Une histoire du Canada
français, dans les milieux intellectuels et ceux que l’on qualifiera plus tard de « progressistes », la cause des rebelles suscite beaucoup d’enthousiasme. Mais les Britanniques les plus libéraux et modérés rebutent aussi à s’indigner devant leurs cousins transatlantiques.
Comme le soulignera l’historien américain david Hackett Fischer, les Whigs anglais « ne peuvent écraser la résistance américaine sans trahir les valeurs que, selon eux, le gouvernement représente6 ».
Le gouvernement britannique bénéficie encore d’une année, 1777, pour mettre un terme à la rébellion avant que les intérêts français se transforment en interférence française. Les tentatives d’établir une stratégie cohérente se heurtent aux difficultés de communication, au fait qu’il faut compter des semaines avant que l’information traverse l’atlantique ou se rende même de Québec à new York. Mais le souvenir de la guerre précédente contre les Français – quand trois armées ont convergé vers Montréal pour forcer l’armée française à se rendre – demeure frais à la mémoire. Cette fois-ci, le gouvernement britannique prévoit utiliser ses bases à Montréal, new York et les forts des Grands Lacs pour lancer une attaque sur trois fronts contre albany et la vallée du fleuve Hudson. s’il y parvient, les colonies seront scindées en deux et le centre de la rébellion, la nouvelle-angleterre, sera isolé des autres colonies.
Pour cela, tous les éléments doivent se mettre en place en même temps ; une fois donnés, les ordres doivent demeurer tels quels et être respectés. Mais ce n’est pas le cas, de sorte que le plan tombe à l’eau. L’armée du nord, placée sous les ordres du général John Burgoyne, doit compenser les occasions manquées l’année précédente. elle avance lentement et méthodiquement vers le sud et albany, laissant aux rebelles assez de temps pour rassembler leur propre grande armée. L’armée du sud, commandée par le général Howe, ne bouge pas du tout et quand elle finit par le faire, elle prend la mauvaise direction, contournant le new Jersey par la mer en direction de Philadelphie, la capitale rebelle. Howe s’empare de Philadelphie en septembre sans rencontrer trop de difficultés, mais n’est pas certain de ce qu’il doit en faire ensuite. Quoi qu’il en soit, cette prise est totalement inutile pour son collègue Burgoyne, qui a besoin d’aide. Harcelé et entouré par les rebelles, Burgoyne est obligé de se rendre à saratoga en octobre.
Une troisième force britannique, constituée de soldats de métier et d’alliés amérindiens, connaît elle aussi la défaite à bonne distance d’albany.
Cette victoire inutile et ces deux sérieux revers ont des conséquences désastreuses pour la cause britannique. sur le plan diplomatique, les 98
UnE HIsTOIRE dU Canada
nouvelles en provenance de saratoga encouragent le gouvernement français à signer une alliance avec les rebelles au début de l’année 1778. Une guerre s’ensuit, au cours de laquelle une flotte française nettement améliorée conteste la maîtrise des Britanniques sur les mers et force le gouvernement britannique à ramener des ressources navales d’amérique du nord dans les eaux européennes. Les Britanniques évacuent Philadelphie en 1778 et battent en retraite vers new York. Quand, en 1779, l’espagne entre en guerre à son tour, la position stratégique de la Grande-Bretagne se détériore encore.
Le gouvernement britannique fait une tentative, tardive, pour réconcilier les colonies avec l’empire. en 1778, une Declaratory Act accède à ce qui constituait la principale revendication des colonies : le Parlement concède solennellement le droit de lever des impôts aux colonies. Les recettes perçues dans les colonies doivent donc être dépensées dans les colonies et non plus réquisitionnées à des fins impériales. Cette loi ne demeure pas tout à fait lettre morte puisqu’elle est directement applicable aux colonies qui demeurent des possessions britanniques, soit la nouvelle-
écosse et le Québec. elle deviendra plus tard un principe fondateur d’un empire renouvelé, mais elle ne permet en rien de récupérer les colonies perdues d’amérique.
en amérique du nord, les rebelles ne sont pas en mesure d’attaquer les Britanniques à new York, n’ont pas la puissance maritime nécessaire pour menacer la nouvelle-écosse et ne peuvent se passer de troupes
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