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Une irrépressible et coupable passion

Une irrépressible et coupable passion

Titel: Une irrépressible et coupable passion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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Gaieties. »
    Judd sentit sur lui le regard de Lora et se retourna vers
elle.
    « Tu sais pourquoi le cyclisme est un sport
propre ? »
    La petite, désarçonnée, demeura bouche bée.
    « Parce qu’il y a une voiture-balai. »
    Lorraine pouffa.
    « Comment étaient les cheveux de saint Anatôle ?
    — Je ne sais pas, avoua-t-elle, amusée.
    — Ondulés. »
    Elle s’esclaffa.
    « Comme les vôtres !
    — Et où est-ce que les généraux camouflent leurs
troupes ? »
    Lora sourit, dans l’expectative, intriguée, et Judd
reprit :
    « Dans le fond de leur tanpalon ! »
    Lorraine éclata de rire à en perdre haleine et Ruth sentit
la main de Judd chercher la sienne sous la nappe. Elle la prit et se détendit à
la faveur de ce déjeuner au calme, tandis que l’homme qu’elle aimait charmait
Lora par sa loufoquerie.
    « Qu’est-ce qui a le derrière en haut ?
    — Oh là là… lâcha Lorraine, dans l’expectative, avec un
grand sourire.
    — Tes jambes. »
    La fillette fut prise de hoquet.
    « Et pourquoi les cambrioleurs mettent-ils des
patins ?
    — Je sais, intervint Ruth. Pour disparaître sans
laisser de traces ? »
    Elle pressa la main de Judd et il sourit.
    « Elle est drôlement fortiche, hein, ta
mamounette ? »

 
Chapitre 4
ÉPERDUS D’AMOUR
    Ruth confessa à Judd qu’elle fréquentait d’autres hommes.
Mais il était si souvent en déplacement, et pendant si longtemps, qu’elle
virait cinglée chez elle, avec le vieux crabe dans les pattes, en train de
râler – et puis, il y avait toujours des gogos avenants pour la remarquer,
et elle aimait s’amuser.
    Elle avait enfilé un kimono bleu nuit en soie après leurs
ébats de l’après-midi et, assis dans leur lit du Waldorf-Astoria, Judd faisait
les mots croisés du New York Times. Avec plus de curiosité que de
jalousie, il laissa retomber le journal et s’informa :
    « Qui ?
    — Oh, un tas de gars, affirma-t-elle, en souriant. Je
suis passée sur plus de paires de genoux qu’une serviette de restaurant. »
    S’avisant de sa contrariété, elle ajouta :
    « Ne t’en fais pas, mon mignon. Il n’y a personne
d’autre que toi avec qui je fasse “œuvre de chair” », le rassura-t-elle,
toujours avec le sourire, reprenant son expression.
    Elle lui raconta que Kitty Kaufman et elle allaient encore
déjeuner avec Harry Folsom au Henry’s, quand Judd était en tournée. Et certains
amis d’Harry insistaient parfois pour que les filles les accompagnent au
21 Club ou au Club de Vingt. Comme l’ex de sa cousine était agent
de police dans le Bronx, elle avait aussi rencontré beaucoup de policiers par
son entremise. Elle avait même fait une virée jusqu’à West Point dans le
roadster décapotable d’un inspecteur corpulent. Elle ne se rappelait plus son
nom – Peter quelque chose –, mais il était tordant. Elle flirtait
avec les commis au comptoir à soda du drugstore Spindler et le pharmacien frais
émoulu de l’école rosissait de désir chaque fois qu’elle lui accordait un
regard. Par une lourde après-midi, alors qu’elle longeait l’hôpital
psychiatrique de Creedmoor, elle s’était également retrouvée à discuter avec un
surveillant en uniforme blanc à travers les barreaux de la grille. Elle lui
avait dévoilé qu’elle était fascinée par les fous et il s’était retourné vers
une fille sur un banc, qui agitait les mains devant son visage comme si elle
était la proie des mouches, puis il avait acquiescé, oui, ils sont très
honnêtes quant à ce qu’ils ressentent. Et Ruth n’avait eu d’autre choix que de
se laisser embrasser. Johnny. Johnny, il aurait fait n’importe quoi pour elle.
    « Ils sont si… avides, tous autant que les autres.
C’est comme s’ils n’en avaient jamais assez.
    — Ils ne peuvent pas y faire grand-chose. C’est
biologique. Tu es incroyablement belle.
    — Mais je plains vraiment les hommes. Ils sont toujours
en manque. »
    Judd trouvait étrangement excitant et valorisant d’imaginer ces
loups, ces chacals innombrables tournant autour de sa maîtresse, la courtisant,
la désirant, lui obéissant servilement, tandis qu’elle se réservait rien que
pour lui. Mais en janvier 1926, il lui apparut peu à peu que c’était elle qui
avait l’ascendant. Ce furent d’abord les lettres de Ruth qui se firent
irrégulières. Tantôt, quatre l’attendaient à son hôtel de Buffalo, tantôt il
n’avait aucune nouvelle de tout son séjour

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