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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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présence du shérif,
dont le château se dressait sur la colline. Les notables – lainiers,
volontaires au service du shérif et agents royaux, dont le coroner – occupaient
les belles demeures entourant la place du marché. Un peu plus loin
s’agglutinaient les maisons des marchands et des artisans moins
prospères : orfèvres, tailleurs ou apothicaires. Comme son nom l’indiquait,
le père de Gilles était négociant en épices. Ce fut donc vers une rue du
quartier commerçant que le garçon entraîna Caris. À l’instar des maisons
voisines, celle de ses parents avait un étage. Le rez-de-chaussée, en pierre,
était occupé par l’entrepôt et la boutique ; l’étage, en bois, abritait
les appartements. Ce jour-là, le magasin était fermé. Le petit Gilles entraîna
Caris vers l’escalier extérieur.
    Arrivée au palier supérieur, elle marqua un temps d’arrêt,
les narines chatouillées par des relents qu’elle connaissait bien. La
pestilence provoqua en elle un sentiment d’effroi. S’interdisant toute
réflexion, elle traversa le grand vestibule et pénétra dans la chambre à
coucher. Le spectacle qu’elle redoutait s’offrit à sa vue.
    Trois personnes étaient allongées sur des matelas : une
femme de son âge, un homme légèrement plus vieux et un adolescent. Le mari, de
loin le plus atteint, brûlait de fièvre. Il transpirait et gémissait. Son col
ouvert laissait voir une éruption de bubons sur sa gorge et son torse. Du sang
maculait ses lèvres et ses narines.
    « La peste est de retour ! Dieu me vienne en
aide ! » marmonna Caris.
    Une fraction de seconde, pétrifiée, les yeux rivés sur la
scène, elle n’eut conscience que de son impuissance. Elle avait toujours su, en
théorie, que la peste pouvait ressurgir un jour. C’était d’ailleurs l’une des
raisons qui l’avaient incitée à écrire son livre. Aujourd’hui, ces pustules et
ces nez dégoulinant de sang la laissaient effarée.
    La femme se redressa sur le coude. Son état n’était pas
aussi grave : elle avait des boutons et de la fièvre, mais l’hémorragie
n’avait pas commencé.
    « Donnez-moi à boire, pour l’amour de Dieu. »
    En voyant l’enfant prendre une cruche de vin, Caris retrouva
ses esprits. « Pas de vin, Gilles, cela ne ferait qu’attiser sa soif. J’ai
vu un fût de bière anglaise dans l’autre pièce. Va lui en tirer une
chope. »
    Le regard de la maîtresse de céans s’attarda sur
Caris : « Vous êtes la mère prieure, n’est-ce pas ? »
    Caris ne la détrompa pas.
    « On dit que vous êtes une sainte. Pouvez-vous guérir
ma famille ?
    — J’essaierai. Je ne suis pas une sainte, uniquement
une femme qui observe ses semblables, malades ou bien-portants. »
    Elle sortit de sa trousse un bout d’étoffe qu’elle noua sur
son nez et sa bouche. Cela faisait des années qu’elle n’avait pas vu de
pestiféré, pourtant elle continuait par habitude à prendre des précautions dès
qu’elle devait s’occuper d’un patient potentiellement contagieux. Ayant imbibé
d’eau de rose un chiffon propre, elle entreprit de bassiner le visage de la
malade. Comme toujours, celle-ci s’en trouva soulagée.
    Gilles tendit une chopine à sa mère, qui la but d’un trait.
    « Donne-leur à boire aussi souvent qu’ils le désirent,
expliqua Caris. Rien d’autre que de la bière ou du vin coupé d’eau. »
    Elle s’approcha du père. Manifestement, il n’en avait plus
pour longtemps. Ses yeux étaient incapables de se fixer et son discours était
incohérent. Caris lui baigna le visage et prit soin de nettoyer le sang séché
autour de son nez et de sa bouche. Le frère aîné de Gilles, qui venait
seulement de contracter la maladie, en était toujours au stade des
éternuements. Conscient de la gravité de son état, il était terrifié.
    Ses soins achevés, Caris dit à Gilles de veiller au confort
des malades. « Donne-leur à boire, tu ne peux rien faire de plus. As-tu de
la famille, des oncles, des cousins ?
    — Ils habitent tous au pays de Galles. »
    Elle se promit de prévenir l’évêque Henri qu’il aurait
probablement à s’occuper d’un orphelin dans un avenir très proche. « Maman
m’a dit de vous payer.
    — Je n’ai pas fait grand-chose. Six pennies
suffiront. » L’enfant tira six piécettes d’argent d’une bourse en cuir
posée près du lit de sa mère.
    La femme se redressa à nouveau. Parlant d’une voix apaisée,
elle

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