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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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possessions individuelles ou familiales eût poussé au martyre les plus timorés. À l’aube de toutes les grandes journées, les pires sans-culottes avaient toujours pris soin de proclamer bien haut le caractère sacré des propriétés. Frègebois n’eût point souffert que l’on touchât ni à sa modeste maison ni aux biens nationaux qu’il était en train d’acquérir çà et là, en sous-main.
    On ne vota point. Préat demanda la parole. « Je te prie d’accepter mes excuses, citoyen Mounier, fit-il. Je n’avais pas pensé à ce que tu viens de dire. Ton raisonnement est juste, et comme l’esprit de justice, seul, me poussait, je n’ai aucune honte à reconnaître mon erreur. Je le déclare hautement, frères et amis : je suis heureux de cette discussion. Elle montre que lorsque des questions se posent entre de vrais républicains, elles doivent être exposées publiquement. Ainsi, le bon droit, la raison, l’honnêteté triomphent toujours. »

XIII
    En disant à Préat qu’Hébert et ses amis se rangeaient à l’opinion de Robespierre, Claude donnait sciemment un sérieux coup de pouce à la vérité. En apparence, oui, les Hébertistes, les Cordeliers nouveaux venus au club de la rue de la Convention – ou rue Honoré –, se conformaient à la ligne jacobine. En action, ils faisaient tout pour jeter bas le présent Comité de Salut public, et Danton leur donnait la main. La date du renouvellement revenait, en cette troisième décade de frimaire. Déjà les positions d’attaque étaient arrêtées, les listes des nouveaux membres prêtes. Hébert, en habit gris, ganté de peau fine, s’agitait dans les antisalles, aux Tuileries. Claude le prit à part pour lui glisser cette remarque :
    « As-tu bien pensé, Hébert, à ce que vous allez accomplir ? Tes amis ne seront pas les plus nombreux au pavillon de l’Égalité. Crois-tu que ceux de Danton auront à votre égard notre indulgence ? Crois-tu qu’une fois au pouvoir, ils laisseront les bureaux de la Guerre peuplés de vos créatures, qu’ils ne vous demanderont pas compte de Vincent, des incapacités de Rossignol, des erreurs de Ronsin ? »
    Cette indulgence, ou plutôt cette temporisation, avait été la politique des Robespierristes, tandis que les dantonistes Bourdon de l’Oise, Clauzel, Philippeaux, Fabre d’Églantine, à la Convention et aux Jacobins, depuis plus d’un mois signalaient avec vigueur l’envahissement de presque toutes les administrations par les créatures de la Commune, tonnaient contre « les commis de Bouchotte, se rendant tous les soirs aux Cordeliers pour y demander la tête des représentants qui dénoncent les créatures des bureaux de la Guerre », contre « les généraux communards qui se font tirer par des équipages à douze chevaux », contre « les agents des ministres, choisis parmi les hommes les plus ineptes et les plus connus pour leur immoralité », et dénonçaient enfin les bureaux de la Guerre comme source des pires abus : « Vous ne les verrez pas cesser tant que l’on n’aura pas traîné à l’échafaud les chefs et les bureaucrates. » Danton se répandait en paroles conciliantes. À tout prendre, les généraux communards, les Rossignol, les Ronsin, c’est lui qui les avait faits en réclamant, avec la Commune, la formation d’une armée révolutionnaire. Mais Philippeaux et autres n’écoutaient pas Danton. Les Robespierristes, eux, s’étaient gardés d’intervenir dans ce débat, laissant Bourdon réclamer la suppression du Conseil exécutif provisoire, c’est-à-dire le Conseil des ministres. En faisant passer la Convention à l’ordre du jour sur cette demande, ils avaient même donné l’impression de vouloir soutenir les Hébertistes là-dessus. Hébert allait-il, en renversant le Comité, sacrifier cet appui, pour le maigre avantage d’augmenter un peu le nombre de ses partisans au pavillon de Flore ?
    « Tu as jusqu’à demain pour réfléchir, ajouta Claude. Attention de ne pas te tromper. »
    De son côté, Robespierre n’était pas sans prendre quelques précautions. Le lendemain, en séance, quand l’appel nominal pour le renouvellement fut annoncé, un député obscur, Jay Sainte-Foy, ami de Jean Bon Saint-André, demanda la parole, et, avec une chaleur communicative, dépeignit à la Convention les périls « d’un changement dans le centre du gouvernement révolutionnaire, à cette heure critique. Tout homme impartial,

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