Une histoire du Canada
et les subventions, ou plutôt le manque de subventions. et s’ils obtenaient les deux, si les méthodistes cessaient de se sentir exclus pour être associés plus étroitement à leurs cousins britanniques ? ne pourrait-on y voir ?
L’administration coloniale choisit de ravaler partiellement sa fierté.
Les membres britanniques de la secte méthodiste wesleyenne se sont révélés être tout sauf radicaux en politique ; ils constituent en réalité un rempart pour la constitution britannique. On les invite donc à venir au Canada, où ils apportent la respectabilité sur le plan politique aux méthodistes canadiens, originaires des états-Unis. saisissant l’occasion, les méthodistes du Haut-Canada, dirigés par egerton ryerson, accordent leur appui au gouvernement. Comme l’explique ryerson, il y a à cela « une raison simple et suffisante : l’exercice du gouvernement à leur égard a changé fondamentalement ». il est facile de jumeler la bienséance en religion avec 164
UnE HIsTOIRE dU Canada
un engagement envers l’ordre en politique, au moins tant qu’on ne permet pas à l’institution anglicane de provoquer les évangéliques.
Ce n’est pas une mince affaire. sir John Colborne en particulier est déterminé à bien traiter les anglicans et, à titre de cadeau de séparation à la province – il est en voie d’être congédié par un secrétaire au colonies en colère – il concède quelque quatre-vingt-dix mille hectares de terres à vingt-quatre presbytères anglicans. Ce faisant, Colborne annule en partie le bien résultant du rapprochement avec les méthodistes et contribue à la confrontation finale entre le gouvernement et les radicaux.
C’est son successeur, sir Francis Bond Head, qui déclenche cette confrontation. Head commence par tâcher de se concilier l‘opinion publique en nommant des réformateurs modérés, dont robert Baldwin, à son conseil exécutif. il poursuit en faisant fi de leurs conseils, ce qui précipite la démission non seulement des réformateurs mais de tout le conseil. il affronte ensuite la Chambre d’assemblée, avec le même résultat.
Confronté à l’impasse avec l’assemblée, Head la dissout et déclenche des élections générales ; en cours de campagne, le lieutenant-gouverneur fait personnellement la tournée générale de la province et dénonce le manque de loyauté de ses ennemis. il peut compter sur le soutien d’une coalition inhabituelle : des méthodistes modérés, des propriétaires fonciers locaux comme le colonel thomas talbot, l’ordre d’Orange, hostile aux catholiques (formé d’immigrants irlandais récents), et le clergé catholique qui, tant au Haut qu’au Bas-Canada, se range résolument du côté du pouvoir légitime40.
(Les Orangistes sont tellement impressionnés par cette manifestation de loyauté catholique qu’ils annulent leur défilé anti-catholique annuelle du 12 juillet qui commémore la victoire protestante de 1690 en irlande.) sans surprise, les élections de 1836 débouchent sur une majorité en faveur du gouvernement.
Head a sa majorité, mais cela ne se traduit pas par la stabilité politique. dépourvu de leur seule arme utile, le pouvoir de faire obstruction aux plans du gouvernement en entravant l’assemblée législative, les radicaux dirigés par Mackenzie s’orientent vers la rébellion. ils établissent l’attirail révolutionnaire habituel de comités de correspondance, de conseils secrets et autres organes du genre et font marcher leurs partisans au pas dans les champs des agriculteurs au nord de toronto pour les préparer au soulèvement à venir. Le gouvernement a de la chance que ce soit Mackenzie qui dirige les rebelles car, le moment venu de passer aux actes, il se révèle irrésolu et incompétent41.
Head met tout en œuvre pour égaliser les chances : il envoie la petite garnison de troupes régulières de la province aider à résoudre la crise plus grave qui sévit au Bas-Canada. Les forces de l’ordre et les rebelles 7•TransformaTionseTrelaTions,1815–1840
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radicaux sont désormais commandés par leur auteur d’opuscules respectif.
afin d’inspirer ses sympathisants, Mackenzie prépare une « déclaration d’indépendance » et, pour la bonne mesure, leur promet des terres et des avantages non définis, qui seront confisqués aux partisans tories du gouvernement. Cela ne suffit pas. Mackenzie n’aura jamais assez de sympathisants et, quand bien même il les
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