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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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clairière.
« Voilà ! »
    Il fallut un moment à Gwenda pour comprendre de quoi il
parlait. Le bout de terrain qui s’ouvrait devant elle n’avait rien de
remarquable, uniquement des taillis entre les arbres et un tas d’herbes
arrachées sur le côté, preuve que David s’attachait à sarcler ses cultures. En
regardant mieux, elle se rendit compte qu’elle n’avait jamais vu cette plante
rampante qui tapissait le sol, et dont les feuilles, pointues, s’accrochaient
par groupe de quatre à la tige cannelée.
    « Qu’est-ce que c’est ?
    — De la garance, mère. J’en ai acheté des graines à un
marin quand nous sommes allés à Melcombe.
    — À Melcombe ? Mais ça remonte à trois ans !
    — C’est le temps qui lui a été nécessaire pour pousser,
sourit David. Au début, j’ai bien cru qu’elle ne prendrait pas. Le marin
m’avait expliqué qu’il fallait planter les graines à l’ombre, dans un sol
sablonneux. J’ai labouré la clairière et semé mes graines. La première année,
je n’ai obtenu que trois ou quatre plants chétifs. Je me suis dit que j’avais
gaspillé mon argent. Mais, l’année suivante, les racines avaient proliféré et
produit des rejets. Regardez : aujourd’hui, il y en a partout ! »
    Gwenda n’en revenait pas que son fils ait gardé un secret si
longtemps. « À quoi ça sert ? C’est bon ?
    — La garance ne se mange pas ! s’esclaffa David.
Tout l’intérêt est dans les racines. Il faut les faire sécher et les broyer. La
poudre obtenue donne une teinture rouge très recherchée. À Kingsbridge, Madge
la Tisserande l’achète sept shillings le gallon. »
    Une fortune ! songea Gwenda. Le froment, la plus chère
de toutes les céréales, se vendait dans les sept shillings les vingt-cinq
livres, c’est-à-dire soixante-quatre gallons.
    « Soixante-quatre fois plus cher que le froment !
S’exclama-t-elle.
    — C’est bien pour ça que j’en ai planté, jubila David.
    — Planté quoi ? » lança une voix.
    Ils se retournèrent tous comme un seul homme. Nathan le
Bailli, plus courbé et tordu que jamais, se tenait à côté d’un buisson
d’aubépine, la mine triomphante, ravi de les avoir pris la main dans le sac.
    « Une herbe médicinale appelée “langue de
sorcière” », s’empressa de répondre David.
    Gwenda comprit qu’il inventait le nom. Nathan, quant à lui,
n’en était pas certain.
    « C’est pour soigner l’asthme de ma mère.
    — Tu as de l’asthme, Gwenda ? Première
nouvelle !
    — Oui, en hiver, précisa-t-elle.
    — Une herbe médicinale, tu dis ? répéta le bailli
sans y croire. Avec tout ce qui pousse ici, tu as de quoi soigner toute la
ville de Kingsbridge. Et je vois que tu sarcles tes cultures pour qu’elles
produisent davantage.
    — J’aime le travail bien fait ! » se défendit
David.
    L’excuse n’était pas très convaincante, mais Nathan ne s’y
arrêta pas. « C’est illégal. D’abord, les serfs doivent demander
l’autorisation à leur seigneur avant de planter quoi que ce soit, sinon ce
serait le chaos. Ensuite, il est interdit de faire pousser des cultures dans
les forêts domaniales. Les plantes médicinales ne font pas exception. »
    Que pouvaient-ils rétorquer ? Telle était la loi, en
effet. Loi insupportable pour les paysans qui auraient souhaité planter des
espèces rares, susceptibles d’atteindre des prix faramineux, comme le chanvre
pour fabriquer les cordages qui était très recherché, le lin pour tisser des
sous-vêtements précieux ou des cerisiers dont les fruits ravissaient les riches
dames. Hélas, maints seigneurs et baillis empêtrés dans leur conservatisme s’y
opposaient catégoriquement.
    « Mais quelle famille ! persifla Nathan. Il ne
suffit pas que l’aîné soit un fugitif doublé d’un meurtrier, il faut encore que
le cadet défie son suzerain ! »
    Sa fureur était compréhensible, car Sam avait échappé à la
pendaison. À l’évidence, Nathan maudirait la lignée de Gwenda jusqu’à son
dernier souffle.
    Il arracha un plan méchamment. « Je l’apporterai au
tribunal, » lança-t-il avec une joie perverse. Sur ce, il tourna les
talons et s’enfonça dans la forêt de son pas clopinant.
    Gwenda et les siens reprirent eux aussi le chemin du
village.
    « S’il croit me faire peur ! souffla David. Je la
paierai, son amende, et il me restera encore plein de sous !
    — Et s’il ordonne la destruction de tes

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