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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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d’attente
s’étirait entre les taudis qui bordaient la route, jusqu’à se fondre au loin,
noyée dans la pluie.
    Le pont présentait l’inconvénient d’être également trop
court. Autrefois, sans aucun doute, ses deux extrémités reposaient-elles sur la
terre sèche, mais au fil des siècles, la rivière s’était élargie ou alors, ce
qui était plus probable, les rives s’étaient enfoncées sous l’effet de la
circulation ininterrompue des piétons et des chariots, de sorte qu’à présent,
quiconque voulait passer le pont se retrouvait à devoir patauger dans de l’eau
boueuse sur une rive comme sur l’autre.
    Merthin examinait la structure de l’ouvrage. Caris le
comprit à la manière dont il en fixait les divers éléments. Connaissant bien le
jeune homme, elle devina qu’il se demandait comment ce pont tenait debout. Elle
le surprenait souvent en train de regarder quelque chose fixement.
Généralement, c’était à l’intérieur de la cathédrale, mais cela pouvait lui
arriver devant une maison, voire devant un spectacle tout à fait
ordinaire : un moineau planant dans le ciel, par exemple, ou un buisson en
fleurs. Dans ces moments de grande concentration, il se figeait et ses yeux se
mettaient à briller. On aurait dit qu’il cherchait à faire entrer de force la
lumière dans un lieu obscur. Et quand elle l’interrogeait, il répondait qu’il
essayait de percevoir ce qu’il y avait à l’intérieur des choses.
    Suivant la direction de son regard, elle tenta d’imaginer ce
qu’il voyait dans ce vieux pont de cent quatre-vingts pieds de long, le plus
long qu’elle ait vu de sa vie. Son tablier reposait sur deux rangées parallèles
de massifs piliers de chêne, de la même façon que les voûtes de la cathédrale
situées de part et d’autre de la nef reposaient sur leurs colonnes. Ici, il Y
avait en tout cinq paires de piliers : deux constituées de piliers très
bas et placées aux deux extrémités du pont, là où l’eau était peu profonde, et
trois paires beaucoup plus hautes au centre puisque ces piliers-là s’élevaient
à quinze pieds au-dessus de l’eau.
    Chacune des piles du pont était constituée de quatre poutres
de chêne cerclées de planches pour les maintenir ensemble. La légende voulait
que le roi d’Angleterre ait offert au prieuré de Kingsbridge les vingt-quatre
plus beaux chênes du pays pour fabriquer les six piles centrales. Celles-ci
étaient surmontées de solives posées dans le sens de la longueur et les reliant
les unes aux autres, formant ainsi deux parallèles jointes entre elles par des
poutres plus courtes placées en travers pour former le soubassement du tablier.
Son dessus, c’est-à-dire ce qu’on en voyait en marchant sur le pont, était un
assemblage de planches réunies dans le sens de la longueur, tel un plancher. De
chaque côté du pont, une balustrade courait le long du bord, formant un
parapet. Il n’y avait pas une année où un paysan pris de boisson ne percute ce
rail avec sa carriole et ne trouve la mort, ainsi que son cheval, dans les eaux
vives de la rivière.
    « Que regardes-tu ? voulut savoir Caris.
    — Les fissures, répondit Merthin.
    — Des fissures ? Où ça ?
    — Mais si ! De part et d’autre de la pile
centrale, le bois se dédouble. Regarde, Elfric les a renforcées à l’aide de
croisillons de fer. »
    Maintenant qu’elles lui étaient signalées, Caris distinguait
parfaitement les bandes plates de métal clouées en travers des fissures.
« Ça a l’air de t’inquiéter, lui dit-elle.
    — Je ne comprends pas pourquoi ces poutres se sont
fendues.
    — C’est important ?
    — Et comment ! »
    Merthin était d’humeur laconique, ce matin. Elle s’apprêtait
à lui en demander la raison quand il s’exclama : « Tiens, voilà ton
père ! »
    Elle releva les yeux vers la rue. Edmond arrivait en effet,
accompagné d’Anthony. Les deux frères formaient un couple comique. Le plus
grand, Anthony, qui était aussi le plus pâle, contournait les flaques à petits
pas précautionneux en relevant sa robe de moine d’un air dégoûté. Edmond, plus
âgé, comme l’attestait sa barbe grise en broussaille, avait le teint rubicond
d’un homme vigoureux. Il avançait avec détermination en traînant sa mauvaise
jambe, sans s’inquiéter de la boue. Il parlait avec exubérance en faisant de
grands gestes. À sa vue, Caris sentit un élan d’amour l’embraser, comme chaque
fois

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