Victoria
une résidence irlandaise. Car Victoria est aussi la souveraine du Royaume-Uni, reine de Grande-Bretagne et d’Irlande, en vertu de l’Acte d’union de 1800, qui prit effet le 1 er janvier 1801. Depuis cette date, le drapeau national est l’Union Jack, qui réunit la croix de Saint-Patrick à celles de Saint-André et de Saint-Georges.
Cependant, la question est d’autant plus complexe que l’Irlande est gouvernée par un lord-lieutenant, c’est-à-dire un vice-roi. Lord Russell étudie la possibilité d’abolir cette fonction pour pouvoir fusionner les administrations irlandaise et impériale. Victoria promet à son Premier ministre que si ce projet se réalise, elle se rendra régulièrement en Irlande et conservera la résidence vice-royale du château de Dublin, à Phoenix Park, comme palais royal.
Dans l’immédiat, il est décidé que la reine se rendra en Irlande cette année. Ainsi, les événements de 1848 n’auront fait que retarder la visite de quelques mois.
« Je vous écris une fois de plus, confie Victoria à Léopold le 30 décembre 1848, dans cette étrange et très terrible année, mais je ne dois pas m’inclure moi-même, ni mon pays, dans les infortunes de l’année qui se termine. »
Il est vrai que le Royaume-Uni a été remarquablement épargné par les secousses telluriques de l’ annus mirabilis des révolutions. Pourtant, ses peuples comptent parmi ceux qui ont subi les plus grandes souffrances. Sir Robert Peel exprime l’opinion de la reine et du prince lorsqu’il déclare, dans un discours aux Communes, que cela est dû à l’inauguration du libre-échange, qui a eu pour effet de détaxer et de libérer le commerce des denrées alimentaires.
Que le prince Albert et Sir Robert Peel se soient liés d’amitié n’est pas étranger au revirement politique de ce dernier en faveur du libéralisme. Cette doctrine économique est partie prenante d’une vision plus large visant à inscrire le pays dans un fraternel concert des nations. La volonté d’entente cordiale avec la France et le voyage en Allemagne, malgré ses fausses notes, étaient des démarches délibérées dans ce sens.
Victoria, sous l’impulsion d’Albert, aspire à faire des relations internationales sa spécialité. Ainsi s’explique leur indignation à l’égard de Palmerston. Le ministre des Affaires étrangères est loin d’entretenir avec eux les rapports amicaux d’un Melbourne ou d’un Peel. La constance qu’il met à négliger de les consulter ou même de les avertir montre assez qu’il considère la souveraine comme un simple mandarin. Une telle désinvolture est contraire à l’esprit de la Constitution britannique.
Victoria et Albert ne doutent pas que l’hostilité politique de Palmerston envers la famille d’Orléans soit la cause de l’affaire des mariages espagnols, qui a mis fin à l’entente cordiale. Ils voient dans la question du Schleswig-Holstein les prémices d’une unité de l’Allemagne autour de la Prusse ; Palmerston soutient le Danemark. Victoria et Albert sont favorables à l’Autriche ; Palmerston complote en faveur de l’unité de l’Italie. Il est allé jusqu’à détourner, dans la plus secrète illégalité, des armements de l’arsenal de Woolwich pour les envoyer aux rebelles siciliens.
Homme d’intrigue, Palmerston mérite de périr par l’intrigue. Désespérant de se faire entendre à ce sujet par le Premier ministre Lord Russell, Victoria et Albert se concertent avec Sir Robert Peel sur les moyens d’écarter Palmerston du pouvoir. Une cabale se forme autour de l’ancien ministre des Affaires étrangères, Lord Aberdeen, Lord Astley et Lord Brougham, pour chasser Palmerston du Foreign Office. En vieux renard, « Old Pam » évente le piège in extremis.
Les divergences de vues entre la cour et Palmerston sont diplomatiques plus encore que politiques. Elles se sont manifestées dès l’arrivée du prince, dix ans auparavant, sur la question de la méthode à employer avec Méhémet-Ali. Albert prônait la conciliation à longueur de mémorandums, tandis que Palmerston se distinguait par une impétuosité de va-t-en-guerre.
Au début de l’année 1849, la Grande-Bretagne se félicite de sa relative stabilité intérieure et consolide son empire colonial. Aux confins de l’Inde, en 1846, une première guerre anglo-sikhe avait établi au Penjab, dans la plaine de l’Indus, un régime favorable. Le très jeune maharajah Dhulîp
Weitere Kostenlose Bücher