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Une veuve romaine

Une veuve romaine

Titel: Une veuve romaine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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tour. Ils étaient venus dans l’espoir de rencontrer le préteur. Or la dernière chose que je souhaitais moi, c’était perdre mon temps dans un entretien avec un magistrat mortellement ennuyeux. Chaque préteur dispose d’un commis. Et les plaideurs sont tellement délicats à manier que ces commis sont en général très habiles. J’étais donc venu dans l’intention de parler avec le commis.
     
    Je le découvris dans l’ombre profonde d’un jardin intérieur. Il faisait si chaud qu’il était venu s’y installer avec un tabouret pliant, afin de profiter d’un peu d’air frais. Il arborait un bronzage étonnant qui donnait l’impression d’avoir été peint sur lui. C’était sans doute le résultat d’une semaine entière passée à travailler dans les vignes. Il ne m’échappa pas qu’il portait une grosse bague munie d’un sceau, des chaussures rouges pointues, et une tunique d’un blanc éclatant. Il avait l’air aussi malin que je l’espérais.
    Comme je m’y attendais, après une longue matinée avec des fils de sénateurs qui s’étaient rincé l’œil dans des bains publics exclusivement réservés aux femmes, et des grands-mères qui tenaient à dresser l’historique des trois générations précédentes pour expliquer pourquoi elles avaient volé quatre œufs de cane, il fut heureux de repousser son tas de pétitions pour bavarder avec moi. Je commençai par me présenter, et il m’indiqua que son nom était Lusius.
    — Lusius, j’ai des clients qui sont inquiets au sujet d’une épouse professionnelle. Son prénom est Severina, et j’ignore son nom de famille.
    — C’est Zotica, je présume ! répondit-il abruptement.
    Il devait commencer à penser que j’étais venu lui faire perdre son temps.
    — Tu te souviens d’elle. Que les dieux en soient remerciés. Voilà ce que j’appelle être efficace.
    — Je me la rappelle très bien, grogna-t-il. (Et il semblait soudain content de cette occasion d’exprimer sa rancœur.) Elle a eu trois maris, tous morts dans différents quartiers de la ville. J’ai donc eu affaire avec un trio d’édiles désorganisés, qui m’ont envoyé des renseignements incomplets quatre semaines après ma demande. J’ai également reçu une lettre du bureau du censeur, dans laquelle tous les noms étaient estropiés. Au bout du compte, c’est moi qui ai été obligé de compléter les documents pour Corvinus.
    — Je vois que tu n’as pas un travail facile, dis-je, en faisant semblant de le plaindre. Alors que peux-tu m’apprendre ?
    — Que veux-tu savoir ?
    — En gros, si elle les a occis.
    — Oh ! pour moi, ça ne fait aucun doute !
    — Ton patron en a pourtant jugé autrement.
    Là-dessus, Lusius exprima succinctement, mais clairement, ce qu’il pensait dudit patron. C’était, à vrai dire, une opinion commune aux commis de tous les préteurs.
    — L’honorable Corvinus, affirma-t-il, ne reconnaîtrait pas un furoncle sur sa propre fesse.
    Ce Lusius commençait à me plaire. Il paraissait lucide, et vivait dans le même monde que moi.
    — Tu veux bien me raconter toute l’histoire ?
    — Pourquoi pas ? s’exclama-t-il, en étendant ses jambes devant lui et en croisant les bras. (Il parlait sur le ton de quelqu’un qui pense qu’il travaille assez dur pour avoir le droit d’exprimer sa vraie pensée de temps à autre.) Oui, pourquoi pas ? Severina Zotica…
    — Elle est comment ?
    — Elle n’a rien de spécial. Mais les femmes qui causent le plus de dégâts apparaissent souvent banales à ceux qui ne sont pas tombés sous leur coupe. (J’acquiesçai d’un hochement de tête.) C’est une rouquine, ajouta-t-il.
    — J’aurais dû m’en douter !
    — Elle a été importée très jeune du grand marché d’esclaves de Délos, mais elle n’y a pas abouti directement. Née à Thrace, d’où la couleur de ses cheveux, elle est passée entre les mains de différents maîtres avant de débarquer à Délos : Chypre, l’Égypte, et aussi la Mauritanie, je crois.
    — D’où tiens-tu tous ces renseignements ?
    — À un certain moment, j’ai eu besoin de l’interroger. Une sacrée expérience ! énonça-t-il. (Il ne donna cependant aucun détail, et je remarquai que son visage s’était fermé.) Quand elle est arrivée en Italie, elle a été achetée par un enfileur de perles qui avait sa propre boutique et qui s’appelait Severus Moscus. Autant que je sache, c’était un type pas

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