Une histoire du Canada
canadien.
La Grande-Bretagne n’en conserve pas moins la responsabilité de la défense et des affaires étrangères. en gage de la première, c’est un officier britannique qui commande la milice canadienne, ainsi qu’une petite force permanente. sans exercer de contrôle sur ses relations extérieures, la Canada parvient néanmoins à faire entendre ses préoccupations au sein de l’empire.
Le gouvernement britannique décide donc de nommer Macdonald à un des trois postes de commissaires qui se rendent à Washington pour régler les questions en suspens sur le plan de la diplomatie anglo-américaine. La plupart de ces questions sont liées aux doléances américaines concernant le comportement des Britanniques pendant la guerre de sécession.
et ces doléances sont vraiment réelles. Les Britanniques ont autorisé les Confédérés à construire des bateaux corsaires marchands comme l’ Alabama dans des chantiers navals britanniques. On se souviendra du raid sur st. alban en 1864 et d’autres incidents mineurs de déprédations frontalières. d’autre part, on se souvient aussi des coûteuses incursions des Fenians au Canada, sans nul doute le résultat de la négligence des agents américains. Les américains se plaignent de la politique des pêches du Canada, qui restreint la présence de bateaux de pêche américains dans les eaux canadiennes ; de leur côté, les Canadiens veulent la restauration du traité de réciprocité. en réalité, Macdonald espère se servir de l’accès aux zones de pêche canadiennes comme appât pour amener les américains à rétablir la réciprocité. Officieusement, le sénateur républicain du Massachusetts, Charles sumner, laisse entendre que l’on pourrait tout simplement régler l’ensemble de ces différends en cédant le Canada aux états-Unis en échange de la renonciation des américains à leurs revendications vis-à-vis de la Grande-Bretagne.
il n’en sera jamais question, mais de réciprocité non plus. Les Britanniques font plutôt preuve de générosité en versant des indemnisations pour l’ Alabama et des revendications connexes, tandis que les américains louent un droit d’accès aux zones de pêche canadiennes pour dix ans, à un coût qui sera déterminé par voie d’arbitrage. On oublie tout simplement les pertes attribuées aux Fenians et toutes ces dispositions sont incluses dans un traité signé à Washington.
9•expansioneTdésillusion,1867–1896
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Macdonald saisit toute l’importance de cet événement. il éprouve de l’amertume face à l’abandon, par les Britanniques, des intérêts canadiens pour atteindre leur objectif plus vaste, celui de rétablir des relations pacifiques et harmonieuses avec les états-Unis. Bien que, dans un certain sens, il y ait eu trois pays autour de la table de négociation, seuls les deux plus grands en ont décidé de l’issue. Le rôle du Canada se limitait à ne pas faire obstruction.
La leçon à en tirer est que l’empire britannique n’est pas une association offrant des occasions égales à tous. Une colonie comme le Canada n’est peut-être plus subordonnée, mais elle n’est manifestement pas l’égale de la Grande-Bretagne. Les ministres britanniques peuvent tenir compte des besoins des colonies, voire y accéder, mais ceux-ci n’ont ni la consistance, ni l’urgence, ni l’importance des intérêts strictement britanniques. Quoi qu’il en soit, si jamais les relations entre les états-Unis et la Grande-Bretagne se détériorent à nouveau, si les négociations ne peuvent permettre de régler les problèmes en suspens, les intérêts canadiens au sens large vont en souffrir3.
Mais le Canada aurait-il pu mieux tirer son épingle du jeu s’il avait négocié seul ? Comme Macdonald le sait très bien, la réponse est négative et, comme le montre la proposition à moitié sérieuse de sumner d’annexer le Canada, l’enjeu était plus grand que la discussion de questions d’importance limitée. Peut-être les américains n’apprécient-ils guère ce qu’ils perçoivent de l’empire britannique, mais l’empire représente une puissante entité, dont il faut tenir compte4. On ne peut dire la même chose du Canada.
en tout état de cause, Macdonald doit garder à l’esprit qu’il a besoin de l’argent des Britanniques pour garantir l’avenir du Canada, si avenir il y a. il en a besoin pour le chemin de fer intercolonial reliant Québec à Halifax, ainsi que pour
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