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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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ils seront chassés. »
    À ce moment, Claude arriva, introduit par la servante Marie. Desmoulins se convulsa.
    « Co… comment oses-tu ! C’est toi qui… Tu nous… Tu es un traître !
    — Je te conseille de te taire, répondit Claude avec dédain. S’il y a ici un perfide, habitué à se retourner venimeusement contre ses amis, c’est bien toi. Quant à moi, voilà des semaines que je risque ma tête pour vous sauver, et je viens encore pour cela. Robespierre ne veut pas votre mort, je ne crois pas que Couthon ni Saint-Just la désirent non plus, mais personne maintenant ne peut plus vous disputer à ceux de nos collègues qui l’ont résolue. Fuyez, cachez-vous. Si vous ne le faites pas sur-le-champ, c’en est fini de vous. Les Comités sont convoqués pour entendre, ce soir, le rapport de Saint-Just. Panis vous confirmera la chose si vous n’avez pas confiance en moi.
    — Mais si, assurément, dit Danton. Je te remercie d’être venu, je sais que tu nous as défendus, avec Robespierre, contre Billaud et Collot. Je sais que tu n’es point ennemi de nos personnes. Seulement, vois-tu, mon bon Claude, certains seraient bien contents de nous voir lever le pied : cela ôterait du leur une belle épine. Si tu n’y as point songé, d’aucuns y ont peut-être pensé à ta place. Fuir, ce serait nous reconnaître coupables, ce serait renoncer à la bataille dans la Convention. Je tiens considérablement à la livrer, cette bataille-là. Je te garantis qu’elle fera des victimes. Peut-être ce ne sera pas nous. J’ai encore quelque chose là et là », acheva-t-il en se frappant successivement le front et la poitrine.
    Claude le considéra. Avec sa chaude laideur, sa voix entraînante, son génie de tribun et son vaste coffre, oui c’était encore un adversaire formidable, auprès duquel Saint-Just ne semblait pas de taille.
    « Écoute-moi bien, Danton, répondit Claude d’un ton solennel. Il n’y aura pas de bataille. Sieyès était au Comité lorsqu’on a décidé le rapport contre toi.
    — Sieyès ! s’exclama Delacroix.
    — En personne. Robespierre lui avait demandé de venir. Nous voulions connaître la position des hommes de la Plaine, sur lesquels tu comptes follement, Danton. Ils t’abandonnent. Sieyès a opiné pour le rapport. Avec qui te battras-tu contre la Montagne ?
    — Sieyès, ce fourbe !
    — Oui. Comprends-tu enfin qu’il te faut partir ?
    — Et où irais-je ? Quel pays me donnerait asile ? D’ailleurs emporte-t-on le sol de la patrie à la semelle de ses bottes ?
    — Belle phrase ! Mais ce n’est plus le temps d’en faire. Il ne te reste qu’à suivre l’exemple de Lanjuinais, de Pétion, de Louvet. Ils n’ont pas craint de fuir, eux. Ils se cachent et ils vivent. Imite-les, si tu ne veux subir le sort du malheureux Vergniaud.
    — Eh bien, non, ma foi, répliqua Danton en secouant avec colère sa grosse tête rougeaude et blonde. Non, je ne m’en irai pas. Si je ne puis me battre à la Convention, je me battrai au tribunal. Marat en est sorti triomphant. Moi aussi, j’ai de quoi confondre mes ennemis. On n’étouffera pas ma voix. »
    Sa voix de cuivre. Elle claironnait ce défi et il était redoutable. Si les Dantonistes ne comptaient plus guère de partisans à l’Assemblée, ils n’en manquaient pas dans Paris. Ils avaient pour eux désormais, outre les contre-révolutionnaires et les mécontents, les anciens Enragés, les anciens Hébertistes survivants et pleins de rancœur, les familles des détenus et tous ceux que la Terreur menaçait. Contre cette masse, heureusement incohérente, on ne pouvait compter, comme vrais patriotes, que sur une minorité, à présent bien organisée, d’ouvriers, d’artisans et de petits bourgeois.
    « Tant pis ! » dit Claude en reprenant son chapeau à boucle d’acier. « Adieu, Danton. » Il sortit brusquement, la gorge serrée. On le vit, par la fenêtre, traverser le jardin. Danton se rassit. « Je suis saoul des hommes, grogna-t-il. L’humanité est trop bête ! c’est à vous ôter l’envie de vous défendre. Ah ! je l’ai dit et je le répète : Malheur à ceux qui provoquent les révolutions, mais malheur à ceux qui les font ! »
    En vérité, il se sentait soudain décontenancé. Devant l’Assemblée, il pouvait compter sur son habileté d’orateur pour retourner complètement la situation, comme il l’avait fait lorsque les Brissotins s’étaient lancés furieusement à

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