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Une tombe en Toscane

Une tombe en Toscane

Titel: Une tombe en Toscane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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sèches d'amants rompus de volupté s'étaient trempées, à ces urnes vides couvertes de bustes, pouvait-il demander le chemin de toute vie ? Il le pensait. Par eux, il voulait réapprendre ses origines. Par eux, la mort paraissait dépassée et vaine, puisque pouvait se transmettre, avec le soutien de l'imagination, tout ce qui avait animé les temps révolus.
     
    Jean-Louis demeura dans le musée jusqu'à la nuit. Le garde, qui ne paraissait pas se soucier de l'heure de la fermeture, respectait sa méditation. Quand il rejoignit Anne, sur la petite place où il avait rangé la voiture, elle lui sourit d'un sourire grave parce qu'elle savait que son compagnon approchait lentement de lui-même.
     
    Sur la route de Sienne, il annonça son prochain départ.
     
    – Je ne pense pas être absent longtemps, dit-il, je dois régler certaines choses, mais je reviendrai et je pense m'installer à Chiusi, si l'ami de votre père accepte toujours des pensionnaires. J'aimerais étudier les Étrusques sur place.
     
    – Je m'occuperai de tout, assura la jeune fille. Quand vous reviendrez, tout sera prêt.
     
    Ce même soir, il fut invité à dîner chez Carlo et pour se rendre à l'invitation il revêtit le costume acheté à Florence. Habillé, devant la glace de sa chambre, il eut un sursaut en découvrant un Jean-Louis inconnu. Le pantalon clair, la veste de sport et la cravate colorée achevaient une transformation plus profonde. À Sienne, il avait un peu maigri et sa peau avait perdu sa pâleur grise. Sous un bronzage léger, les cernes des yeux avaient disparu. Il se trouva à la fois plus jeune et plus vieux.
     
    Jean-Louis n'avait jamais été considéré comme un beau garçon. Sa taille ne dépassait que de peu la moyenne et il avait toujours envié la minceur souple de son père, beaucoup plus grand que lui. Ils avaient tous deux les yeux d'un bleu très clair et le même nez assez fort, aux ailes fines et bombées. Jean-Louis avait la bouche plus épaisse que son père, les lèvres plus colorées, mais leurs mentons étaient identiques, carrés et plats, ce qui conférait à leur physionomie une certaine dureté plus apparente chez le père dont les joues offraient une surface plate des tempes au menton.
     
    Un an plus tôt, Jean-Louis, qui cependant soignait toujours sa mise, ne se serait pas attardé devant une glace. Maintenant, il s'observait minutieusement, comme s'il cherchait sur sa personne la trace des modifications intérieures.
     
    Quand il entra dans le bureau de Carlo, qui lui était désormais familier, le vieux gentilhomme lui sourit.
     
    - L'air de Toscane vous réussit bien, dit-il.
     
    Puis il ajouta, sans comprendre quelle secrète flamme de plaisir il allumait au cœur de son visiteur :
     
    – Jamais vous n'avez autant ressemblé à votre père.
     
    Le dîner fut très gai. Pietro venait de réussir un examen difficile et son exubérance, augmentée par sa satisfaction, le conduisait à une sorte d'ivresse. C'était un grand garçon osseux, encombré de ses bras qui paraissaient démesurés comme les jambes des poulains.
     
    - Vous êtes toscan maintenant, vous ne pouvez manquer de revenir et comme je vais partir à l'École d'architecture de Rome, mon père sera heureux de vous avoir pour bavarder.
     
    - Mais je reviendrai sûrement bientôt, dit-il en regardant Anne, je crains bien de ne pouvoir désormais rester longtemps loin de Sienne.
     
    Carlo et sa fille échangèrent un sourire, comme si une discrète complicité unissait le père et la fille.
     
    Le lendemain Anne accompagna Jean-Louis à la gare. Il devait prendre le train pour Rome, où il aurait un avion pour Paris. Sur le quai, avec sa valise et son costume gris, dans lequel il se sentait un peu mal à l'aise, Jean-Louis fut saisi d'une crainte. Il redoutait de quitter cette ville et cette jeune fille, il craignait de ne plus les trouver telles qu'il les laissait l'une et l'autre. Et puis, à l'instant de la séparation, il découvrait qu'une grande tendresse le poussait vers Anne et, sans même réfléchir à la façon dont il pourrait le lui dire parce que l'horloge de la gare le pressait, il se tourna vers elle.
     
    - Anne, dit-il, quand je reviendrai, plus tard, bien plus tard, accepteriez-vous de m'épouser ?
     
    Avant qu'elle ait eu le temps d'esquisser une réponse, il bredouilla des excuses pour la façon dont il faisait cette déclaration.
     
    Anne n'avait pas paru étonnée. Elle eut un sourire

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