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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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ainsi. Son héritier saurait « se défendre des filles qui, comme la Kelscott, cherchent à se caser », se dit-il en vidant son verre de porto, le seul autorisé par le docteur Weston Clarke et Uncle Dave, pour une fois d'accord.
     

    En juin, à l'occasion d'une nouvelle rencontre de polo, organisée à Nassau, sur Eastern Parade, Pacal, en dépit de la mise en garde de son grand-père, revit avec plaisir Liz Ferguson. Comme il l'avait espéré, elle apparut au premier rang des spectateurs, pimpante, rieuse, vêtue d'un canezou de mousseline blanche, coiffée d'un canotier fleuri. À l'issue du match, elle vint à sa rencontre, porteuse d'une serviette brodée et ce fut tout naturellement qu'elle accepta de l'accompagner au Royal Victoria Hotel pour prendre un rafraîchissement. Ils renouèrent, comme si leur relation n'avait pas été interrompue par la mort tragique de lady Lamia. Entre eux, les choses allaient de soi, ils formaient un duo complice, harmonieux et gai. Le soir même, ils dînèrent ensemble. À l'aise dans le marivaudage comme dans la conversation sérieuse, ils en vinrent aux confidences. Lizzie révéla une solitude acceptée et entretenue ; Pacal ne cacha pas, sans donner de détails, qu'une aventure l'avait rendu circonspect à l'égard des femmes. Au moment de la séparation, ils échangèrent spontanément un premier baiser après avoir pris rendez-vous, le lendemain, sur une plage à Hog Island.
     
    – Je me baigne à Pirate's Cove, une crique peu fréquentée. J'y possède depuis peu une paillote pour pique-niquer. Nous ne serons pas dérangés, minauda Lizzie.
     
    – Ma présence ne sera-t-elle pas compromettante pour vous ?
     
    – On pensera que vous êtes mon chevalier servant à la mode américaine. Personne n'y trouvera à redire.
     
    – Votre mari, peut-être. Je me vois avec un duel sur les bras !
     
    – Aucun risque. Je jouis, comme lui, d'une entière liberté. Je lui dirai que je vais me baigner avec le petit-fils de lord Simon Leonard Cornfield. Il sera très flatté, lança gaiement Lizzie.
     
    Depuis l'afflux des touristes américains, les bains de mer étaient organisés. Les médecins de New York, de Washington et de Philadelphie conseillaient les eaux tièdes et pures des Bahamas pour éliminer la fatigue et combattre la nervosité. Un siècle plus tôt, le frère du grand George Washington n'avait-il pas tenté de restaurer sa santé au soleil de l'archipel ? Les plages les plus accessibles, à partir de New Providence, se trouvaient sur Hog Island, île étroite de quatre miles de long, étirée en face du centre ville de Nassau. Le port en eau profonde se trouvait entre l'île capitale et son annexe.
     
    Autrefois peuplée de sangliers, puis réservée à l'élevage malodorant des cochons, d'où son nom, Hog Island 2 offrait, sur sa rive septentrionale, des étendues de sable fin et des anses où les vagues exténuées n'arrivaient plus qu'en clapots. Des navettes portaient les baigneurs, en moins de dix minutes, de Bay Street à l'île, où des voiturettes étaient à la disposition de qui rechignait à marcher jusqu'au littoral.
     
    Ses bonnes résolutions ayant succombé, la veille, au charme de Liz Ferguson, Pacal fit la traversée en fin de matinée. Mieux que toutes celles qu'il avait rencontrées jusque-là, Lizzie semblait comprendre le rôle de la femme et offrait sans manière ni ambiguïté une amitié amoureuse pour un plaisir partageable. Confiant en l'innocuité d'une telle relation, Pacal allait joyeux vers celle qui l'attendait.
     
    Refusant une voiture, il marcha jusqu'à Pirate's Cove et repéra, de loin, la paillote : un toit de palmes supporté par quatre pieux sous lequel Liz, allongée sur un lit de bambou, lisait à l'abri du soleil. De temps à autre, elle jetait un regard du côté d'où devait arriver son compagnon. Par jeu, il contourna la paillote et la surprit. Sans quitter sa couche, elle lui tendit les bras.
     
    – Je craignais que vous ne veniez pas, dit-elle.
     
    – Pourquoi ne serais-je pas venu ?
     
    – Par crainte de la mante religieuse.
     
    – Vous êtes plutôt libellule, dit-il en se laissant tomber sur le sable à ses pieds.
     
    – Que lisiez-vous ? ajouta-t-il.
     
    –  Une vie , roman français de Guy de Maupassant. Je viens de le recevoir de Paris.
     
    – Est-ce intéressant ?
     
    – L'auteur se complaît à démontrer combien l'amour peut être cruel aux âmes sensibles,

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