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Vengeance pour un mort

Vengeance pour un mort

Titel: Vengeance pour un mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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déjeuner à la lueur d’une bougie.
    Éprouvant toujours un sentiment d’oppression, Raquel sortit de la maison, trouva la petite cabane au fond du jardin et se rendit ensuite dans la cour pour s’y laver. Le contact de l’eau froide du puits sur son visage, son cou et ses bras lui éclaircit les idées. Le cri de la chouette avait cédé la place aux piaillements des oiseaux qui se cachaient pendant la nuit et, soudain, l’odeur entêtante du pain qui cuisait dans le four extérieur emplit l’air et chassa les dernières terreurs de la nuit.
    Lorsque Raquel rentra, Francesca lui sourit d’un air timide et lui tendit un linge. Quand elle se fut essuyée et eut remis de l’ordre dans ses habits, Francesca déposa devant elle une grosse miche de pain, ainsi qu’un fromage de chèvre et un panier de fruits. Pendant que Raquel mangeait, Francesca sortit du four plusieurs miches qu’elle plaça sur la table dans l’attente des autres convives.
    — Vous n’avez personne pour vous aider ? demanda Raquel.
    Francesca fit signe que non.
    — Rien qu’une gosse de dix ans, et en ce moment elle est auprès de sa mère, qui est malade. La peste a fait tant de victimes qu’il est difficile de trouver des serviteurs, surtout au prix que nous pouvons payer. Oh, je ne me plains pas, mais Johan a du mal à s’en tirer au moment de la moisson avec seulement quelques journaliers. Mais mon aîné, Robert, il a près de cinq ans et il sait déjà beaucoup de choses, ajouta-t-elle avec fierté. Il pourra bientôt aider son papa.
    — J’aimerais pouvoir faire quelque chose pour vous.
    Francesca eut un sourire d’impuissance et ne répondit pas.
    La porte s’ouvrit et des hommes entrèrent.
    — Merci pour cet excellent déjeuner, maîtresse. Je reviens dans un instant.
    — La bonne journée, maîtresse Francesca, lança Astruch en lançant un regard appréciateur à la table. Quel beau spectacle !
     
    — Papa, dit Raquel quand elle rencontra son père alors qu’il achevait de dire ses prières du matin, j’aimerais faire quelque chose pour Johan et sa femme. Leur existence est pénible, ici.
    — Que proposes-tu ?
    — Ils pourraient faire bon usage d’une pièce d’étoffe pour se vêtir ainsi que leurs enfants. J’en ai ici sur quoi j’allais travailler, mais je peux en racheter à Perpignan.
    — Ne serait-il pas plus utile de lui laisser une médication pour la toux de son bébé ? Donne-lui-en plein – ils prennent beaucoup de risques pour nous. Quant aux étoffes, j’en parlerai à Astruch. Il en a apporté de grandes quantités qu’il tient à montrer aux marchands avant de les laisser à sa fille. Plus qu’elle n’en a besoin. Regarde dans le panier et vois ce qui pourrait convenir à une famille comme celle-ci.
     
    La lune décroissante était encore assez haut pour éclairer la route quand le petit groupe parti de Gérone quitta la ferme. Francesca, sur le pas de la porte, serrait contre elle le paquet épais que lui avait remis Astruch. Il contenait du linge fin pour faire des sous-vêtements et de la laine pour tricoter des habits chauds : il y avait là plus d’étoffe qu’elle n’avait jamais rêvé en posséder. Sur l’étagère de la cuisine, un panier était rempli de diverses potions, toutes soigneusement étiquetées, car Francesca connaissait assez ses lettres pour les déchiffrer. Johan, les gardes et les serviteurs avaient sellé les chevaux et les mules ; ils avaient également attelé les bêtes de trait aux charrettes. Tous les animaux s’engagèrent sur le chemin tandis que de doux murmures d’encouragement cherchaient vainement à leur imposer le silence. La jument de Yusuf hennissait d’impatience et secouait sa crinière. Sa bride cliquetait dans le silence matinal. Vouloir la faire taire était inutile.
    — Nous aurions dû attacher de la paille à leurs sabots, murmura Astruch.
    Duran haussa les épaules et continua de marcher. Personne d’autre ne répondit.
    Quand ils furent tout près de la grand-route, Astruch se mit en selle et les autres l’imitèrent. Ils partirent en silence, enveloppés dans leurs capes sombres, les yeux rivés sur le sol, et ce jusqu’à ce qu’ils eussent dépassé la maison du voisin.
    — Le ciel s’éclaircit à l’est, dit Astruch quand ils abordèrent la route.
    Comme à un signal, ils se mirent tous à bavarder.
    — Je n’ai jamais eu aussi peur de ma vie, dit Bonafilla.
    — Tu n’as rien à craindre.

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