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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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la conduite
à tenir. Voler ? Violer ? Il y avait en eux quelque chose de sauvage.
    Elle se força à réfléchir calmement. Quelles que soient
leurs intentions, ils devaient avoir faim. « Vite, lança-t-elle à Mair,
donnez-moi des tranches de ce pain ! »
    Mair obtempéra, coupant des tranches épaisses, tandis que
Caris faisait de même avec le jambon. Ayant posé le jambon sur le pain, elle
dit à Mair d’aller le leur porter.
    Celle-ci traversa l’étendue d’herbe d’un pas ferme malgré sa
terreur et offrit la nourriture aux deux hommes. Ils la lui arrachèrent des
mains et mangèrent avidement. Caris remercia sa bonne étoile.
    Remisant rapidement le jambon dans le sac de selle de
Blackie et le couteau dans sa ceinture, elle enfourcha son cheval. Du haut de
sa monture, elle se sentit plus rassurée. Mair l’imita dès qu’elle eut rangé le
pain dans le bagage de Stamp.
    Le plus grand des deux hommes s’avança vers elles d’un pas
vif. Caris n’eut pas le temps d’éperonner Blackie. L’homme avait saisi la
bride.
    « Je vous remercie, dit-il avec ce fort accent du cru.
    — Remerciez Dieu plutôt, car il m’a envoyée pour vous
venir en aide. Il vous regarde, il voit tout ce que vous faites.
    — Vous avez encore de la viande dans votre sac ?
    — Dieu me dira à qui la donner. »
    Il y eut une pause, comme si l’homme ruminait le sens de
cette phrase. Puis il ajouta : « Donnez-moi votre bénédiction. »
    L’idée de tendre son bras dans le geste traditionnel de la
bénédiction inquiétait Caris, car sa main serait alors trop éloignée du couteau
pendu à sa ceinture. Oh, ce n’était pas une arme, simplement un de ces
ustensiles dont on se servait pour manger et que tout un chacun portait sur
soi, homme ou femme. Mais sa courte lame était suffisante pour taillader le dos
de la main de cet homme et l’obliger à lâcher la bride. Saisie d’une
inspiration, elle déclara : « Mettez-vous à genoux ! »
    L’homme marqua une hésitation.
    « Vous devez vous agenouiller si vous voulez recevoir
ma bénédiction ! » précisa-t-elle en élevant légèrement le ton.
    L’homme se mit à genoux, tenant toujours sa nourriture dans
sa main. Caris releva les yeux sur son compagnon qui finit par s’agenouiller
lui aussi.
    Elle les bénit tous les deux, puis donna un petit coup de
talons à Blackie qui s’éloigna au trot. Un moment plus tard, elle se retourna.
Mair la serrait de près. Les deux hommes affamés s’étaient relevés et les
regardaient fixement.
    Caris repensa à cette scène avec anxiété au cours de
l’après-midi, tandis qu’elle parcourait à cheval des lieux dévastés sous un
soleil radieux qui brillait comme les feux de l’enfer. Çà et là, des
tourbillons de fumée s’élevaient d’un bois ou d’une grange en ruine. La
campagne n’était pas complètement désertée, comme elle s’en rendit compte peu à
peu. Là, une femme enceinte ramassait des haricots dans un champ qui avait
échappé aux torches anglaises ; ici, deux enfants au regard épouvanté
scrutaient les environs, derrière les pierres noircies d’un manoir ; par
endroits, elle entrevoyait à la lisière des bois des hommes se déplaçant en
groupe avec une détermination de bêtes sauvages. Ces hommes, surtout,
l’inquiétaient. Ils semblaient affamés et la faim était un puissant
pousse-au-crime. Ne ferait-elle pas mieux de se préoccuper de leur propre
sécurité au lieu de songer seulement à réduire la distance qui les séparait
encore de l’évêque ?
    Pour l’heure, il s’agissait de trouver le chemin du couvent
où elle avait projeté de passer la nuit et la tâche s’avérait plus difficile
que prévu. Elle n’avait pas imaginé que l’armée anglaise laisserait un tel
saccage derrière elle. Elle avait pensé pouvoir demander sa route aux paysans.
En temps normal, déjà, il n’était pas toujours aisé d’obtenir des
renseignements précis de la part de personnes qui n’avaient pas dépassé la
ville où se tenait le marché le plus proche de chez eux. Dans les circonstances
actuelles, ses interlocuteurs terrifiés risquaient d’être volontairement
évasifs, voire dangereux.
    Elle savait d’après le soleil qu’elle se dirigeait vers
l’est. Aux profondes ornières et aux traces de roues dans la boue desséchée,
elle estimait se trouver sur la grand-route. Le village qu’elle comptait
atteindre ce soir s’appelait L’Hospice-des-Sœurs en

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