqu’un susceptible d’user de son influence pour favoriser une partie ou une
autre dans une dispute, flattait son insatiable vanité. Le fait qu’Élisabeth ne
veuille pas que la mère supérieure soit informée de sa requête avait tout pour
le ravir. Dépositaire d’un secret honteux, Philémon le garderait aussi
jalousement qu’un avare ses pièces d’or.
    « Que proposes-tu ? demanda Godwyn.
    — D’autoriser John Nott à conserver la terre. Sœur
Élisabeth nous sera ainsi redevable d’un bienfait. Un jour ou l’autre, nous
pourrons en tirer avantage. Mais, bien sûr, il en ira comme vous le déciderez.
    — Ce n’est pas très équitable vis-à-vis de la veuve,
objecta Godwyn, mal à l’aise.
    — Je ne le nie pas, mais il convient de garder à
l’esprit les intérêts du prieuré.
    — Nulle contingence ne saurait entraver l’œuvre du
Seigneur. Très bien... Préviens le bailli.
    — La veuve se verra récompensée au centuple dans
l’autre monde.
    — Évidemment. » À une époque, Godwyn avait hésité
à laisser Philémon manigancer de la sorte, mais il y avait beau temps qu’il s’y
était résigné. Au fil des ans, son acolyte lui était devenu par trop
nécessaire, comme sa mère le lui avait prédit jadis.
    Il y eut un petit coup frappé à la porte, et Pétronille,
justement, fit son entrée.
    Elle vivait à présent dans une petite maison confortable de
la place aux Chandelles, en retrait de la grand-rue. Son frère Edmond lui avait
accordé une généreuse donation qui lui suffirait jusqu’à la fin de ses jours.
Aujourd’hui, à l’âge de cinquante-huit ans, elle ne se tenait plus aussi droite
et marchait en s’aidant d’une canne, mais elle n’avait rien perdu de sa
vivacité d’esprit. Comme toujours, Godwyn fut partagé entre le bonheur de la
voir et la crainte de s’entendre reprocher quelque chose.
    La mort d’Anthony dans l’écroulement du pont et celle
d’Edmond, survenue voilà déjà sept ans, avaient fait d’elle l’unique survivante
de sa génération. Désormais chef de famille, Pétronille n’hésitait pas à dire
son fait à Godwyn.

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