Vie de Franklin, écrite par lui-même - Tome I
l'assemblée se sépara sans avoir rien statué relativement aux milices.
La province étoit alors dans une situation très-alarmante. Exposée à des invasions continuelles de la part de l'ennemi, elle restoit sans aucun moyen de défense.
Dans cette crise, Franklin ne resta point oisif. Il proposa, dans une assemblée des citoyens de Philadelphie, une association volontaire pour la défense du pays. Son plan fut si bien approuvé que douze cents personnes le signèrent sur-le-champ. On en fit circuler des copies dans toute la province ; et, en peu de temps, le nombre des signataires s'éleva jusqu'à dix mille. Franklin fut choisi pour colonel du régiment de Philadelphie : mais il ne jugea pas à propos d'accepter cet honneur.
Des objets d'un genre bien différent attiroient la plus grande partie de son attention, et l'occupèrent même pendant quelques années. Il suivoit avec un cours d'expériences électriques tout le désir, que les philosophes de ce temps-là avoient de s'illustrer par des découvertes.
De toutes les branches de la physique expérimentale, l'électricité avoit été jusqu'alors la moins connue. Théophraste et Pline ont fait mention du pouvoir attractif de l'ambre, et après eux, tous les autres naturalistes en ont parlé. En l'année 1600, Gilbert, physicien anglais, augmenta considérablement le catalogue des substances qui ont la propriété d'attirer les corps légers. Boyle, Otto Guericke, bourguemestre de Magdebourg, célèbre par l'invention de la machine pneumatique, le docteur Wal et l'illustre Isaac Newton ont ajouté quelques faits à ceux de Gilbert. Guericke observa le premier le pouvoir répulsif de l'électricité, et la lumière et le bruit qu'elle produit. En 1709, Hawkesbec publia des expériences et des observations importantes sur le même sujet.
L'électricité fut ensuite assez long-temps négligée. Mais en 1728, M. Grey s'en occupa avec beaucoup d'ardeur. Ce savant et son ami Wheeler firent un grand nombre d'expériences, dans lesquelles ils démontrèrent que l'électricité pouvoit être communiquée d'un corps à l'autre, même sans qu'il y eût un contact immédiat, et que de cette manière, on pouvoit la conduire à une grande distance.
M. Grey découvrit encore qu'en suspendant une baguette de fer avec des cordons de soie ou de cheveux, et mettant au-dessous d'elle un tube agité, on pouvoit retirer des étincelles des extrémités de cette baguette, et y appercevoir de la lumière dans l'obscurité.
M. Dufay, intendant du Jardin des Plantes, à Paris, fit aussi plusieurs expériences, très-utiles aux progrès de l'électricité. Il en découvrit deux sortes, qu'il distingua sous les noms de vitreuse et de résineuse ; la première, produite par le frottement du verre, et la seconde excitée par le soufre, la cire à cacheter et quelques autres substances : mais il l'abandonna ensuite comme erronée.
Depuis 1739 jusqu'en 1742, Desaguliers s'occupa beaucoup de l'électricité. Mais ses travaux furent de peu d'importance. Il se servit pourtant le premier, des termes de conducteurs et d'électrique, par soi-même.
En 1742, plusieurs savans allemands firent des expériences d'électricité. Les principaux d'entr'eux étoient le professeur Boze de Wittemberg, le professeur Winkler de Leipsic, Gordon, bénédictin écossais et professeur de philosophie à Erfurt, et le docteur Ludolf de Berlin. Le résultat de leurs recherches étonna l'Europe. Ils se servoient de grandes machines, et par ce moyen ils pouvoient recueillir une quantité considérable d'électricité, et produire des phénomènes qui n'avoient point été jusqu'alors observés. Ils tuèrent de petits oiseaux, et mirent le feu à de l'esprit-de-vin.
Leurs expériences excitèrent la curiosité des autres philosophes. Vers l'année 1745, Collinson envoya à la compagnie de la bibliothèque de Philadelphie, un détail de ces expériences, avec une machine électrique et des instructions sur la manière de s'en servir.
Franklin et quelques-uns de ses amis, entreprirent aussitôt un cours d'expériences, dont le résultat est bien connu.
Franklin devint bientôt en état de faire plusieurs découvertes importantes, et de donner l'explication théorique de divers phénomènes. Ses idées à cet égard ont été universellement adoptées, et immortaliseront son nom. Il fit part de toutes ses observations à son ami Collinson, à qui il écrivit, en conséquence, une série de lettres, dont la
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