Un vent d'acier
de la liberté victorieuse et paisible », proclama-t-il. Et, tout de suite, il attaqua : « Le gouvernement révolutionnaire n’a rien de commun ni avec l’anarchie ni avec le désordre. Son but, au contraire, est de les réprimer, pour amener et affermir le règne des lois. Ce ne sont point les passions particulières qui doivent le diriger, c’est l’intérêt public. »
Les exagérés de toute espèce allaient être désignés plus directement encore. Comparant le gouvernement révolutionnaire à un vaisseau, Robespierre, droit et sec derrière la tablette de la tribune en faux marbre jaune et vert, poursuivit : « Il vogue entre deux écueils : la faiblesse et la témérité, le modérantisme et l’excès ; le modérantisme qui est à la modération ce que l’impuissance est à la chasteté, et l’excès qui ressemble à l’énergie comme l’hydropisie à la santé. » Sans doute, un excès de ferveur patriotique était-il préférable au « marasme de ce modérantisme qui a favorisé le gouvernement de Pitt et Cobourg en France, depuis cinq ans. Les cours étrangères ont vomi sur la France les scélérats habiles qu’elles tiennent à leur solde. Ils délibèrent dans nos administrations, s’introduisent dans nos assemblées sectionnaires et dans nos clubs ; ils ont siégé jusque dans la représentation nationale. »
Mais l’excès de patriotisme pouvait n’être aussi qu’un masque. Maximilien montra les ennemis de la liberté poussant aux exagérations contradictoires pour incendier la république, excitant le fanatisme dans la Vendée et la persécution des cultes à Paris, immolant Le Pelletier et Marat puis réclamant pour eux des honneurs divins, afin de rendre ridicules et odieux ces grands patriotes. « Le fanatique couvert de scapulaires et le fanatique prêchant l’athéisme, ont entre eux beaucoup de rapports. Les barons démocrates sont les frères des marquis de Coblentz, et quelquefois les bonnets rouges sont plus voisins des talons rouges qu’on ne pourrait le penser. »
Ce cinglant avertissement donné aux Hébertistes, Robespierre reprit ses distinctions : « Le gouvernement révolutionnaire doit aux bons citoyens toute la protection nationale, il ne doit aux ennemis du peuple que la mort. Ce n’est point dans le cœur des patriotes ou des malheureux qu’il faut porter la terreur. Nous ne savons haïr que les ennemis de la patrie. » Encore devait-on, là aussi, observer des différences : « La punition de cent coupables obscurs et subalternes est moins utile à la liberté que le supplice d’un chef de conspiration. »
C’était la thèse soutenue depuis longtemps par Claude qui insistait là-dessus auprès de Fouquier-Tinville et du Comité de Sûreté générale, aux réunions du soir. Maximilien également voulait ménager les petits coupables, effrayer les conspirateurs par d’illustres exemples. Aussi conclut-il en proposant d’envoyer sans retard au Tribunal révolutionnaire les personnages importants que l’on détenait encore : Diétrich, maire de Strasbourg, dont l’antipatriotisme et la sympathie aristocratique pour les Prussiens avaient indigné les représentants en mission ; tous les officiers généraux complices de Dumouriez, de Custine et de Houchard ; enfin les banquiers agents de l’Angleterre et de l’Espagne. Puis il demanda que les récompenses en biens nationaux, promises aux défenseurs de la patrie, fussent augmentées d’un tiers.
L’impression de ce rapport, son envoi aux départements furent acquis à une majorité considérable. Durement touchés, les Hébertistes ripostèrent plus rudement encore. Le soir même, aux Jacobins, Chaumette, fulminant contre les calomniateurs qui voulaient noircir devant le peuple les patriotes de la Commune, souleva les acclamations de l’assistance cordelière. Et le lendemain, à la Convention, comme Barère – tout en blâmant avec sévérité les « nouvelles traductions de Tacite » et l’indulgence de Desmoulins – rapportait un projet sur la composition du comité de justice demandé par Robespierre, Billaud-Varenne se leva. Sombre, violent, il effraya l’Assemblée en l’accusant de manquer d’énergie et de fermeté républicaine. Il la fit passer à l’ordre du jour sur la composition du comité. Puis, chargeant encore, se plaignant, menaçant, il disloqua la majorité, si bien que la Convention, en panique, rapporta son décret initial. Le comité de
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