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Un Monde Sans Fin

Un Monde Sans Fin

Titel: Un Monde Sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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partie, ne remarqua pas sa présence. .
    Ils avaient attaché un chat à un piquet en ne lui laissant
que la tête et les pattes libres. L’amusement consistait à le tuer, en ayant
les mains attachées dans le dos. L’unique moyen d’y parvenir était d’assommer
le malheureux animal à coups de tête. Le félin, naturellement, se défendait,
toutes griffes dehors, et mordait son agresseur au visage. Le candidat actuel,
âgé d’environ seize ans, virevoltait devant le piquet sous l’œil terrifié de sa
future victime. Soudain, il se précipita, tête baissée, sur le poitrail du chat
qui réagit par de grands coups de griffes. Les joues en sang, l’écuyer glapit
de douleur et recula d’un bond sous les rires de ses compagnons. Furieux, il se
rua de nouveau sur le chat, qui le griffa de plus belle, et il se cogna durement
le crâne contre le poteau. Les rires redoublèrent. Pour son troisième essai,
l’écuyer fut plus prudent : il s’approcha et feinta. Le chat battit des
pattes dans le vide et le jeune homme put ensuite lui assener un coup bien
placé à hauteur de la tête. Un filet de sang s’écoula de la gueule de l’animal,
qui s’affaissa, inconscient. Comme il respirait encore, l’écuyer lui flanqua un
ultime coup mortel. Les applaudissements fusèrent.
    Gwenda se détourna, écœurée par ce spectacle même si elle
n’aimait pas les chats. Assister à la torture d’une créature impuissante était
répugnant. Certes, les apprentis chevaliers devaient se préparer à mutiler et à
tuer des hommes sur les champs de bataille, mais fallait-il nécessairement que
les choses soient ainsi ?
    Elle poursuivit sa route sans saluer son fils. En sueur,
elle traversa le deuxième pont et grimpa l’escalier du donjon. Par bonheur, la
grande salle était agréablement fraîche.
    Elle était ravie que Sam ne l’ait pas vue, elle préférait
l’éviter le plus longtemps possible pour ne pas éveiller ses soupçons. Son
garçon n’était guère intuitif, mais il pouvait sentir sa détresse.
    Elle alla exposer la raison de sa présence au maréchal des
logis, qui promit de prévenir le comte de son arrivée.
    « Dame Philippa est-elle au château ? »
s’enquit-elle, le cœur empli d’espoir.
    Hélas, la comtesse était à Monmouth, chez sa fille.
    D’un air sombre, Gwenda s’installa pour attendre, incapable
de chasser de son esprit le souvenir de son entrevue dans la chaumière au fond
des bois. Sur les pierres grises du mur dénudé qui lui faisait face, elle
voyait son visage, sa bouche entrouverte et dégoulinant de salive tandis qu’il
la regardait ôter ses vêtements. Autant la réjouissait l’idée de s’unir
intimement à l’homme qu’elle aimait, autant celle de devoir le faire avec le
tyran qu’elle haïssait entre tous la révulsait.
    La première fois que Ralph avait abusé d’elle, voilà plus de
vingt ans, son corps l’avait trahie comme précédemment avec Alwyn, le
hors-la-loi, et elle avait éprouvé un certain plaisir malgré sa révulsion. En
revanche, dans la chaumière, elle n’avait pas vibré du tout, sans doute parce
qu’elle était plus âgée. Dans sa jeunesse, l’acte physique avait déclenché en
elle un désir automatique – une réaction qu’elle n’avait pu réprimer et qui
avait décuplé sa honte. À présent qu’elle était entrée dans l’âge mûr, ses
réactions étaient moins vives, son corps moins vulnérable grâce au ciel.
    Un escalier au fond de la salle menait à la chambre du
comte. Chevaliers, serviteurs, métayers et autres baillis s’y pressaient en une
ronde incessante. Au bout d’une heure, Gwenda fut priée de monter.
    Elle découvrit avec soulagement que Ralph n’était pas
seul ; elle avait craint qu’il ne veuille abuser d’elle sur-le-champ.
    Outre sieur Alan se trouvaient avec lui deux clercs
installés devant une table à écrire, des religieux. L’un d’eux lui remit un
petit rouleau de vélin.
    Ne sachant pas lire, elle ne le déroula pas.
    « Et voilà ! Désormais ton fils est métayer,
annonça Ralph.
    N’est-ce pas ce que tu as toujours voulu ? »
    Non, c’était la liberté qu’elle avait toujours désirée pour
elle-même, et Ralph le savait ! Elle n’était jamais parvenue à l’obtenir.
David avait conquis la sienne. Elle n’aurait donc pas vécu inutilement :
ses petits-enfants seraient des hommes libres et indépendants ; ils
paieraient un loyer pour leurs terres et ils y feraient

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