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Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Titel: Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Claude Pomonti
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Xuân Ân en profite pour établir de solides relations avec Edward Lansdale, très influent même après son retour au Pentagone. Il rencontre régulièrement Nguyên Hung Vuong, qu’il dépanne à plusieurs reprises par la suite.
    En 1955, après les Accords de Genève et la partition du Viêt Nam en deux zones, Nguyên Hung Vuong est démobilisé. « Il fume alors beaucoup, y compris de l’opium, une habitude prise à l’école », se souvient Pham Xuân Ân. Il lit énormément. On le consulte mais il n’a pas d’emploi. Il est très pauvre.
    En 1960, Pham Xuân Ân introduit Nguyên Hung Vuong auprès de Douglas Pike, un influent universitaire américain. Douglas Pike l’engage comme assistant et Nguyên Hung Vuong commence à fréquenter le milieu interlope de la presse américaine. Il devient, dans la foulée, l’assistant d’un autre chercheur américain que Pham Xuân Ân connaît bien, Jerry Rose, diplômé de la Sorbonne. Ngyên Hung Vuong est ensuite recruté comme consultant par Time, puis le Washington Post. Il est présenté par Pham Xuân Ân à Robert Shaplen quand ce dernier se rend pour la première fois au Viêt Nam, en 1964, au lendemain du coup d’État contre le président Ngô Dinh Diêm et son frère Ngô Dinh Nhu, tous deux assassinés.
    Une dizaine d’années plus tard, en pleine guerre américaine, Nguyên Hung Vuong occupe, dans le troisième arrondissement de Sài Gòn, un deux-pièces en rez-de-chaussée qui donne sur une ruelle piétonnière grouillante de monde. S’étant mariés sur le tard, son épouse et lui-même ont adopté un garçon, devenu un adolescent et dont Nguyên Hung Vuong paraît être, à l’époque, le grand-père. Cette petite famille vit chichement dans un quartier populaire. En dehors de ses pipes d’opium, le seul luxe que s’offre Nguyên Hung Vuong est, lors des passages de Robert Shaplen, de louer une chambre climatisée dans un hôtel de troisième catégorie situé dans le bas de la rue Hai Ba Trung, à deux pas de l’hôtel Continental.
    Cette solution lui permet d’oublier le tintamarre de sa ruelle et de se retirer quand il le souhaite tout en demeurant facilement joignable.
    Nguyên Hung Vuong ne se fait aucune illusion sur l’issue du conflit et le dit. Sur ce point, son désaccord avec Robert Shaplen paraît profond. Pham Xuân Ân m’a raconté beaucoup plus tard qu’un beau jour, alors qu’au volant de sa Renault 4  CV , il conduit Nguyên Hung Vuong et Robert Shaplen au domicile de l’ambassadeur américain Ellsworth Bunker, les deux compères se disputent franchement. Le premier lui demande d’arrêter le véhicule et en descend. « Nguyên Hung Vuong était furieux », se rappelle Pham Xuân Ân. Mais cette énième dispute n’a pas fait long feu. Il est vrai, m’a dit Pham Xuân Ân, que Nguyên Hung Vuong a entretenu des relations tout aussi orageuses avec Douglas Pike. Longtemps après la mort de Nguyên Hung Vuong aux États-Unis, où il s’était réfugié, Pham Xuân Ân a résumé ainsi un personnage qu’il a connu mieux que tous : « Il était très intelligent, indépendant d’esprit, dilettante et toujours en retard. »
    Pham Xuân Ân n’oublie jamais ses amis de l’époque. À la veille de la victoire communiste, la plupart s’envolent vers d’autres cieux. Dans les semaines qui suivent, il ressent un vide. Au cours d’un dîner à Bangkok en 2005, le benjamin des fils de feu Cao Giao m’a dit qu’après la libération de son père en 1983, Bac Ân, l’oncle Pham Xuân Ân, venait presque tous les jours leur rendre visite, comme s’il voulait protéger un ami. Pham Xuân Ân ne m’en avait jamais parlé. Quand je lui ai rapporté ces propos, lors de l’un de mes passages à Sài Gòn, il a affiché un sourire triste : « Qui aurait osé rendre visite à Cao Giao à sa sortie de prison ? Personne. De toute façon, il avait besoin d’une piqûre quotidienne. Je me suis transformé en infirmière. »

Chapitre 6 Le « roi de la jungle »
    À une époque où j’étais encore persona grata à la présidence sud-vietnamienne, Hoang Duc Nha, un cousin du président Nguyên Van Thiêu devenu son conseiller et ministre de l’Information, m’a montré, au Dinh Dôc Lâp, le palais présidentiel, une poignée de télex pirates installés dans une salle attenante à son bureau. Ce qui lui permettait de lire, au départ et sans attendre une publication, la copie brute des dépêches

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